Julie a fait une fausse couche due à un œuf clair : "J’ai cru mourir de douleur"

  • Copié
Léa Beaudufe-Hamelin
Julie pensait être enceinte de deux mois et demi, mais avait en réalité un œuf clair. Il s’agit d’un ovule fécondé qui ne contient pas d’embryon, un sac vide. Au micro d’Olivier Delacroix, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Julie raconte avoir intensément souffert avant que l’œuf ne soit expulsé.
TÉMOIGNAGE

Alors qu’elle croyait être enceinte de deux mois et demi, Julie a été prise de fortes douleurs au bas ventre et de saignements. S’étant rendu aux urgences, elle raconte avoir été confrontée à un gynécologue dont l’attitude l’a beaucoup choquée. Ce dernier lui a annoncé qu’elle avait un œuf clair, sans lui expliquer de quoi il s’agissait. Un œuf clair est un ovule fécondé qui ne contient pas d’embryon. Sur "La Libre antenne", Julie évoque la douleur ressentie avant que l’œuf ne soit expulsé et les suites difficiles de cet événement. 

"J’ai 25 ans. On essayait d’avoir un bébé avec mon conjoint depuis novembre. Au début du mois de février, j’ai eu du retard. Le test de grossesse était positif. À la prise de sang, tout allait bien. J’ai appelé l’hôpital pour faire une échographie de datation. On m’a dit que ça ne se faisait qu’au troisième mois et que tant qu’il n’y avait pas de signe d’alerte, je ne devais pas m’inquiéter. Est arrivé le week-end du 9 mars. J’étais à deux mois et demi. Je commençais déjà à avoir le ventre qui se dessinait. 

Le vendredi soir, on était chez les parents de mon conjoint. On a voulu leur faire une surprise en leur annonçant qu’ils allaient devenir grands-parents. Je n’étais pas très bien depuis le matin, mais je ne m’en préoccupais pas plus que ça. Dans la nuit, j’ai été réveillée par de grosses douleurs au bas ventre et je saignais. J’ai pris un médicament, mais ça ne passait pas. J’essayais de me rendormir, mais ça me réveillait. J’étais pliée en deux. On a décidé d’aller aux urgences. On se posait plein de questions sur le trajet. Il y avait même un silence pesant dans la voiture. 

" Sans me demander l’autorisation, il a inséré le spéculum "

On a attendu le gynécologue de garde pendant une demi-heure. On a vu arriver un monsieur se frottant les yeux, soufflant et baillant. On sentait qu’on l’agaçait dès le départ. Il a regardé mon conjoint et dit : ‘C’est pourquoi’. Il me semble que c’est encore moi qui ai l’utérus. Je pleurais parce que j’étais paniquée. Il m’a regardée de haut et bas et m’a dit : ‘Déshabillez-vous le bas’. Sans me demander l’autorisation, il a inséré le spéculum. Je pensais qu’il allait faire une échographie abdominale. Sans me demander l’autorisation une nouvelle fois, il a inséré la sonde et s’est tu. 

Je crois que je me souviendrai toute ma vie de ce silence. Au bout de quelques minutes, c'est moi qui lui ai demandé ce qu’il y avait. Il m’a répondu : ‘Rien. Vous avez un sac vide. Vous n’avez pas de bébé’. J’ai commencé à pleurer. Il m’a dit : ‘Je vais vous donner un médicament pour expulser votre sac vide’. On n'a pas eu le temps de lui demander comment ça allait se passer. Il m’a donné le médicament et m’a dit : ‘C’est bon, vous pouvez rentrer chez vous’. Il m'a laissée partir comme ça sans compte-rendu, ni lettre. 

" J’ai eu d'énormes contractions qui m'ont fait tomber à terre "

Il ne m’a pas dit comment ça allait se dérouler. J'ai pris le médicament le lendemain. J’ai eu d'énormes contractions qui m'ont fait tomber à terre. J'ai cru mourir de douleur. J’ai presque voulu mourir pour que la douleur s'arrête tant c’était fort. Je n'ai pas dormi de la nuit. Le lendemain, ça allait mieux. Puis, le mal de ventre me reprenait jusqu’au moment où j’ai expulsé l’œuf. J’ai eu ce qu’on appelle un œuf clair, un œuf qui ne s’est pas développé. Concrètement, il n'y avait pas d’enfant. Les échographies de datation sont importantes, parce qu’elles permettent de savoir assez tôt si on a un œuf clair ou pas. 

Le gynécologue ne m’a pas expliqué que c’était un œuf clair. Je l’ai su parce que j’ai pris rendez-vous pour une échographie de contrôle une semaine après. On m’a demandé pourquoi je n’avais pas de lettre ou de compte-rendu. Je me suis sentie bête parce que je ne savais même pas ce qui s'était passé. Je suis tombée sur un gynécologue obstétricien fabuleux qui m'a beaucoup rassurée et m'a expliqué ce qu'était un œuf clair. Il m’a dit que ça arrive à une femme sur trois, mais qu’on n’en parlait pas parce que c’était tabou. C'est tellement tabou qu’on ne nous prévient pas. 

 

J’ai quand même été sous antidépresseurs pendant une dizaine de jours. Je suis toujours émue quand j’en parle. Je suis boulimique. Avec la grossesse, ça allait mieux, mais j’ai complètement rechuté. Je grignotais de nouveau. Ça a entraîné une suite de complications. Le regard sur soi a été très compliqué à vivre. Je ne me regardais plus dans le miroir. J’en ai cauchemardé pendant quinze jours. Je le voyais me dire : ‘Vous avez un sac vide’. On s’en veut. J’avais honte d’avoir eu un œuf clair. Au début, je croyais que c'était de ma faute.

Je me suis sentie démunie parce qu’on ne m’a proposé aucun accompagnement psychologique. Pour des raisons personnelles, je voyais déjà une psy qui a été fabuleuse. Moi, j’ai eu la chance d’être entourée, mais il y a des filles qui ne sont pas entourée et qui peuvent être fragiles psychologiquement. J’ai un conjoint fabuleux. On en est ressortis plus forts. On a toujours envie d'avoir un enfant. Ça va mieux. J’ai travaillé dessus. Je ne sais pas comment je vais réagir à la prochaine grossesse. Il faudra faire une échographie parce que je ne veux pas revivre ce calvaire. C'était un cauchemar."