Respirateur 2:01
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Victor Dhollande, édité par Romain David , modifié à
Mi-mars, le fabriquant Air Liquide s'est associé à trois grands industriels pour produire en urgence 10.000 respirateurs destinés à soulager les services de réanimation des hôpitaux. Or, comme le révèle franceinfo, une très large part des modèles fabriqués ne permet pas de ventiler les malades du coronavirus.
INTERVIEW

La France fabrique-t-elle en toute urgence des respirateurs artificiels inadaptés ? En grande pompe, Air Liquide s’est associé mi-mars à PSA, Valeo et Schneider Electric pour produire le plus rapidement possible 10.000 respirateurs artificiels. Mais comme l’ont révélé nos confrères de franceinfo jeudi matin, 8.500 appareils fabriqués ne seraient pas utilisable pour ventiler des patients atteints du coronavirus. Selon Jean-Michel Constantin, chef du service de réanimation à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière et secrétaire général adjoint de la Société française d’anesthésie et de réanimation, il s'agissait tout simplement d'"une fausse bonne idée".

Un modèle fabriqué dans la précipitation ?

"Il faut se remettre dans le contexte : nous étions mi-mars, en pleine phase ascendante de l’épidémie avec 300 nouveaux patients en réanimation chaque jour. Il y avait la crainte d’être débordé, que le confinement ne soit pas assez efficace et qu'on laisse mourir des patients par faute de ventilateurs", rappelle ce praticien au micro d’Europe 1. Or, le modèle qui a été produit en urgence, baptisé Osiris et utilisé depuis la fin des années 1990, n’est tout simplement pas assez puissant pour soulager les patients ayant développé des formes graves du Covid-19.

"Les malades du coronavirus en réanimation souffrent d'un syndrome respiratoire aigu, il ne suffit pas de les raccorder à n’importe quel respirateur pour les sauver", pointe Jean-Michel Constantin. "Il faut des ventilateurs capables de pousser suffisamment de pression."

Des ventilateurs d'appoint

Les 8.500 ventilateurs fabriqués ne resteront pas sans utilité, mais leur aide risque d’être quasi nulle dans la lutte contre l’épidémie. "On ne peut pas dire que ça ne servira à rien. Ces appareils pourront être utilisés lorsque l’on transfère les patients vers les scanners ou le bloc opératoire, comme on peut le faire au quotidien", relève le chef du service de réanimation à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

Par ailleurs, la Société française d'anesthésie et de réanimation et la Société de réanimation de langue française ont validé l'utilisation de ces respirateurs en cas d'indisponibilité des appareils plus lourds. "Mais clairement, c’est un modèle de ventilateur qui n’a jamais été conçu pour les patients qui nous préoccupent aujourd’hui. Son utilité est donc très restreinte", reconnaît Jean-Michel Constantin.