Où sont passés les 10.000 respirateurs artificiels commandés en plein confinement, en plein pic de l'épidémie de coronavirus ? C'est la question que posait mardi sur Europe 1 le professeur Philippe Juvin, chef des urgences de l'hôpital Pompidou à Paris et maire Les Républicains de La Garenne-Colombes. Le 31 mars dernier, pour faire face à l'afflux de patients en réanimation, Emmanuel Macron avait annoncé une commande de 10 000 respirateurs artificiels. Selon nos informations, ils ont bien été fabriqués... mais ne sont pas des plus efficaces.
"Ce ne sont peut-être pas les plus performants"...
Pour établir en quelques mois l'équivalent de trois ans de production, un consortium a été créé autour d'Air Liquide, le seul fabricant français de respirateurs. Résultat, 9.984 appareils sont sortis des usines. 9.400 ont, à ce stade, été achetés, précise à Europe 1 la Direction Générale de la Santé. Deux modèles différents ont été produits, dont un baptisé Osiris, qui a suscité la polémique en pleine crise sanitaire : il ne permet pas de ventiler les malades du coronavirus.
"Leur aide risque d’être quasi nulle dans la lutte contre l’épidémie", écrivions-nous dans un article daté du 23 avril. "C'est un modèle de ventilateur qui n’a jamais été conçu pour les patients qui nous préoccupent aujourd'hui. Son utilité est donc très restreinte", disait Jean-Michel Constantin, chef du service de réanimation à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. "Ce ne sont peut-être pas les plus performants", admet Eric Maury, président de la Société de réanimation de langue française, au micro d'Europe 1. Mais selon lui, les modèles Osiris ont été très utiles notamment dans le cadre des unités éphémères de réanimation qu'il a fallu équiper en urgence au printemps dernier.
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... "mais on sera bien contents d'avoir un stock de respirateurs de secours"
"On s'est dit qu'on allait être en déficit de respirateurs et le seul respirateur qu'il était possible de construire rapidement, c'était celui-ci", affirme Eric Maury. "Si on se retrouve confrontés à une deuxième vague, à une grippe qui peut se sur-rajouter au Covid-19 ou à une nouvelle épidémie, on sera bien contents d'avoir un stock de respirateurs de secours qui sera disponible", prévient-il.
Des projets de constructions de respirateurs avortés
La France pourrait-elle construire de nouveaux respirateurs ? Ce n'est visiblement pas à l'ordre du jour, bien que la tension mondiale sur l’approvisionnement ait largement baissé aujourd'hui et que la pénurie soit terminée. Un important stock a été constitué avec les appareils Osiris, au point que certains projets comme celui mené par le CEA de Saclay et le CHU de Nantes, qui voulaient fabriquer 5.000 appareils supplémentaires, ont même été stoppés.