Michel Blanc : "Je dois tout" au personnage de Jean-Claude Dusse

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Aurélie Dupuy , modifié à
Seize ans après "Embrassez qui vous voudrez", Michel Blanc revient en salles avec "Voyez comme on danse". Le temps d'une balade parisienne avec Frédéric Taddéï, il évoque sa carrière et notamment son rôle dans "Les Bronzés".
INTERVIEW

Michel Blanc a 66 ans et se traite volontiers de vieux con. La raison ? Son regret d'un Paris aimé, artisan, qui proposait une vraie mixité. C'est ce Paris "de Gabin" qui lui manque, sans pour autant tomber dans la nostalgie. Pour rencontrer Frédéric Taddéï aux rênes de l'émission En balade avec, c'est donc l'ancien "ventre de Paris", le quartier des Halles qu'il choisit. Dans quelques jours, le 10 octobre, sortira son nouveau film, Voyez comme on danse. Au micro d'Europe 1, le réalisateur a évoqué ce long-métrage, qui arrive seize ans après Embrassez qui vous voudrez. Il analyse aussi sa carrière, son fameux rôle de Jean-Claude Dusse dans Les Bronzés, et montre qu'il vibre toujours autant pour la musique.

Au piano. Près des Halles, c'est justement au cœur d'un temple de la musique qu'il propose quelques pas : à l’église Saint-Eustache. "Ici, se sont passées des choses importantes, pour quelqu’un qui aime la musique", dit-il. "La messe d’enterrement de la mère de Mozart a eu lieu ici. Les restes de Jean-Philippe Rameau, le compositeur, ont été ensevelis quelque part. Et Berlioz a écrit un Te Deum ici je crois", énumère Michel Blanc. Lui aurait d'ailleurs aimé être pianiste. Entre 18 et 20 ans, il s'entraîne plusieurs heures par jour. "J’avais commencé à 13 ans. Je savais que c'était beaucoup trop tard." Sans clavier, sa carrière se jouera donc sur une scène de théâtre ou des plateaux de cinéma.

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"Une bande de crétins connus au lycée". Tout n'a pas été simple pourtant. Michel Blanc rate le concours de la rue Blanche, école préparatoire au conservatoire : "Je l’ai pris en pleine tête." Mais c'est un mal pour un bien. "Ça m’a permis de rejoindre une bande de crétins que j’avais connus au lycée. C’est grâce à ce jury que j’ai été au bon endroit au bon moment, c'est-à-dire au café-théâtre, quand les metteurs en scène n’allaient plus chercher forcement au conservatoire." Ce sera l'époque du Splendid et des grands succès dont les cultissimes Bronzés. Mais, fils unique, Michel Blanc n'apprécie guère le collectif. "J’ai eu beaucoup de mal à avoir une mentalité de groupe. Il fallait que je me force. J’avais tendance à vouloir prendre le pouvoir, pas par méchanceté", explique-t-il. S'il joue dans le deuxième volet des Bronzés, il ne participe pas à l'écriture. Il y revient pour le numéro 3. "Ce n’est pas ce que j’ai fait de mieux", glisse-t-il.

Entendu sur europe1 :
Je n’ai pas fait ce métier uniquement pour faire rire. Jouer la comédie, c’est jouer des personnages forts si on vous les propose

Jean-Claude Dusse. Après avoir traversé quelques rues dans Paris, c'est autour d'un verre de Brouilly que l'acteur revient sur la sortie du film Les Bronzés font du ski. Le plus illustre de la série n'avait pas si bien marché, rappelle-t-il, même s'il pense savoir pourquoi il est resté culte pour des générations : "La neige n’a pas changé." Les spectateurs "se retrouvent dans ces gens coincés dans un télésiège, coincés dans la poudreuse, se reconnaissent dans ses gens qui disent comme Josy 'ça va vite, ça va vite, ça va trop vite'." Il admet aussi que le personnage de Jean-Claude Dusse a parfois été pesant. Les gens l'appelaient par le nom de son personnage. "Il y a eu un moment où c’était un peu difficile. C’est fini. Maintenait quand ils me le disent, c’est plutôt sympa avec un clin d’œil. Et puis, je lui dois tout", concède l'acteur.

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"Des personnages pas faits pour faire rire". Michel Blanc ne voulait pas non plus se résumer à Jean-Claude Dusse, ce loser franchouillard. Il ne pouvait pas ignorer sa dimension plus tragique, plus profonde. "Je n’ai pas fait ce métier uniquement pour faire rire. Jouer la comédie, c’est jouer des personnages forts si on vous les propose. Et si ces personnages comme dans L’exercice de l’État ne sont pas du tout faits pour faire rire, c’est aussi passionnant." Il aime d'ailleurs aussi bien être derrière la caméra, en prenant son temps. Il réalise Marche à l'ombre en 1984, dix ans avant Grosse fatigue. Le laps de temps entre deux films s'avère long. "Sauf quand je me casse la gueule", précise-t-il. "Quand on tombe de cheval, il faut remonter très vite, c’est ce qui s’est passé après Mauvaise passe. Deux ans après, j’ai fait Embrassez qui vous voudrez."

"La tendresse de Michel". Le succès une nouvelle fois au rendez-vous, il a donc attendu seize ans pour écrire et réaliser Voyez comme on danse, une suite qui n'en est pas vraiment une. "Si je l’avais fait juste après, je n’aurais pas pu faire ce que j’ai fait là, c’est-à-dire utiliser les personnages sans faire une suite réelle. Là, les personnages vivent autre chose avec d’autres personnages. Ça m’a donné plus de liberté", explique le cinéaste. De nouveaux acteurs ont d'ailleurs pris part au casting aux côtés des fidèles Karin Viard, Carole Bouquet, Charlotte Rampling ou Jacques Dutronc.

Le résultat semble un peu moins cruel que le précédent. Karin Viard, qu'il rejoint dans une loge de Canal +, abonde : le réalisateur a un peu changé. "L'homme est toujours angoissé et se moque de lui même. Mais, il y a quelque chose de la tendresse de Michel qui affleure plus aujourd'hui, quelque chose de plus confiant, abandonné", confie l'actrice.