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Pierre Herbulot, Charles Guyard, Lionel Gougelot, et Ugo Pascolo , modifié à
Entre la fermeture des restaurants et l'incertitude sur la possibilité de réveillonner en famille pour les fêtes de fin d'année, plusieurs filières agricoles se retrouvent en grande difficulté. Que ce soit le secteur de la volaille, du Maroilles, des huitres ou du poisson, tous comptaient sur Noël pour sauver en partie une année 2020 compliquée.  

Volaille, foie gras, huître, homard, crabe... Tous ces produits sentent bon Noël. Mais entre la fermeture des restaurants et l'incertitude qui pèse sur le réveillon et la Saint-Sylvestre, les Français n'ont pas la tête à ces saveurs de fin d'année. Et cela se répercute sur plusieurs filières agricoles, touchées de plein fouet par les conséquences de la crise sanitaire du coronavirus que traverse l'Hexagone. "Il y a quand même une grosse inquiétude actuellement", confirme au micro d'Europe 1 Jean Michel Scheffer, président de l'interprofession de la volaille.

Volailles et foie gras en difficulté

Que ce soit les dindes ou les chapons, difficile, voire impossible, de vendre ces produits estampillés Noël si les rassemblements familiaux sont interdits ou limités. Les annonces d'Emmanuel Macron mardi soir à 20 heures vont donc être décisives. "En fonction des possibilités que l'on aura de se regrouper en famille, ou non, il y a des craintes de pouvoir vendre nos volailles. On est donc en train de travailler avec les distributeurs pour voir de quelle manière on peut faire pour proposer nos volailles."

Et la situation est encore plus délicate pour le foie gras. Dans ce secteur, les mois de novembre et de décembre représentent 75% du chiffre d'affaires annuel, dont plus de la moitié dans les restaurants et à l'exportation. Deux marchés que le Covid-19 a pour l'instant anéantis. Sans compter que l'ombre d'un autre virus plane : la grippe aviaire. Trois jours après la découverte de cas en Haute-Corse, un deuxième foyer a d'ailleurs été identifié vendredi dans les Yvelines, en région parisienne. Les oiseaux ont été euthanasiés préventivement. 

Le Maroilles se rapproche de la date limite de consommation

À quelque 250 kilomètres de là, dans le département du Nord, le produit festif est certes différent, mais l'inquiétude est similaire pour les producteurs de Maroilles de l’Avesnois et en Thiérache. Ici on sait déjà que ce fromage ne sera pas sur les tables pour les fêtes. Un vrai coup dur pour cette filière qui produit tous les ans 4.200 tonnes de fromage AOP et dont le mois de décembre représente jusqu'à 30% de chiffre d'affaires pour certains producteurs. 

Un manque à gagner important que les ventes en grande surface auront certainement du mal à combler. Surtout que si les réveillons en famille se font, ce sera en petit comité. Un facteur de plus qui ne favorisera pas une forte consommation. D'autant que le Maroilles est périssable : si les restaurants ne rouvrent pas rapidement, une bonne partie de la production de l'année pourrait donc être perdue. 

Les pêcheurs face à leur rentabilité...

La question de la rentabilité se pose également sur le littoral, où les pêcheurs qui comptaient sur la saison de la coquille et de certains crustacés enregistrent des pertes d'exploitation jusqu'à 40%. Mais la fermeture des restaurants manque aussi de faire chavirer les entreprises spécialisées dans la transformation du poisson et les mareyeurs. Notamment dans la zone industrielle de Capécure, à Boulogne-sur-Mer, où les débouchés se font rares. 

Par ailleurs, le contexte entraîne une baisse des produits haut de gamme comme le Bar de ligne ou le Saint-Pierre, réduisant mécaniquement la rentabilité des sorties en mer. 

... et les ostréiculteurs sous la pression d'une partie de la grande distribution

Et les poissons ne sont pas les seuls à s'accumuler dans les bassins plutôt que dans les assiettes. Les huitres aussi sont concernées par une guerre des prix. Si la grande distribution, débouché vital pour cette filière en période de crise, s'affiche publiquement comme l'un des meilleurs alliés des ostréiculteurs, la réalité est plus nuancée. Certaines enseignes n'hésitent pas à faire pression sur les producteurs en sachant pertinemment qu'ils n'ont d'autres choix que de céder. 

"Comme il y a des blocages, les stocks sont pleins", explique au micro d'Europe 1 Sébastien Lemoine, président du syndicat des ostréiculteurs de Carnac. "La peur du lendemain crée une panique, à l'image d'un krach boursier." Alors pour avoir du poids dans les négociations, les ostréiculteurs de Carnac étudient la possibilité de fonder une coopérative qui leur permettrait de négocier les prix d'une seule voix.