Euro féminin : après l'élimination des Bleues, autopsie d’un échec

© TOBIAS SCHWARZ / AFP
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Julien Froment , modifié à
Une fois de plus, l’équipe de France n’est pas parvenue à franchir le cap des quarts de finale d’un Euro. Inquiétant à deux ans du Mondial à domicile ?

C’est un plafond de verre qui semble incassable. L’équipe de France, troisième nation mondiale, n’a pas tenu son rang. Pire, avec cette élimination en quarts de finale de l’Euro, elle semble avoir régressé dans certains domaines. Le résultat est accablant. Une seule victoire en quatre matches, aucun but dans le jeu et une élimination sommes toute logique face à l’Angleterre dimanche, à Deventer. Les Bleues, plus dans la réaction que dans l’action durant tout le tournoi, ont failli dans beaucoup de domaines.

Efficacité, où es-tu ? C’est une mauvaise habitude qui perdure depuis quelques années maintenant. A l’instar du Mondial 2015 ou des Jeux de Rio en 2016, les Françaises ont bien eu du mal à se créer des occasions et, surtout, à les mettre au fond. Trois petits buts inscrits et, plus inquiétant, aucun dans le jeu. (Le but contre l’Islande a été marqué sur penalty, ceux contre l’Autriche et la Suisse sur coup de pied arrêté).

Le sélectionneur Olivier Echouafni avait pourtant tenté d’y remédier en ajoutant un entraîneur spécifique des attaquantes, avec Frédéric Née, sans qu’il n’y ait pour autant des résultats sur le terrain. "Il nous a manqué de la folie", analyse la milieu de terrain Elise Bussaglia. "On a fait face des équipes qui étaient souvent à onze derrière. On a essayé de jouer, on a beaucoup eu le ballon, mais on doit encore travailler notre efficacité", concède Jessica Houara.

Plus globalement, la France a eu la maîtrise du ballon, la possession, sans savoir quoi en faire dans les 30 derniers mètres. Et le sélectionneur a beau déclaré avoir été "déçu par la qualité de jeu de [nos] adversaires", c’est surtout la France qui a déçu dans ce domaine.

Des absences et des défaillances. L’absence d’Amel Majri pour "une bêtise" dixit Olivier Echouafni (elle s’est blessée durant ses vacances juste avant l’Euro) a eu un impact non négligeable sur les performances de l’équipe de France car c’est tout l’équilibre de l’équipe qui a été chamboulé. La jeune Sakina Karchaoui, malgré d’indéniables qualités, n’était peut-être pas encore prête à assumer une place de titulaire en défense. Son match face à l’Angleterre en est le parfait exemple, avec une faute de placement flagrante sur le but de Jodie Taylor.

" La plupart des filles du groupe sont assez jeunes, on va essayer de bâtir sur ça "

La défense, plus globalement, a paru fébrile dans certains moments-clés. Et devant, les Bleues n’ont pas su convertir le peu d’occasions qu’elles avaient. Le milieu de terrain, malgré le bon Euro d’Amandine Henry et de la jeune Grâce Geyoro (rare satisfaction du tournoi), n’est pas parvenu a pesé suffisamment dans le jeu offensif des Bleues. Quant à la gardienne Sarah Bouhaddi, elle n’est pas exempte de tout reproche sur le but anglais, à l’image d’un Euro où elle n’aura pas su être déterminante et rassurante pour son équipe.

Echouafni, maintenu malgré tout. Le sélectionneur britannique Mark Sampson a raillé son homologue français, arguant qu'il était "né de la dernière pluie", en référence à son manque d’expérience dans les grandes compétitions. Et en effet, le coach tricolore a beaucoup tâtonné, en témoignent les nombreux changements de onze de départ durant le tournoi. Si les joueuses affirment avoir progressé mentalement sous ses ordres, le résultat ne s’est pas fait ressentir sur le terrain.

Dans pareille situation, c’est souvent l’entraîneur qui paye l’addition. Mais le président de la Fédération Noël le Graët, malgré cet échec, a décidé de maintenir Olivier Echouafni dans ses fonctions. "C’est quelqu’un qui s’est impliqué énormément dans cette équipe, il n’avait pas une connaissance exceptionnelle du football féminin, il y a un an. Il a fait 15 matches pour une défaite", a indiqué à l’AFP Noël Le Graët qui avait pourtant fixé pour objectif le dernier carré.

Et maintenant ? Avec cette nouvelle contre-performance, c’est une partie de la génération "dorée" des Bleues qui va s’en aller sans titre majeur. Camille Abily a annoncé sa retraite internationale, Elise Bussaglia, Gaëtane Thiney et Laura Georges pourraient suivre. Il faut désormais construire pour l’avenir et pour le Mondial 2019, que la France organise. "La plupart des filles du groupe sont assez jeunes, on va essayer de bâtir sur ça et préparer 2019 (la Coupe du monde, ndlr) du mieux possible. Ce sera chez nous, j'espère qu'on aura quelque chose à faire. Mais ce soir, c'est rageant", concédait la capitaine Wendie Renard après l'élimination dimanche soir.

Malgré tout, il y a encore quelques raisons d'espérer. Une nouvelle génération va émerger. la joueuse du PSG Grace Geyoro (20 ans) a déjà démontré qu’elle aurait un rôle important dans les années à venir, d’autres jeunes ont aussi une carte à jouer (Katoto, Moroni, Cascarino). Le chantier semble énorme, la France a deux ans devant elle pour retrouver son jeu et redevenir une nation crainte de ses adversaires.