Bretagne : les raisons de la fronde agricole

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Doux, Gad, Tilly-Sabco, etc. : les employés de la filière agro-alimentaire sont à bout et prêts à tout.

L’INFO.  "On va vers une espèce de guerre civile", prévient un employé du secteur volailler "prêt à aller jusqu'au bout, jusqu'à la taule!". Après l’annonce d’une nouvelle fermeture d’usine dans le secteur de l’agro-alimentaire, en l’occurrence l'abattoir Gad de Lampaul-Guimiliau, le ton monte en Bretagne. Deux manifestations se sont tenues lundi à Brest et Morlaix et la grogne est telle que le gouvernement a annoncé la tenue d’une table ronde mercredi à Matignon avec six ministres. Mais pourquoi les Bretons sont-ils si virulents ?

Gad SAS

Le plan social de trop. La suppression de près de 900 emplois à l'abattoir Gad de Lampaul-Guimiliau, dans le Finistère, a été la goutte d’eau. Et pour cause : les mauvaises nouvelles ne cessent de s’accumuler dans le secteur agro-alimentaire. Le groupe Doux, premier producteur de volaille en Europe, a été placé en redressement judiciaire en 2012 et a supprimé plus de 1.000 emplois. Le groupe Marine Harvest, spécialisé dans le saumon, vient d’annoncer son intention de fermer les sites de Poullaouen et de Chateaugiron, qui emploient à eux deux près de 450 personnes. Et le volailler Tilly-Sabco compte réduire sa production de 40%. Une avalanche de mauvaises nouvelles s’abat donc sur la Bretagne, ce qui a poussé Olivier Le Bras, représentant syndical FO chez Gad, à parler d’un "tsunami social".

L’agro-alimentaire trop central pour être négligé. Si la Bretagne est si sensible lorsqu’il s’agit d’agro-alimentaire, c’est aussi parce que ce secteur fournit avec l’agriculture un tiers des emplois dans la région. Et une réduction de l’activité d’une usine a des répercussions sur tout le reste de la chaine industrielle (transformation, emballage, transports, sous-traitants, etc.).

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La Bretagne se fait dépasser par la concurrence. La Bretagne a longtemps fait figure de champion : elle est le premier producteur du pays dans le domaine du porc, de la volaille et des œufs. Or, ce sont précisément ces trois filières qui sont en crise. Ce modèle d’agriculture ultra-intensive et productiviste est en plein déclin, concurrencé par des pays qui peuvent faire encore "mieux" lorsqu’il s’agit de réduire les coûts. Car pour expliquer les raisons du malaise breton, il faut aussi regarder au-delà de nos frontières.

Agnès Le Brun, maire UMP de Morlaix et députée européenne, a ainsi pointé une "distorsion de concurrence avec l'Allemagne", qui ne cesse de tailler des parts de marché à la France. A titre d’exemple, un salarié (souvent polonais ou roumain) dans un abattoir allemand coûte deux fois moins cher qu’en France. Résultat, il arrive même que des porcs français soient envoyés se faire abattre en Allemagne avant de revenir dans l’Hexagone.