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Jihane Bergaoui, édité par Ariel Guez , modifié à
Au micro d'Europe 1, jeudi, un des soldats à bord du porte-avions Charles de Gaulle revient anonymement sur la propagation du Covid-19 à bord du bâtiment, alors que près des deux tiers des membres de l'équipage ont été testés positifs. Il raconte l'impossibilité pour les militaires de respecter les mesures barrières et le manque de réaction de sa hiérarchie. 
TÉMOIGNAGE

Quelle est l'origine de la contamination au Covid-19 à bord du porte-avion Charles de Gaulle ? Sur les 1.760 marins du bâtiment nucléaire français, 1.046 d'entre eux ont été testés positifs au virus, soit près des deux tiers de l'équipage. Selon le chef d'État-major des armées, les soldats ont probablement été contaminés lors de l'escale à Brest (du 13 au 16 mars). Mais une autre enquête est menée à Toulon sur la gestion de la crise. Car, si des marins ont été contaminés du 13 au 16 mars en allant sur le continent, pourquoi le Charles de Gaulle n'a fait escale à Toulon qu'un mois plus tard ?  "À nous faire rester aussi longtemps sur le bateau, nous avons été mis en danger", affirme à Europe 1 un des 1.046 contaminés du bâtiment. 

Impossibilité de respecter les mesures barrières à bord

"Il n'y avait peut-être que trois ou quatre cas au début, mais on n'est pas cons : on sait très bien qu'à bord d'un bateau, ça ne peut pas s'arrêter comme ça. Même si c'est le plus gros bateau militaire d'Europe, l'espace est restreint dedans. On est forcément obligés de côtoyer les gens, de les croiser", explique-t-il au micro d'Europe 1. "On ne peut pas tout le temps être à un mètre. Même en javellisant, si quelqu'un touche derrière, c'est recontaminé : c'est trop compliqué", continue le soldat, qui reste anonyme. 

"Ils ont pris peut-être ça à la légère au début"

Lui-même a développé les symptômes principaux du coronavirus : courbatures, grosse fatigue, toux et maux de tête. "Le troisième jour, j'ai perdu l'odorat et le goût", raconte-t-il. Le soldat a alors vu un médecin, mais ce dernier ne l'a pas mis en arrêt maladie. "Il m'a dit 'vous mettrez des gants par précaution'. J'ai reçu du Doliprane à prendre et j'ai continué à travailler", poursuit le marin. 

"En temps de paix, c'est la santé du personnel qui est prioritaire. En sachant qu'on n’est pas en temps de guerre, on ne comprend pas ce qu'on foutait encore là-bas", déplore-t-il au micro d'Europe 1, affirmant être "déçu" par l'État-major. "Déçu de la négligence et déçu de voir comment ils peuvent gérer la santé du personnel. Ils ont pris peut-être ça un peu à la légère au début, même si maintenant ils essayent de faire les choses bien", affirme le militaire. "Ils essayent de se rattraper".

"Le déclic a été fait trop tard"

"Mais oui, on est énervés par rapport à la gestion qui a été faite (...). Pas forcément contre notre commandant, mais plus contre l'État-major et le ministère qui aurait dû prendre une décision bien plus tôt. Le déclic a été fait trop tard", conclut-il.