"On ne peut donc pas laisser des gens comme ça dans la nature, et je crois que c'est cette question là que soulève l'affaire Angélique", a déclaré maître Rodolphe Constantino. 0:42
  • Copié
Ugo Pascolo , modifié à
Pour maître Rodolphe Constantino, avocat spécialiste de la défense des enfants victimes de violences sexuelles, l'affaire Angélique pose la question de la récidive des auteurs d'infractions sexuelles. 
INTERVIEW

"On ne guérit jamais de la pédophilie, on ne change pas d'objet sexuel dans une vie". Invité d'Europe 1 Bonjour lundi, maître Rodolphe Constantino, avocat de l'association Enfance et Partage, spécialiste de défense des mineurs victimes de violences sexuelles, se montre catégorique. Pour lui, l'homme de 43 ans qui a avoué avoir tenté de violer Angélique, 13 ans, avant de la tuer aurait dû "faire l'objet d'un suivi socio-judiciaire et pas être laissé, comme ça, dans la nature". 

"Le pédophile est comme un alcoolique". L'homme figure parmi les 70.000 noms inscrits au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV), pour des faits qui remontent à 1994. "Cette affaire montre que le FIJAISV qui nous a été vendu comme un outil de prévention, n'en n'est pas un du tout", lance Rodolphe Constantino. "Ce qu'il faut bien comprendre, sinon on n'a rien compris, le pédophile, même si la pédophilie n'est pas une addiction, il est comme l'alcoolique : au mieux, il est abstinent. Mais il reste pédophile toute sa vie", lance-t-il. "On ne peut donc pas laisser des gens comme ça dans la nature, et je crois que c'est cette question là que soulève l'affaire Angélique". 

"On n'a rien pour y faire face". "Nous sommes très à la traîne dans le suivi des pédophiles", dénonce l'avocat. Selon les statistiques, près d'un quart des délinquants sexuels récidivent. "Un suivi socio-judiciaire de 20 ans peut-être prononcé par un tribunal", révèle-t-il. "Si l'homme avait été suivi, aujourd'hui on serait dans ce cadre-là, mais on n'en n'a pas les moyens, et on ne veut pas les mettre en avant". "Les tribunaux ne font pas de suivi parce que c'est trop long, ça va s'effilocher dans le temps et au bout d'un moment le pédophile ne verra plus personne", déplore-t-il au micro d'Europe 1. "On a l'impression de découvrir seulement aujourd'hui des nouveaux monstres, mais les pédophiles ont toujours existé !" "En France, ils vivent ça dans une grande solitude, et on n'a rien pour y faire face". 

 

>> A LIRE AUSSI - Ce que l'on sait du suspect

Le maire aurait pu consulter le FIJAISV. "Les pédophiles sentent quand la pulsion revient, ce n'est pas un comme un coup de tonnerre dans un ciel serein", dévoile le spécialiste. "Et en France, on n'a même pas un numéro vert qu'ils peuvent appeler pour parler de leur difficultés (...) alors que dans les pays nordiques et au Canada, il y a des structures adaptées", détaille-t-il. "Il faut appliquer nos lois de bonne manière : le FIJAISV peut être consulté par les localités. Alors pourquoi le maire n'était-il pas au courant alors que, visiblement, l'homme travaillait comme chauffeur de car et était en contact avec les enfants ?" "On se retrouve dans ce genre de situation parce qu'on ne fait pas savoir ce qui existe. Peut-être même que la commune de Wambrechies ne savait même pas qu'elle était en mesure de consulter le FIJAISV", déplore Rodolphe Constantino.