Retraites : une saisine du Conseil constitutionnel par les oppositions a-t-elle une chance d'aboutir ?

Les députés Liot ainsi que la gauche ont annoncé leur volonté de saisir prochainement le Conseil constitutionnel
Les députés Liot ainsi que la gauche ont annoncé leur volonté de saisir prochainement le Conseil constitutionnel © STEPHANE MOUCHMOUCHE / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP
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Romain Rouillard
Dans la foulée de l'utilisation du 49.3 par le gouvernement pour faire adopter sans vote la réforme des retraites, le groupe Liot et Mathilde Panot, cheffe de file des députés LFI, ont annoncé leur volonté de saisir prochainement le Conseil constitutionnel dans l'espoir de faire abroger la loi.

Pour les oppositions, place désormais à l'examen minutieux des recours envisageables pour invalider la réforme des retraites, adoptée sans vote jeudi dernier après l'utilisation du 49.3 par le gouvernement. Une façon de procéder qui a déclenché l'ire des adversaires de l'exécutif qui cherchent à contre-attaquer. Le groupe Liot (Libertés Indépendants Outre-mer et Territoires) a été le premier à dégainer une motion de censure transpartisane avant d'être imité quelques heures plus tard par le Rassemblement national. Et réfléchit également à une autre procédure qui consisterait à saisir directement le Conseil constitutionnel. Un recours que Mathilde Panot, cheffe de file des députés LFI, a également promis de solliciter en début de semaine prochaine.

L'avertissement du Conseil d'État

L'institution peut en effet être saisie par 60 députés ou sénateurs dans les 15 jours qui suivent l'adoption définitive d'une loi. En temps normal, elle bénéficie d'un mois pour rendre sa décision mais le gouvernement a la possibilité de demander un examen en urgence, ce qui réduit alors le délai à huit jours. Le 21 février dernier, Le Point et Le Monde révélait une note du Conseil d'État qui tirait la sonnette d'alarme quant à un risque d'inconstitutionnalité de certaines dispositions de la loi.

Parmi les points relevés par la plus haute juridiction administrative, figurait notamment l'index senior qui entend inciter les entreprises à garder dans leurs effectifs des salariés au crépuscule de leur carrière. Le Conseil d'État estime que cette mesure ne dispose pas des caractéristiques requises pour être intégrée dans un texte, adopté via un projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale (PLFSS). En clair, cette disposition "n'influera sans doute pas sur le financement de la Sécurité Sociale pour 2023", indique le conseiller d'État Didier Maus auprès de Franceinfo, et n'a donc rien à faire au sein de cette réforme des retraites. 

Des débats trop écourtés par l'exécutif ? 

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel pourrait épingler non pas le fond mais la forme utilisée pour faire adopter la loi. Et considérer ainsi que le Parlement n'a pas eu le loisir de débattre véritablement. Au-delà du 49.3, le gouvernement a en effet sollicité l'article 47.1 afin de raccourcir le temps des débats à l'Assemblée avant de déclencher le 44.3 au Sénat afin de contraindre la chambre haute à se prononcer par un vote unique sur une partie, voire la totalité du projet de loi. "ll n’y a pas vraiment eu un débat clair et sincère, or c’est une exigence constitutionnelle", a relevé sur Franceinfo Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel. 

Par conséquent, il existe des raisons de croire que le Conseil constitutionnel vienne révoquer une partie de cette réforme des retraites. Ce dimanche, Jean-Luc Mélenchon se voulait d'ailleurs très confiant dans l'émission Le Grand Jury d'RTL, de LCI et du Figaro. "Le Conseil Constitutionnel annulera toute la procédure parlementaire de la réforme des retraites. Les Sages savent que leur rôle est de protéger les institutions en les faisant respecter. Ils tiennent aussi compte de ce qu'il se passe dans le pays", a déclaré le leader insoumis.