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Stéphane Burgatt (à Marseille), édité par Solène Leroux , modifié à
Ce lundi s'ouvre à Marseille le procès de l'ancien docteur Guedj, dentiste aujourd'hui radié, soupçonné d'avoir mutilé de très nombreux patients issus de quartiers déshérités de Marseille. Parmi les victimes, 322 personnes se sont constituées parties civiles ainsi que cinq mutuelles, l'Assurance maladie et l'Ordre des chirurgiens dentistes.

Aujourd'hui radié, l'ancien praticien dentiste est poursuivi aux côtés de son père pour violences volontaires ayant entrainé une infirmité ou mutilation permanente et escroqueries. Il est accusé d'avoir pratiqué, des actes de chirurgie dentaire qui n'avaient pas lieu d'être, pour un pactole estimé à plusieurs millions d'euros. Ils encourent jusqu'à dix ans de prison et 375.000 euros d'amende. Parmi les victimes, 322 personnes se sont constituées parties civiles ainsi que cinq mutuelles, l'Assurance maladie et l'Ordre des chirurgiens dentistes. Une salle spéciale a été aménagée dans une ancienne caserne militaire.

"Je ne pourrai jamais refaire ma vie"

Les victimes souffrent toujours dans leur chair. C'est le cas de Saleha. Comme elle, de nombreuses victimes sont issues de quartiers défavorisés au nord de la ville. Cette mère de famille se remémore douloureusement ces douze dernières années. À l'époque, ce devait être une simple visite, pour une dent fêlée. Mais la consultation tournera finalement au cauchemar : "Il m'a charcuté, il a gâché ma vie. Il a abusé de ma confiance, car je m'occupais à l'époque de mon mari en fin de vie. Il a commencé à me tailler toutes les dents. Ensuite, ça a été des abcès à répétition. J'ai dû subir trois interventions à cause de lui. J'aurais dû me méfier quand il me faisait la bise et gardait dans son tiroir ma carte vitale."

Pas d'indemnisation depuis

Dans son quartier de La Castellane, de nombreuses personnes sont passées entre les mains du dentiste. Dont plusieurs membres de la famille de Saleha qui comme elle, attendent toujours réparation : "Il a notamment charcuté ma fille alors qu'elle n'avait que 16 ans. Ma nièce également. À 30 ans elle ressemble à une personne âgée, car elle n'a plus de dents. Depuis tout ce temps, nous n'avons pas été indemnisées et nous n'avons pas d'argent pour refaire nos dents. Je n'arriverai jamais à refaire ma vie avec une bouche comme ça. Jamais. Je n'ose pas sourire, ou bien en mettant la main devant."

L'ancien dentiste aurait organisé son insolvabilité

Ce procès aboutira à de lourdes sanctions selon Me Lionel Febraro, l'avocat de Saleha et dix autres personnes parties civiles. Mais il redoute que pour les indemnisations, l'issue ne soit une déception pour tout le monde. D'après lui, l'ancien dentiste a organisé son insolvabilité : "C'est pire que ça en fait. Il a pris la précaution, avant même ces faits, de mettre tout son patrimoine à l'abri. Tout est dispatché dans des sociétés qui ne lui appartiennent pas. Elles sont dirigées par son épouse avec qui il est marié en séparation de biens. Lionel Guedj est aujourd'hui salarié d'un luxueux bureau de tabac géré par son épouse."

C'est pourquoi l'avocat attend que les autorités se saisissent de ce dossier qu'il qualifie de "catastrophe sanitaire".