LA QUESTION PSYCHO - J'ai peur des retrouvailles avec mes proches après le déconfinement

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Catherine Blanc
Dans "Sans Rendez-vous" sur Europe 1, la sexologue et psychanalyste Catherine Blanc répond à une auditrice qui redoute la perspective du déconfinement, et des retrouvailles avec des proches auxquels elle n'ose pas nécessairement dire son mal être.

"Familles ! Je vous hais ! Foyers clos ; portes refermées ; possessions jalouse du bonheur", écrit André Gide dans Les Nourritures terrestres. Si le confinement et l’étiolement du lien social en cette période de crise sanitaire ont de nombreux aspects négatifs, pour certains et certaines, l’isolement est une forme de libération. Il permet de se soustraire à l'étouffante attention de ses proches, de prendre ses distances avec une famille trop pesante, dont on redoute de critiquer les attentions et les tendresses excessives, de peur de blesser. Dans Sans Rendez-vous ce mardi sur Europe 1, la sexologue et psychanalyste Catherine Blanc évoque la manière de mettre à profit cette période pour faire comprendre aux siens que l’éloignement peut aussi avoir du bon.

La question de Gaëlle

"Dans la perspective du déconfinement, je vois, autour de moi, ma famille, mes proches, se réjouir. Ils projettent les retrouvailles, les fêtes et les embrassades. Mais cela m’angoisse, j’y vois une perspective anxiogène avec le retour de mes problèmes familiaux. Qu’en pensez-vous ?"

La réponse de Catherine Blanc

"La crise sanitaire a permis à Gaëlle de mettre au placard ses problèmes familiaux, mais l’a aussi autorisée à mettre à distance sa famille. Il n’est pas toujours simple de faire avec sa famille lorsque l’on est sous l’emprise des siens, parce que l’on ne sait pas mettre la bonne distance ou parce que l’on a l’impression d’être mangé, d’être sous le joug de leur ordonnance, de leur loi de vie, de leurs peurs aussi, le tout avec cette obligation de fidélité que l’on devrait à ses proches.

Le temps du confinement a permis la distance, l’autonomie. Gaëlle a retrouvé le sentiment de s’appartenir. Pour ceux qui ont beaucoup de mal à mettre les bonnes distances, le confinement leur a permis de le faire, autorisé par l’ordonnance nationale, à défaut de parvenir à le dire directement aux parents ou à sa fratrie.

 

Peut-il y avoir un contrecoup au déconfinement ?

Le confinement permet d’être dans ses propres marques, de ne pas souffrir du faire avec l’autre et de l’autre imposé dans la vie de tous les jours. La vie en société est riche, joyeuse, pleine de possibles, de propositions, mais c’est aussi une vie contraignante, qui oblige à trouver des compromis. Si l’homme a besoin de vivre en société, pour autant, dans notre petit confort de confinement nous avons pris l’habitude d’être les rois du monde, et il va falloir ré-apprendre à partager ce monde…

 

 

Peut-on profiter de ce confinement, et de la distance imposée, pour avouer à nos proches qu’ils ont tendance à nous étouffer ?

Gaëlle pourrait en effet utiliser cette distance pour dire aux siens combien l’isolement lui a fait du bien, et ainsi lever le voile sur des sujets douloureux. Échanger au téléphone en cette période d’éloignement permet de se protéger : on peut raccrocher ou être obligé de raccrocher à cause d’un rendez-vous opportun, mais c’est aussi le moyen d’utiliser à profit la distance quand on a peur du regard de l’autre au moment de lui dire ce qui ne nous convient pas."