Qu'attendre d'"Ensemble citoyens !", le mouvement lancé par la majorité ?

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Nicolas Beytout
Plusieurs personnalités de la République en marche ont lancé lundi à Paris le mouvement "Ensemble citoyens !" qui vise à soutenir la future campagne présidentielle de la majorité, qui devrait être emmenée par le président sortant Emmanuel Macron. Sur Europe 1, l'éditorialiste Nicolas Beytout y voit le retour de la politique à l'ancienne.
ANALYSE

Un drôle de nom qui en rappelle un autre. Lundi soir, plusieurs personnalités de la République en marche, le parti présidentiel, ont lancé à Paris un nouveau mouvement politique baptisé "Ensemble citoyens !" qui devrait soutenir la campagne présidentielle du président sortant, Emmanuel Macron. Parmi ces personnalités de la majorité figurent Édouard Philippe, Richard Ferrand, François Bayrou ou encore le Premier ministre Jean Castex. Pour l'éditorialiste d'Europe 1, Nicolas Beytout, ce nouveau mouvement marque le retour de la politique dite "à l'ancienne".

En bon français, "Ensemble citoyens !" ne veut strictement rien dire

"Ensemble citoyens !", c'est d'abord une dénomination bizarre, avec un point d’exclamation et un "s" à citoyens, ce qui, en bon français, ne veut strictement rien dire. Mais il fallait que le nom de ce mouvement politique contienne un mot fédérateur (ensemble), qu’il ait un sens républicain (citoyens) et un point d’exclamation comme pour En marche !. Oui, parce que ce "Ensemble citoyens !", c’est la nouvelle machine de guerre électorale des partis, les grands, les petits et les minuscules, qui soutiennent la réélection d’Emmanuel Macron.

On y retrouvera les membres de la République en Marche, flanqués sur leur droite du nouveau parti d’Edouard Philippe (Horizons, avec un s - décidément, ils ont de drôles de noms dans cette famille politique -). Il y aura aussi au centre droit les gens d’Agir, au centre-centre le MoDem, et au centre gauche les adhérents à Territoires de Progrès en attendant éventuellement, un peu plus à gauche encore, la microstructure dénommée En commun, créée par Barbara Pompili. Et tout ça est censé former un mouvement.

Un mouvement tourné vers les élections législatives de 2022

Parce qu'il s'agit bien d'un mouvement, et non d'un parti. Comme dirait Magritte, ceci n’est pas un parti politique. Ça en a tout l’air, mais ce sera nettement plus gazeux. Par exemple, il ne devrait pas y avoir d’adhérents directs, pas de militants de cette seule structure. L’appartenance à Ensemble citoyens ! passera par l’inscription aux partis politiques qui composeront ce "machin". Et ce "machin" aura comme finalité les prochaines législatives. Tout ce petit monde se place dans l’hypothèse où, Emmanuel Macron ayant de fortes chances d’être réélu, c’est ensuite que tout se jouera, au cours des élections législatives, en juin.

C’est à ce moment-là que le président réélu saura s’il a ou non une majorité pour gouverner. Jusqu’ici, historiquement, tous les présidents élus ont réussi à envoyer, dans la foulée, une forte majorité de députés à l’Assemblée. C’est comme ça qu’Emmanuel Macron, après sa victoire en 2017, a pu faire élire une majorité absolue de candidats dont une bonne part d’inconnus, parfois totalement inexpérimentés en politique. Le problème, c’est que cette majorité a laissé des plumes dans la traversée de l’actuel quinquennat.

Les Macroniens de pure obédience sont désormais minoritaires à l’Assemblée, et ils doivent composer avec les élus MoDem de l’ombrageux François Bayrou, ainsi qu’avec les ailes droite et gauche de la République en Marche. Tout ça ne pouvait pas tenir plus longtemps. Et le risque était de voir tout ce petit monde se représenter en ordre dispersé aux législatives. Après avoir été une machine à gagner, la République en Marche pouvait devenir une machine à perdre. D’où la naissance de Ensemble citoyens !

Des personnalités qui ne renoncent pas à leur autonomie

Si plusieurs partis composeront ce "machin", ils continueront tout de même d'exister. Et c’est la limite de l’exercice. Parce que, naturellement, les hommes et femmes politiques qui ont déjà commencé à prendre leur autonomie vis-à-vis de LREM n’ont pas du tout l’intention d’y renoncer. C’est le cas en particulier d’Edouard Philippe, et de son nouveau parti. Si l’ancien Premier ministre a publiquement appuyé la candidature d’Emmanuel Macron à un second mandat, il compte bien travailler pour son compte dans les années qui viennent.

François Bayrou, de son côté, veut maintenir son influence sur la majorité et se méfie beaucoup de toutes les concurrences internes, en particulier celle d’Edouard Philippe. Il faudra tout le talent de ce vieux routier de la politique qu’est Richard Ferrand, le président de l’Assemblée nationale et cobâtisseur de "Ensemble citoyens !" pour faire vivre et survivre (autrement que sur le papier) cet objet politique non identifié.