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Océane Théard , modifié à
Depuis fin septembre, la Ciivise a mis en place une plateforme téléphonique dédiée aux victimes d’inceste. Un numéro spécial pour recueillir la parole des victimes et de leur entourage et les conseiller. À ce jour, plus de 1.800 nouvelles victimes d’inceste ont été identifiées avec la mise en place de cette plateforme.
REPORTAGE

La sonnerie du téléphone retentit dans ce petit bureau aux murs blancs, aménagés dans les locaux de l'association Collectif féministe contre le viol. En septembre, lors de l'ouverture de la plateforme téléphonique dédiée aux victimes de violences sexuelles dans l’enfance par la Ciivise (Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants), "la ligne était toujours occupée, parfois les personnes devaient attendre 48 heures avant que l’on puisse les écouter", se souvient Alexandra, lunettes roses et chignon blond, une des quatre écoutantes. La ligne 0805 802 804 est ouverte entre 10 heures et 19 heures.

 

Entre deux et cinq appels par jour

Ce jour-là, les appels sont plus rares, mais le téléphone sonne toujours "deux à cinq fois par jour environ". Une autre écoutante, Alicia, vient de décrocher. Sur son cahier grands carreaux, elle prend en note, à toute vitesse, le témoignage d’une mère. "C’est une maman qui a recueilli la parole de sa petite fille de 3 ans, victime du père. Elle a appelé la police, elle a déposé plainte, elle a tout fait. Mais maintenant elle nous demande 'qu’est-ce que je peux faire de plus' ?"

Pour chaque appel, chaque victime, il faut recueillir une parole, douloureuse, trouver les mots, déculpabiliser. "Vous avez bien expliqué à votre fille que ce qui s’était passé, c'était grave. Les phrases à redire souvent, c'est je te crois, tu n’y es pour rien", rappelle Alicia à cette mère démunie. Les écoutantes redirigent aussi vers des juristes, des psychologues, des groupes de parole dont les numéros sont épinglés au mur.

1.826 nouvelles victimes en 2021

Depuis la mise en place de la plateforme, 1.826 nouvelles victimes ont été connues en 2021, des femmes en grande majorité. "Ça montre l’ampleur des violences sexuelles dans l’enfance dans notre société et la nécessité que la société se responsabilise sur cette question", avance Alexandra. Et se responsabiliser, cela passe, entre autres, par l’écoute, cruciale, de la parole des enfants. "Plus on va créer des espaces bienveillants, que ce soit un médecin ou à l’école, et plus ces enfants pourront parler, avoir des espaces et des interlocuteurs".

Des aides concrètes qui accompagneront les préconisations intermédiaires de la Ciivise publiées jeudi, c’est ce qu’attendent ces écoutantes qui tous les jours recueillent les paroles des victimes.