L'économiste Olivier Blanchard juge au micro d'Europe 1 "qu'il n'est pas catastrophique" d'augmenter la dette. (photo d'illustration) 1:26
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Ariel Guez
Invité de "C'est arrivé cette semaine" sur Europe 1, l'ancien chef économiste et directeur des études au FMI  est revenu sur la crise économique qui pourrait suivre la crise sanitaire du Covid-19. Olivier Blanchard juge qu'aujourd'hui, "la dette n’est pas le problème" et considère que l'État doit continuer à aider les gens en difficulté.
INTERVIEW

La crise sanitaire du coronavirus débouchera-t-elle sur une crise économique ? Dans le monde, les bourses se sont effondrées, aux États-Unis, le chômage a explosé et en France, le gouvernement a annoncé des plans d'aides à plus de 100 milliards d'euros. L'Insee a prévenu : chaque mois de confinement coûte environ 3% du PIB annuel à l'hexagone. Une situation inédite qui a de quoi inquiéter les économistes. Mais pour Olivier Blanchard, ancien chef économiste et directeur des études au Fonds monétaire international, invité de C'est arrivé cette semaine sur Europe 1, "la dette n’est pas le problème du moment".

"Ce n'est pas catastrophique" d'augmenter la dette

"La priorité, c’est de faire en sorte que les gens ne meurent pas de faim et que les entreprises ne fassent pas faillite. Si on augmente la dette, ce n’est pas catastrophique. On s'en occupera plus tard", avance l'ancien chef économiste et directeur des études au Fonds monétaire international. "Il faut absolument aider les gens et les entreprises qui sont en difficulté. On peut le faire encore un certain temps, ça va coûter de l’argent, mais on est prêts à le faire et c’est absolument nécessaire." 

Olivier Blanchard justifie la faisabilité de son propos par l'état économique de la France avant la crise. "Les taux d'intérêts étaient extrêmement bas (proches de zéro) pour les pays comme la France lorsqu’ils empruntaient et ce sera probablement le cas pendant très longtemps", explique-t-il. "Tous les facteurs de la crise font qu'il est probable que les taux d'intérêts restent bas, donc la charge de la dette va rester très faible."

"Ça va être long, ça va être dur, mais on peut le faire".

Même s'il reconnait qu'on "ne peut pas être absolument sûrs", l'économiste affirme qu'on "peut s’offrir une dette plus élevée". "Il faudra un jour la diminuer, mais il n’y a pas urgence. Donc on peut monter à des niveaux de dette plus élevés", poursuit au micro d'Europe 1 Olivier Blanchard, citant le Japon qui a usé de ce levier. "Ça va être long, ça va être dur, mais on peut le faire."

"Je crois que l’effondrement est juste derrière nous"

Mais si l'État continue de prendre part à l'activité économique alors que les entreprises ne peuvent plus fonctionner, ne risquons-nous pas un "effondrement", comme le craignait Édouard Philippe dans son discours à l'Assemblée nationale ? "C’est un très mauvais moment à passer, c’est certain, mais je crois que l’effondrement est juste derrière nous", répond Olivier Blanchard. "On a vu le fond du trou et maintenant, il va falloir remonter doucement. Bien sûr, il y aura des effets à long terme et certains vont souffrir le long du chemin. Mais je crois que le pire est juste derrière nous", affirme l'ancien chef économiste et directeur des études au FMI. 

"Un retour à la normale d'ici six à dix-huit mois"

Et si l'ensemble de l'économie est frappée par la crise, Olivier Blanchard prédit un processus long et douloureux de "réallocation" entre les secteurs, expliquant que certains vont énormément souffrir (restauration, hôtellerie, tourisme) tandis que d'autres "vont aussi gagner durant cette crise", comme le secteur technologique. "Mais dans l’économie dans son ensemble, je pense qu’on peut retourner à un niveau à peu près normal d'ici six à dix-huit mois", conclut Olivier Blanchard.