La fronde des militants REM en trois questions

Une trentaine de militants dénoncent un "verrouillage" du parti.
Une trentaine de militants dénoncent un "verrouillage" du parti. © FRANCOIS GUILLOT / AFP
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Une trentaine d'adhérents contestent la validité des statuts du parti d'Emmanuel Macron devant la justice, mardi. Ils dénoncent un vice de forme, mais surtout un manque de démocratie interne.

Sous le vice de forme, un vrai malaise ? Comme le révèle Le Parisien dimanche, une trentaine de militants de La République en marche! (REM) ont déposé un recours devant le tribunal de grande instance de Créteil pour contester les statuts du parti. Leur demande sera examinée en référé mardi, à 13h30.

Sur quoi se prononce la justice ?

Les militants mécontents ont saisi la justice pour un pur vice de forme. Ils estiment qu'ils ont été invités trop tard à voter les nouveaux statuts de la REM. Ce n'est que le 8 juillet qu'ils ont été informés de la tenue d'un vote électronique entre le 23 et le 30 juillet. Or, les statuts actuels du mouvement prévoient "une convocation un mois à l'avance", avancent les adhérents frondeurs dans un communiqué. Ce délai peut éventuellement être réduit à 15 jours "en cas d'urgence", mais dans ce cas, l'urgence doit être motivée par le conseil d'administration dans la convocation. "Ce qui n'a pas été le cas", martèlent les mécontents. C'est donc sur ce vice de forme que devra se prononcer le juge des référés mardi.

Plus largement, que contestent les adhérents ?

Ce qu'espèrent les requérants, c'est que le juge repousse l'assemblée générale lors de laquelle seront adoptés les nouveaux statuts. Ils auront alors le temps de mener "un grand débat national qui permette à la REM de construire de véritables statuts démocratiques", expliquent-ils. Car c'est là, en réalité que le bât blesse : les nouveaux statuts ne conviennent pas du tout à ces marcheurs. Ils "cantonnent les adhérents à un rôle de supporteur et les excluent de la gouvernance, aussi bien locale que nationale", regrettent-ils.

Par exemple, 25% du conseil national du parti sera composé d'adhérents tirés au sort sur candidature. Ce qui est une première pour un parti politique, mais reste insuffisant pour certains membres, qui auraient préféré que ce taux grimpe à 50%. Surtout que les 75% de membres restant ne sont pas élus, mais désignés ou membres de droit. "Adhérent d'En Marche, je ne serais jamais appelé à élire un représentant ou un candidat", dénonce Rémi Bouton, marcheur de la première heure à l'origine de la fronde. "À ce stade, la REM se propose d'être le parti le moins démocratique de France."

Dans leur communiqué, les militants frondeurs, qui ont décidé de se regrouper au sein d'un collectif appelé "la Démocratie En Marche", fustigent un "verrouillage de la gouvernance" qui, selon eux, "révèle une certaine défiance vis-à-vis des adhérents et apparaît en contradiction avec les valeurs de la REM". Sans compter que ces statuts ont été élaborés sans grande concertation. Entre le 8 et le 13 juillet, les adhérents ont été invités à faire remonter leurs remarques. Mais à ce moment-là, ils ne disposaient que d'une version résumée des statuts, pas de la version finale. "On a proposé des choses", raconte Rémi Bouton à Europe1.fr, "mais on ne les voit pas apparaître dans la version finale. Seuls des changements à la marge ont été faits."

Sur Twitter, la résistance s'organise aussi, notamment autour du hashtag #JeVoteNON.

Que répond la REM ?

Les membres du collectif "la Démocratie En Marche" l'assurent : ils ne sont pas dans la confrontation mais bien dans cette sacro-sainte bienveillance prônée depuis le début par Emmanuel Macron lui-même. La preuve : ils ne demandent pas l'annulation du scrutin mais seulement son report, et sont prêts à accepter l'adoption des statuts actuels de façon provisoire, afin de se laisser le temps d'en élaborer collectivement de nouveaux. En outre, "on a prévenu le mouvement de l'action en justice", souligne Rémi Bouton. Qui a vu la direction du parti "embêtée", mais pas prête à lâcher du lest pour autant.

Du côté de la direction du parti, on calme le jeu. "Il y aura toujours des mécontents, c'est la vie normale des organisations", temporise la sénatrice Bariza Khiari, déléguée nationale REM dans les colonnes du Parisien. La secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, n'a pas paru plus inquiète au micro d'Europe 1 lundi. "Je ne parlerais pas de dissensions", a-t-elle déclaré à propos de ces militants mécontents. Une action en justice ? "C'est leur droit, ils mènent leur process [sic] mais les statuts ont été largement discutés. Pour un mouvement aussi jeune que le nôtre, ce mouvement fonctionne très bien. Il a fait élire un président de la République et une très large majorité aux législatives."