La biotech s'est imposée dans la crise du Covid face aux laboratoires traditionnels. Image d'illustration. 2:44
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Emmanuel Duteil, Aurélien Fleurot, édité par Guilhem Dedoyard , modifié à
Plusieurs laboratoires proposent désormais des vaccins contre le coronavirus en s'appuyant sur les biotechnologies. Alors qu'elles semblent devenir indispensables, l'échec relatif de Sanofi et l'abandon de Pasteur, en France, interrogent. Le retard du pays sur ces sujets est-il irrattrapable ? 

La biotech pourrait être l'avenir de la recherche pharmaceutique mais en France, le compte n'y est pas. Le vaccin Sanofi, qui fait appel à une autre méthode que l'innovant ARN messager, est retardé et ne sortira pas avant le "dernier trimestre" 2021. Et Pasteur a annoncé cette semaine renoncer à son propre produit. Seule Valneva, une start-up nantaise utilisant ces biotechnologies, est encore en bonne voie. Mais pour des raisons de financements et d'innovation, la biotech ne semble pas faire partie des priorités de la recherche française.

Un manque d'innovation...

Si, comme il l'espère, le groupe Sanofi réussit à sortir son vaccin en fin d'année, il sera le seul grand nom de la pharmacie à s'en sortir seul. Mais son retard dans le domaine des biotechs demeurera. Selon un spécialiste du secteur, "la créativité n'est plus" chez les laboratoires traditionnels". Ces derniers ne se lancent en effet que sur ce qui est quasiment certain d'aboutir, et donc de déboucher sur de gros bénéfices.

L'innovation radicale  est donc est laissée à des start-up, comme Valneva, qui réussissent à émerger à la faveur d'opportunités comme la crise du coronavirus. C'est en partie ce qui a provoqué la situation actuelle, et fait que Sanofi ou Pasteur n'ont pas assez cru à la technique de l'ARN messager. Sanofi s'est tout de même allié à une petite biotech, Translate bio, mais sans grands résultats pour le moment. Dans le même temps, Pfizer a mis des milliards d'euros dans un partenariat avec l'entreprise allemande BioNtech.

...et un manque de moyens

En France, l'Etat finance la recherche publique et aide, par le biais du crédit impôt recherche, la recherche privée. Mais il n'aide jamais un projet en particulier. Donc Valnéva, Sanofi ou Pasteur sont tous logés à la même enseigne et le gouvernement n'a pas pu donner suite à l'appel de la start-up nantaise. Celle-ci a contacté dès avril un certain nombre de gouvernements. "Ce qu'il nous fallait, c'était sécuriser les financements dès juillet pour lancer la construction de l'usine et les essais cliniques. Et c'est le Royaume-Uni qui a réagi le plus rapidement", explique son PDG Franck Grimaud. 

Par ailleurs, les trop faibles financements des grandes institutions publiques de recherche créent un manque de moyens chronique en France. À l'inverse, aux Etats-Unis, les universités spécialisées dans le domaine de la santé disposent de moyens colossaux. C'est pour cela que les meilleures entreprise de biotech s'y trouvent et qu'elles se font racheter pour plusieurs milliards d'euros dès qu'elles montrent des résultats prometteurs.

Enfin, la France a réduit par deux sa part de marché dans la pharmacie au niveau mondial entre 2005 et 2015. Certains, au ministère de l'Economie, estiment que l'on a trop cherché ces dernières années à avoir, notamment, des médicaments les moins chers possibles. Selon un conseiller, on a eu une approche budgétaire qui ne donne pas envie aux grands groupes de chercher en France. De quoi expliquer en partie le retard tricolore sur la biotech.