Plusieurs campagnes de dépistage massif vont avoir lieu en France la semaine prochaine. 3:28
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Séverine Mermilliod
Lundi auront lieu les premières campagnes de dépistage massif de France au Havre et à Charleville-Mézières. Sur Europe 1, Anne-Claude Crémieux, professeure en maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Louis à Paris, a estimé que ces campagnes pouvaient être un succès mais sous certaines conditions : isolement et répétition.
DÉCRYPTAGE

En Slovaquie, 3 millions et demi de personnes ont été testées en un week-end et finalement, après une pause des contaminations de coronavirus, leur nombre est reparti à la hausse. Alors que le Havre, en Normandie, et Charleville-Mézières, dans les Ardennes, s'apprêtent à organiser leur premier dépistage massif lundi, quel est donc l'intérêt d'un tel dispositif ? Invitée d'Europe 1 dimanche, Anne-Claude Crémieux, professeure en maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Louis à Paris et membre de l’Académie de médecine, a donné quelques pistes. Pour elle, ces dépistages de masse sont utiles sous certaines conditions. Il faut qu'ils soient "répétés" et réussir à isoler les personnes malades.

"Il faut rester extrêmement ouvert par rapport à ces expérimentations. L'objectif, c'est de dépister les personnes asymptomatiques. On l'a vu en France, quand l'épidémie progresse, remonter les chaînes de contamination pour rechercher des personnes asymptomatiques ne suffit plus. La preuve, c'est qu'aujourd'hui, 80% des personnes qui sont positives en France ne peuvent pas être rattachées à un cas index. Donc il faut les chercher autrement", a rappelé la professeure.

Faire respecter l'isolement

Selon elle, l'expérimentation de la Slovaquie, malgré la reprise par la suite des contaminations, est "très intéressante". "Ils ont réussi à dépister pratiquement 90% de la population qu'ils cherchaient à dépister, c'est à dire une population jusqu'à 65 ans. Et ils ont obtenu une diminution de l'incidence assez importante dans un premier temps, de 80%."

La membre de l'académie de médecine note que cette réussite temporaire peut s'explique par le fait que, contrairement à ce qui avait été fait en Angleterre à Liverpool début novembre, la Slovaquie a réussi "à isoler les personnes" grâce à "un système d'encouragement fort". Pour les personnes qui refusaient de se faire tester, 14 jours de quarantaine étaient requis, et pour les personnes qui refusaient de se faire isoler, c'était une amende assez importante. "Bien sûr, le nombre de cas remonte après. Ils n'ont pas eu assez de tests pour continuer. Mais ça ne condamne absolument pas cette initiative qui est très intéressante et qu'il faut suivre", a estimé Anne-Claude Crémieux.

"Ces politiques de dépistage ne sont intéressantes que si elles sont répétées"

Le dépistage de masse doit donc être accompagné d'un isolement, mais pas que. Être testé ne veut pas dire être sûr d'être négatif. "Aucun test n'est capable de dépister une infection récente, qui s'est produite dans les 7 jours qui précèdent le test. Cela veut dire que ces politiques de dépistage de masse ne sont intéressantes que si elles sont répétées ! Parce qu'au premier test, on va peut-être passer à côté de ces personnes qui sont ce qu'on appelle en phase d'incubation. Mais on va les récupérer lorsqu'on va refaire un dépistage massif 7 jours après", a soutenu Anne-Claude Crémieux.

Même chose sur le plan individuel, notamment à l'approche des fêtes, conseille la professeure : si vous faites un test, cela ne vous renseignera pas sur une infection récente. Il faut donc se mettre en "auto-isolement pendant les sept jours qui précèdent le moment" de la rencontre avec sa famille. "Dans ces conditions, si on n'a pas pris de risque depuis les sept jours qui précèdent Noël, un test peut être intéressant."