ukraine, pologne 2:03
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Marion Gauthier (à Medyka), édité par Laura Laplaud , modifié à
L’ONU s’alarme d’une crise humanitaire sans précédent et parle de sept millions de déplacés potentiels, si le conflit ukrainien persiste. Pour le moment, les Nations unies recensent 368.000 réfugiés ukrainiens depuis le lancement de l’offensive russe jeudi, dont plus de la moitié sont entrés en Pologne. Europe 1 s'est rendue au poste-frontière polonais de Medyka.
REPORTAGE

Vladimir Poutine a-t-il vraiment le doigt sur le bouton nucléaire ? Le président russe a annoncé mettre en alerte sa force de dissuasion, une conduite "irresponsable" pour l'Otan, "inacceptable" pour Washington. En Ukraine, le chef de la diplomatie reste ferme, son pays ne capitulera pas. Tous les homme âgés de 18 à 60 ans sont appelés à prendre les armes. Les femmes, elles, sont nombreuses à quitter le pays pour mettre leur famille à l'abri. Pour le moment, les Nations unies recensent 368.000 réfugiés ukrainiens depuis le lancement de l’offensive russe jeudi, dont plus de la moitié sont entrés en Pologne. À Medyka, au sud de la frontière polono-ukrainienne, beaucoup de réfugiés arrivent à pied.

Les femmes et les enfants fuient

C’est l’un des points de passages principaux pour arriver en Pologne. Si les embouteillages sont nombreux, beaucoup de réfugiés arrivent aussi à pied. Un flux continu de silhouettes emmitouflées, des femmes et des enfants en majorité. Ils racontent le bruit des sirènes et des bombes chez eux, remplacé ici par le roulement des valises sur le pavé.

lra semblait égarée. Elle est enceinte de 9 mois et tient par la main sa fille de 7 ans. "Il y a eu les avions, puis ils ont pris nos hommes pour aller à la guerre. Nous, nous avons pris 10 minutes pour prendre des affaires et partir", raconte-t-elle. "Ce que j’ai sur moi, c’est tout ce qui me reste. Il n’y a pas de quoi être soulagé : je vais accoucher bientôt, tout ce que je veux c’est être avec mon mari, chez moi."

26, 32 kilomètres, la plupart ont marché des heures, ont porté des sacs trop gros pour ce périple, et trop petits pour contenir la vie qu’ils ont laissé derrière eux. Mais c’est l’attente, juste avant l’arrivée en Pologne qui a marqué cette autre mère de famille : "On est restés debout 8 heures à faire la queue… Nous étions peut-être 500. J’ai cru que la foule allait briser les jambes de mes enfants. J’ai pensé que nous n’arriverions jamais à en sortir", souffle-t-elle.

32 kilomètres parcourus à pied

Des soupes, des vêtements et des soins leur sont proposés mais le voyage se poursuit. Des navettes sont prévues pour les emmener dans la ville la plus proche, Przemysl, où ils retrouvent ami ou famille ou bien sont répartis sur le territoire.

Oksana retrouve sa mère, ses enfants, ses neveux dans une foule de regards hagards et d’épaules lasses, près de monticules de vêtements et de la fumée des soupes préparées par des bénévoles. "Moi, je vais bien maintenant mais les enfants ont parcouru 32 kilomètres à pied jusqu'à la frontière, ils ont l'air épuisé, ils ont mal aux pieds", témoigne-t-elle. 

Elle garde les mains dans les poches et les yeux baissés. "Il y a tant de monde, ce n’est pas possible", répète sa mère, Anna. Elle secoue sa tète entourée d’un fichu, des larmes coulent dans ses rides creusées. Elle tient contre son cœur un petit trieur abimé, dans sa main, un sachet plastique prêt à craquer. 

"Il fallait fuir tout de suite parce qu’il y a un site militaire près de chez nous. C’est mon seul trésor, les documents de la maison, quelques papiers, c’est tout… tout ce qui me reste", raconte-t-elle en pleurant. "J'ai 64 ans, il ne me reste que ça comme patrimoine." Cette famille a pu se retrouver, même si elle est loin de sa terre. Leur frère, lui, est resté en Ukraine.