Sorj Chalandon a écrit le livre "Profession du père" qui vient d'être adapté au cinéma. 13:26
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Mathieu Charrier, édité par Jonathan Grelier , modifié à
Dans l'émission cinéma d'Europe 1, "CLAP !", un invité se prête chaque semaine à un questionnaire cinéma sur les films de sa vie. Samedi, le journaliste et écrivain Sorj Chalandon a répondu aux questions de Mathieu Charrier sur ses longs métrages de prédilection, de celui qui l'a fait le plus rire à celui qui lui a procuré la séance de cinéma la plus folle.
INTERVIEW

Tous les samedis pendant une heure dans CLAP !, le spécialiste cinéma d'Europe 1, Mathieu Charrier, fait le tour de l'actualité du septième art. Chaque semaine, un invité, qu'il soit ou non du monde du cinéma, se soumet à un questionnaire personnel sur les films de sa vie. Samedi, c'est Sorj Chalandon, le journaliste et écrivain dont le roman Profession du père a été adapté au cinéma - dans un film du même nom sorti mercredi dernier en partenariat avec Europe 1 - qui a joué le jeu.

Votre premier souvenir de cinéma ?

"Z de Costa-Gavras. Je crois que je l'ai vu une trentaine de fois. J'ai compris tout à coup que le cinéma était quelque chose qui faisait serrer les poings. J'y suis allé, j'y suis retourné... À l'époque, il y avait encore des séances permanentes où les films tournaient et où on restait assis. Je connaissais tous les dialogues de ce film, on les répétait entre copains. C'est un des films qui m'a mis en colère pour la première fois. Je me suis dit : 'Waouh ! Le cinéma, ce n'est pas juste pour rire.' Je crois que je n'ai jamais autant pleuré de colère devant un film.

Votre pire souvenir en salle ?

Mon Dieu. Je l'ai en tête parce que j'ai quitté la salle. C'était à une séance pour "Le locataire", ce film magnifique de Polanski. C'est l'histoire d'une personne qui habite dans un appartement qui appartenait à une femme qui s'est suicidée. J'étais dans la salle et il y avaient du monde. Les gens mangeaient du pop-corn et ça c'est déjà extrêmement difficile avec Polanski à l'écran. A un moment, dans le film, Polanski s'habille en femme. Il se met dans la peau de la résidente qui était là avant.

A côté de moi, j'entends un mec dire en rigolant 'pédé !'. Je suis parti. C'est un souvenir pour moi qui est d'une telle brutalité... Après, je me suis dit qu'il faudrait avoir un permis de cinéma comme un permis de conduite. Il faudrait quelques questions avant le film pour pouvoir rentrer. Ce serait dégueulasse, évidemment, mais je n'ai jamais revu le film parce que c'est associé dans mon esprit à quelque chose d'une violence absolue.

Je sens qu'il va se passer quelque chose d'extrêmement fort et tout à coup il y la voix d'un petit salopard à ma droite qui dit 'pédé', comme ça, en mangeant des trucs. Je suis parti, je suis sorti, il pleuvait... Je suis allé respirer et j'ai peut-être pleuré même.

Votre séance de cinéma la plus dingue ?

La plus dingue, c'était pour 'Le vent se lève' de Ken Loach. Tout simplement parce que c'est l'Irlande, parce que je connais ou que je crois connaître et parce que quand je suis projeté en 1920 avec ce cinéaste-là, avec ces images-là, ce ton-là et cette violence... Brusquement, je suis sorti, j'étais mouillé par la pluie, j'avais une large casquette comme dans (la série) Peaky Blinders sur la tête. En clair, c'était dingue parce que j'ai été immergé totalement dans la guerre civile irlandaise pendant les deux heures du film. C'est assez rare. Généralement, pendant les films, il y a des gens qui regardent leur montre ou qui baillent. Moi, cette fois-ci, j'ai été sidéré du début à la fin.

Le film dans lequel vous aimeriez vivre ?

C'est Barry Lyndon. Je veux être dans cette lumière, dans cette musique, avec ces gens... Sans forcément qu'ils me remarquent. Mais j'aimerais être dans ce lieu-là, à ce moment-là, avec ces bougies-là et avec cette violence-là aussi.

Le film qui vous a fait le plus rire ?

J'étais petit mais je crois que c'était La Grande Vadrouille. La Grande Vadrouille m'a fait rire parce que, pour la première fois, on riait des nazis. C'était tout nouveau. Avant, on n'avait pas le droit de rire des nazis. Mais brusquement, là, je ris avec Louis de Funès et Bourvil de ces gens qui nous ont fait du mal. Et ça m'a fait du bien.

La bande originale qui a le plus marqué votre vie ?

Celle d'Il était une fois la révolution. Encore une fois pour l'Irlande. Et, avec Z, c'est le film que j'ai le plus vu et dans toutes les langues."