Municipales : 41,6% de participation au second tour, 20 points de moins qu'en 2014

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Europe 1 avec AFP , modifié à
Le second tour des élections municipales s'est déroulé, dimanche, dans un contexte marqué par la pandémie de coronavirus. Le taux de participation, historiquement bas, s'est élevé à 41,6%, selon le ministère de l'Intérieur. La majorité présidentielle essuie un large revers, alors que les écologistes sortent grands gagnants. 

Une abstention record et une vague verte inédite : le second des élections municipales s'est révélé hors norme, dimanche. Trois mois après un premier tour déjà bouleversé par la crise du coronavirus, ce second round a encore été marqué par un taux de participation en berne, 41,6% selon le ministère de l'Intérieur, contre 62,1% en 2014.

Au Havre, le Premier ministre Edouard Philippe l'a largement emporté, avec près de 59% des suffrages. Dans la capitale, Anne Hidalgo, alliée à EELV, sort victorieuse de la triangulaire avec près de 50% des voix, loin devant la candidate LR Rachida Dati (autour de 32%), et la candidate LREM Agnès Buzyn (entre 13,7 et 16%).

Le "front républicain" n'a pas fonctionné à Perpignan, où le candidat du RN Louis Aliot l'a emporté avec 53,1 à 54% des voix

Les trois informations à retenir : 

  • Les écologistes remportent des victoires dans plusieurs grandes villes : Marseille, Lyon (ville et métropole), Bordeaux, Strasbourg, Besançon, Nancy ou encore Tours
  • Le Premier ministre Edouard Philippe a été élu au Havre, avec près de 59% des voix. Pendant la campagne, il avait indiqué que tant qu'il serait à Matignon, il ne dirigerait pas la ville
  • La participation a été historiquement basse, 41,6% selon le ministère de l'Intérieur (62,1% en 2014), après 44,3% au premier tour, le 15 mars

Marseille, Lyon, Bordeaux, une "vague verte" déferle sur la France

Ils sont les grands gagnants de la soirée. Après les européennes de 2019, les écologistes enregistrent un nouveau succès électoral, avec des victoires dans plusieurs grandes villes de France. À Marseille, la candidate Michèle Rubirola (Printemps marseillais) a fait basculer à gauche la ville tenue par Jean-Claude Gaudin depuis 1995. A Bordeaux, Pierre Hurmic a ravi la ville à la droite en battant Nicolas Florian. À Lyon, Grégory Doucet a nettement battu le candidat LR et poulain de Gérard Collomb, Yann Cucherat. Les écologistes s'imposent également à Strasbourg : Jeanne Barseghian devance largement son adversaire LREM, Alain Fontanel.

Invité lundi d'Europe 1, l'eurodéputé EELV Yannick Jadot a commenté cette série de victoires historiques, et estimé qu'elles étaient en partie dues à la capacité de l'écologie à fédérer autour d'elle les différents camps de la gauche. "Evidemment, c’est autour de l’écologie que les victoires se sont construites dans des rassemblements avec d’autres forces politiques et notamment des forces politiques de gauche", a-t-il reconnu. "La gauche est en train de venir sur l’écologie et j’en suis extrêmement content, je me réjouis de voir de nombreuses figures de gauche, leurs électrices et électeurs, se dire que le triptyque écologie, solidarité sociale et démocratie doit être le cœur d’un nouveau projet", poursuit-il.

Son interview à écouter ici :

Marseille : malgré l'incertitude, les écolos heureux de tourner la page Gaudin

À Marseille, la situation reste incertaine, comme Europe 1 vous l'explique ici. Si Michèle Rubirola, à la tête d'une coalition de gauche, a revendiqué une "victoire relative", la candidate LR Martine Vassal a insisté qu'il n'y avait à ce stade "pas de majorité à Marseille", donnant rendez-vous à l'élection du maire par le conseil municipal vendredi prochain. Et les tractations s'annoncent compliquées, le Printemps marseillais devant notamment composer avec Samia Ghali. Problème : la gauche a maintenu jusqu'au bout un candidat contre elle, la présentant comme une héritière du système en place à Marseille. Mais Samia Ghali pourrait-elle pour autant choisir d'arbitrer en faveur de la droite ? Interrogé par Europe 1, Julien, militant du Printemps, refuse de croire à une telle éventualité. "Si jamais elle trahit la gauche, elle trahit les électeurs", martèle-t-il, "tout l'enjeu qu'elle a, c'est de s'allier avec la gauche". Et de conclure : "Le peuple marseillais s'est enfin réveillé, réveille toi avec nous".

À Bordeaux, la droite sous le choc

Un autre règne, encore plus long, a également pris fin à Bordeaux, où la droite remportait les élections depuis 73 ans. Comme un symbole, c'est face au protégé d'Alain Juppé, le maire LR sortant Nicolas Florian, que l'écologiste Pierre Hurmic s'est imposé. Une claque, donc, pour la droite, que notre reporter a pu constater sur place. À son micro, Alain Juppé fait part de sa "tristesse", tandis que Nicolas Florian concède "une épreuve". Et du côté des habitants, on est partagé au moment de commenter l'arrivée des écologistes. Un électeur de droite regrette l'accord passé entre son candidat Nicolas Florian avec LREM entre les deux tours : "Stratégiquement, il s'est complètement trompé." Mais une autre bordelaise se montre beaucoup plus enthousiaste, se disant "très contente de ce changement pour la ville". 

Méfiance chez certains Lyonnais, après le coup double des Verts

Du côté de Lyon, les écologiste ont même fait coup double, avec Grégory Doucet qui remporte la ville, tandis que Bruno Bernard s'adjuge la métropole, siège du véritable pouvoir. Selon un calcul effectué à partir des résultats fournis par la préfecture du Rhône, les Verts devraient détenir plus de 50 sièges sur 73 à la mairie. Bruno Bernard affirme de son côté avoir consolidé 84 sièges sur 150 à la métropole qui réunit 59 communes. 

Mais dans cette ville dirigée par Gérard Collomb depuis près de 20 ans, les nouveaux élus seront attendus au tournant, de nombreux habitants se montrant méfiants concernant leur profil. "Il faut qu'ils fassent leurs preuves. Je ne sais pas si ça sera des bons gestionnaires", s'inquiète une électrice interrogée par Europe 1, quand un autre estime qu'à Grenoble, l'arrivée des écologistes "a tué le centre-ville". Retrouvez notre reportage. 

Philippe, vainqueur au Havre, et le mieux placé pour "réinventer la France", d'après un sondage

Alors que son avenir à Matignon reste en suspens, Edouard Philippe a remporté une nette victoire au Havre, avec 58,93% des voix, de quoi se placer idéalement pour la suite, qu'il reste ou non à la tête du gouvernement. "Au Havre, les résultats sont nets", a déclaré devant ses partisans à l'hôtel de ville l'ex-LR qui a été maire de cette cité portuaire de 170.000 habitants de 2010 à 2017. Autre bonne nouvelle pour le Premier ministre, il arrive également en tête d'un sondage de l'Ifop pour Europe 1 et La Tribune, lundi, sur les personnalités qui inspirent confiance pour "réinventer la France". Reste qu'au niveau local, les Havrais ont d'autres ambitions pour lui, et souhaitent le voir revenir durablement dans la ville

"Déception" pour La République en marche

Aucune conquête et de nombreux revers : la République en marche a en revanche essuyé dimanche une sévère défaite. Largement battu à Paris et Lille, inexistant dans certaines grandes villes comme Marseille et Bordeaux, le parti présidentiel ne réussit pas vraiment son opération ancrage local, quatre ans après sa naissance et trois ans après son accession au pouvoir. La porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, a fait part de la "déception" de la majorité, qui a enregistré des scores parfois "extrêmement décevants" en raison de ses "divisions" lors de ces municipales.

A Paris, Agnès Buzyn, arrivée seulement en troisième position, n'a pas réussi à obtenir suffisamment de voix pour devenir conseillère de Paris. Et si Edouard Philippe a été réélu au Havre, le Premier ministre a toujours refusé de prendre sa carte à LREM...

Le PS conserve plusieurs bastions, LR confirme son implantation

Si les Verts ont dominé la soirée, le PS a néanmoins réussi à conserver Paris, Lille, où Martine Aubry s'est imposée d'un cheveu face au candidat écologiste Stéphane Baly, Rennes, Nantes, Le Mans, Clermont-Ferrand, Dijon et a ravi Nancy et Montpellier. Les Républicains ont quant à eux confirmé leur implantation en remportant dès le premier tour bon nombre des villes de plus de 9.000 habitants qu'ils contrôlaient. Dimanche, ils ont vu Jean-Luc Moudenc reconduit de peu à la tête de Toulouse, comme Christian Estrosi à Nice.

Le RN remporte Perpignan

Principal adversaire d'Emmanuel Macron au plan national, le Rassemblement national a remporté Perpignan. Avec ce succès, Louis Aliot redonne au parti de Marine Le Pen le contrôle de sa première ville de plus de 100.000 habitants depuis 1995 et Toulon. "C'est un système qui s'écroule. Nous avons eu à Perpignan le même personnel politique aux manettes depuis 1959. Ca devenait malsain", a déclaré à l'AFP Louis Aliot, depuis son local de campagne, au milieu de ses plus proches collaborateurs.

Une abstention historique sur fond de coronavirus

Parmi les 16,5 millions d'électeurs appelés à voter dans 4.820 communes pour le second tour des municipales, nombreux sont ceux à avoir boudé le scrutin. Le taux de participation s'établit à 41,6%, selon le ministère de l'Intérieur, contre 62,1% en 2014. Cette abstention historique s'inscrit dans le contexte de crise sanitaire liée à l'épidémie de coronavirus, qui a freiné les électeurs, malgré des mesures sanitaires renforcées.

Emmanuel Macron a "marqué sa préoccupation pour le faible taux de participation aux élections municipales", qui n'est "pas une très bonne nouvelle", a indiqué l'Elysée dimanche soir. Pour Jean-Luc Mélenchon, ce taux d'abstention record est le symbole d'une "grève civique" et d'une "insurrection froide contre toutes les institutions du pays".  Adrien Quatennens, invité de l'édition spéciale d'Europe 1, a lui aussi estimé que cette soirée marque surtout le désintérêt du peuple pour ce scrutin. "Ce qui nous inquiète, c'est l'abstention considérable (60%), signe de l’agonie d’une Cinquième République finissante."