Rappels au règlement, cris et pantalon : la semaine chaotique de l'Assemblée

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Jean-Luc Mélenchon, excédé par les débats parlementaires à l'Assemblée. © Capture d'écran Assemblée nationale
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Entre l'amateurisme des députés de la majorité, le bizutage de l'opposition et les discussions enflammées habituelles, l'examen du projet de loi de confiance a souvent tourné à la foire d'empoigne.

La majorité l'avait promis : avec des députés REM dans l'Hémicycle, armés de leur volonté de moderniser l'action politique et de mettre fin aux vieilles pratiques, fini les séances qui virent à la cour de récréation. Force est de constater, après un mois de législature, que c'est un échec.

Cette semaine, consacrée à l'examen en séance du projet de loi confiance, a été particulièrement agitée. Suspensions de séance en série, rappels au règlement dignes de ceux de Hervé Mariton à la grande époque du mariage pour tous, boycott de certains députés…retour sur cinq jours mouvementés.

Lundi, rappel au règlement

Les débats ont commencé lundi soir sur les chapeaux de roue. Et ont été présidés par la députée REM Danielle Brulebois. Celle-ci a rapidement été épinglée pour sa gestion des débats. Les élus de l'opposition se sont agacés de ne pas pouvoir discuter de leurs sous-amendements, l'élue au Perchoir passant au vote avant de leur donner la parole.

La députée Nouvelle Gauche Delphine Batho est immédiatement montée au créneau, brandissant le règlement de l'Assemblée nationale. "On est dans un débat de moralisation de la vie publique et, franchement, délibérer dans des conditions pareilles est proprement ahurissant !"

Mardi, cris et chuchotements

Les critiques en amateurisme adressée par les députés plus chevronnés aux marcheurs néophytes ont de nouveau été alimentées par la tenue des débats mardi, probablement la journée la plus agitée de toutes. Après avoir appelé plusieurs fois un vote en faveur d'un amendement, la présidente de séance, Carole Bureau-Bonnard, a suscité un tollé. Les choses ne se sont pas arrangées lorsque l'élue a ensuite refusé de donner la parole au MoDem Jean-Louis Bourlanges, qui a donc quitté l'Hémicycle en signe de protestation.

Mais ce n'était encore que le début.  "Vous menez ces débats d'une façon incompréhensible", a hurlé le communiste André Chassaigne. Très chahutée, perdue en dépit des chuchotements secourables de l'administrateur derrière elle, Carole Bureau-Bonnard a suspendu la séance avant d'être remplacée au pied levé par François de Rugy.

Mercredi, pétanque et bizutage

De retour au Perchoir, Danielle Brulebois a encore une fois connu quelques moments de solitude, se trompant sur des amendements identiques qui, en réalité, ne l'étaient pas, ce que l'opposition n'a évidemment pas manqué de lui rappeler bruyamment. "On n'est pas dans l'Assemblée générale du club de boulistes", s'est époumoné le Républicain Christian Jacob.

François de Rugy a repris la main dans la soirée pour diriger des débats au galop, les rappels au règlement et suspensions de séance ayant considérablement ralenti la cadence.

Jeudi, inattention et rébellion

Tout n'ayant pas encore été tenté pour perturber la tenue des débats, les députés ont rivalisé d'imagination jeudi. La majorité REM a commencé par rejeter un article sur la transparence fiscale des ministres qui avait pourtant été validé en commission, ayant de toute évidence mal compris l'enjeu du scrutin. Ce qui a fait bondir le président de séance, Sacha Houlié. "Faut être attentif", a-t-il lancé à ses collègues. "Quand je soumets au vote un amendement, c'est un amendement, quand je soumets un article, c'est un article."

Plus tard, un rappel au règlement de Christian Jacob a entraîné une suspension de séance. Ce qui n'était encore rien par rapport à la bronca dans l'Hémicycle après le rejet d'un amendement MoDem. Estimant que le président de séance, Hugues Renson, avait mal compté les mains levées, plusieurs élus ont réclamé un recompte, en vain. Comme on n'est jamais mieux servi que par soi-même, certains élus se sont quand même levés pour imposer un vote "assis-debout". Avant, finalement, que la France Insoumise ne quitte l'Assemblée en signe de protestation.

Le groupe de Jean-Luc Mélenchon a été suivi un peu plus tard par les Républicains, furieux que le président refuse de faire voter le premier projet de loi (ordinaire) dans la nuit et le reporte au lendemain. Les travaux ont finalement été suspendus.

Vendredi, chemise dans le pantalon

Pris d'un élan de lucidité, plusieurs députés ont regretté le "spectacle" donné la veille, "à l'honneur de personne", comme l'a dit le REM Gilles Le Gendre. À droite, plusieurs voix se sont levées pour rappeler que François de Rugy, Christophe Castaner et Richard Ferrand étaient très peu présents dans l'Hémicycle. Le second, ministre des Relations avec le Parlement, avait d'ailleurs été dépêché sur place.

L'examen s'est ensuite prolongé sur des amendements "cavaliers" (sans rapport avec le texte initial) des groupes communistes et France Insoumise, dans une ambiance néanmoins un peu plus tenue. En parlant de tenue, François Ruffin (FI) avait fait un effort sur la sienne, vilipendée par Christian Jacob quelques jours plus tôt car sa chemise n'était pas rentrée dans son pantalon. "Ça ne plaît pas à monsieur Jacob, mais ça ne plaît pas non plus à ma mère", a expliqué l'élu de la Somme.

Alexis Corbière s'est lancé dans un rappel au règlement sur la base non d'un article mais "de la correction élémentaire" et, en dépit d'un report de la pause déjeuner, ce qui est toujours risqué car les députés n'ont pas le droit de manger dans l'Hémicycle, les débats se sont déroulés sereinement. Du moins jusqu'à l'heure à laquelle nous écrivons ces lignes.