Les salles ne cinéma ne sont pas condamnées, selon plusieurs acteurs du secteur 5:35
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Alexis Patri
Thierry Chèze (directeur de la rédaction de Première) et Thierry Lounas (directeur de la rédaction de So Film) sont les invités de Pascale Clark jeudi dans "Culture Médias". Pour les deux journalistes cinéphiles, il faut nuancer l'opposition entre les salles de cinéma (fermées) et les toutes puissantes plateformes de streaming, car la situation française se distingue de celle des Etats-Unis.

Les salles de cinéma vont-elles mourir ? Non, selon Thierry Frémaux, directeur du festival de Cannes, invité d'Europe 1. Et le modèle français, grâce à son exception culturelle, pourrait en cela se distinguer de ses voisins européens et des Etats-Unis dans cette double crise du Covid-19 et de la concurrence du streaming. C'est ce qu'expliquent les journalistes Thierry Chèze, directeur de la rédaction de Première, et Thierry Lounas, directeur de la rédaction de So Film, invités jeudi de Culture Médias.

"On a toujours dit que les salles allaient mourir : quand la télé est arrivée, quand la vidéo est arrivée, quand le piratage est arrivé... Les salles ont toujours survécu", rappelle Thierry Chèze. Le journaliste est donc confiant quant à la concurrence du streaming. "Les salles avaient battu un record en 2019, il n'y a aucune raison que ce rythme-là ne reprenne pas dès qu'elles rouvriront", estime-t-il.

La France fait mieux que les Etats-Unis

Car dans cette double crise, le cinéma et les salles françaises s'en sortent bien. Surtout si on les compare au géant du secteur. "On voit d'abord tout un pan du cinéma indépendant américain, et même les plus grands auteurs, dire que leur film ne peut pas être financé s'il n'y avait pas Netflix ou Amazon", explique le journaliste de Première. "C'est le cas de Scorsese, c'est le cas de David Fincher."

Aux Etats-Unis, le cinéma indépendant souffre, les sorties des superproductions sont reportées et les salles de cinéma mettent la clé sous la porte. "En France, on a la chance d'avoir le Centre national du cinéma (CNC) qui continue de soutenir ces salles. On a la chance d'avoir des municipalités qui soutiennent aussi", se félicite Thierry Chèze. "Pour l'instant, il n'y a pas de faillites ou de disparitions."

"Une nouvelle alliance entre les salles de cinéma et les plateformes"

Les Français se sont pourtant jetés sur les plateformes de streaming pour compenser la fermeture temporaire des salles de cinéma, à cause de la crise sanitaire. Mais, pour Thierry Lunas, salles et plateformes sont complémentaires plus qu'ennemies. "La cinéphilie est née en salles, mais elle n'appartient pas qu'aux salles non plus", théorise-t-il. "Les séries font aussi partie de la cinéphilie, tout comme les films qu'on voit sur plateformes. Le streaming, c'est l'équivalent du DVD ou de la cassette VHS d'hier."

Pour le journaliste de So Film, la crise doit permettre de changer cette situation de concurrence et de défiance. "C'est peut-être le moment d'une nouvelle alliance entre les salles de cinéma et les plateformes", espère-t-il. De fait, Netflix, Amazon, Disney+ et consorts devraient bientôt participer, via le CNC, au financement des films français, qu'ils sortent en salles ou ailleurs.

Les Français, des cinéphiles de salles

La disparition du cinéma français n'est donc pas à l'ordre du jour. Celle des salles non plus. "Lors du déconfinement, on a vu que les gens sont revenus en salles", observe avec plaisir Thierry Chèze. "C'était presque étonnant de voir cet appétit des Français pour les salles", abonde Thierry Lunas. "Quand il y a eu une offre comme Adieu les cons, ou 30 jours max dans un autre domaine, les gens sont prêts à revenir", précise son confrère. "Donc je pense qu'il y a toujours le cinéma."