"Le pouvoir d'achat des retraités évolue dans le mauvais sens", affirme l'économiste Éric Heyer

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Éric Heyer récuse le terme de "paupérisation" pour parler de la situation des retraités. © Europe 1
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La fin de l'indexation des pensions de retraites sur l'inflation est un énième coup dur pour les seniors. S'ils ne sont pas tous à plaindre, leur situation risque toutefois de s'aggraver, a expliqué l'économiste de l'OFC Éric Heyer chez Matthieu Noël vendredi matin.
INTERVIEW

Rentrée compliquée pour le portefeuille des retraités. Après une hausse de la CSG pour les plus aisés d'entre eux l'année dernière, ce sont cette fois-ci les pensions qui vont en prendre un coup. Édouard Philippe a en effet prévenu que la hausse des pensions de retraite ne serait plus indexée sur l'inflation. Un énième coup dur qui énerve les retraités. "Ils ont un peu raison d'être inquiets. Le gouvernement a décidé de favoriser les actifs en rendant le travail plus incitatif et donc plus rémunérateur. Mais puisqu'il existe des contraintes budgétaires, pour aider les actifs, il faut prendre ailleurs, chez les inactifs", explique l'économiste Éric Heyer, invité de Matthieu Noël vendredi matin.

Pouvoir d'achat proche de celui des actifs. Si les retraités peuvent regretter cette décision, ils ne sont pas non plus, pour une grande majorité, en situation de détresse financière. "Il faut mettre un bémol : parmi les inactifs, ce sont les retraités qui se portent le mieux", tempère Éric Heyer, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). "On ne peut pas dire que les retraités ont un pouvoir d'achat plus faible que le reste de la population française. Si on se base sur les chiffres de l'Insee 2016, ils sont mieux lotis que la moyenne des actifs", précise-t-il. "Mais l'Insee inclut les enfants dans les actifs. En se restreignant aux plus de 18 ans, alors les retraités et les actifs ont un pouvoir d'achat relativement équivalent."

Et l'herbe n'est pas plus verte ailleurs : le pouvoir d'achat des retraités français est "largement supérieur" à celui de leurs voisins européens, affirme Éric Heyer. "Le taux de pauvreté de nos retraités est bien inférieur à ce qu'on peut trouver ailleurs. En ce qui concerne les revenus, un retraité français gagne 15% de plus qu'un retraité allemand et 25% de plus qu'un Suédois", appuie-t-il.

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Érosion du pouvoir d'achat. Reste que le pouvoir d'achat des retraités va évoluer "dans le mauvais sens" dans les années à venir. "Le président parle des 'Gaulois réfractaires aux réformes' mais il y a eu beaucoup de réformes des retraites depuis celle de 1993, sous Balladur", rappelle Éric Heyer. Et toutes n'ont pas eu des conséquences positives pour les retraités. "Cette réforme a instauré un bouleversement : avant, les pensions étaient indexées sur le salaire, mais depuis, elle sont indexées sur l'inflation. Or, les salaires progressent plus vite que l'inflation", souligne l'économiste.

Résultat, "petit à petit, le pouvoir d'achat des retraités s'érode par rapport à celui des actifs", note Éric Heyer. "Les projections du Conseil d'orientation des retraites indiquent que, d'ici à 2045, il y aura 20% d'écart au détriment des retraités." Toutefois, l'économiste récuse le terme de "paupérisation" : "Il est un peu excessif dans le sens où il y a un minimum vieillesse qui existe et préserve généralement les retraités de la pauvreté. Et ce minimum vieillesse est indexé sur l'inflation". Le taux de pauvreté des retraités est de 7,3%, cinq points en dessous de la moyenne nationale.