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Antoine Terrel , modifié à
Invité jeudi d'Europe 1, le Pr Laurent Lantieri, chef de service de chirurgie à l'hôpital Georges Pompidou, est revenu sur la suspension de l'essai clinique qui prévoyait d'administrer à des patients atteints du coronavirus une solution issue du sang d'un ver marin. "Je crois toujours en cette molécule", assure-t-il. 
INTERVIEW

Alors que les chercheurs multiplient les expérimentations pour lutter plus efficacement contre le coronavirus, l'essai clinique qui prévoyait d'administrer à des patients une solution issue du sang d'un ver marin a été stoppé jeudi. L'Agence du médicament (ANSM) a en effet décidé de "suspendre en urgence" le feu vert qu'elle avait donné pour cette étude, après avoir pris connaissance de résultats négatifs d'une étude précédente sur des porcs. Invité jeudi d'Europe 1, le Pr Laurent Lantieri, chef de service de chirurgie à l'hôpital Georges Pompidou, reste persuadé de l'utilité de cette expérimentation. "Je crois toujours en cette molécule et je continuerai à y croire", assure celui qui l'utilise régulièrement pour ses greffes, dont il est spécialiste.

Rappelant que "l'essai n'a même pas commencé", Laurent Lantieri ajoute que cette molécule issue du sang de ver marin "est utilisée en pratique clinique dans les greffes". L'information des résultats négatifs de l'étude sur les porcs était également, selon lui, "déjà connue avant". Par ailleurs, le chirurgien précise "qu'il ne s'agissait pas de la même formulation de la molécule". 

"Ne pas vouloir tester cette idée est éthiquement inconcevable"

"Quand vous faites de la recherche avec des modèles animaux, il est normal d'avoir des résultats négatifs de temps en temps", poursuit l'invité d'Europe 1, car "ces modèles ne se comportent pas comme le corps humain". De plus, ajoute-t-il, "le cochon est un mauvais modèle pour ce type d'expérience, et cela a été démontré par la suite". L'étude citée par l'ANSM, datant de 2011, s'est traduite par une létalité de 100% chez les cochons ayant reçu la substance issue du ver marin. 

Pour Laurent Lantieri, "il est normal que l'Agence du médicament veuille avoir des informations". Mais le chirurgien insiste sur "le nombre de demandes et l'enthousiasme qu'a suscité cette idée d'essai auprès de [s]es collègues réanimateurs", tout comme à l'étranger.

"Cette idée est peut-être géniale, peut-être fausse", insiste le chirurgien, "mais dans le temps dans lequel nous sommes, ne pas vouloir tester une idée qui pourrait potentiellement sauver des milliers de vies, c'est éthiquement inconcevable". Et de conclure : "Si la France ne veut pas tester cette molécule, je suis sûr que dans d'autres pays, ils seront ravis de le faire."