Christophe Prudhomme était invité sur Europe 1, samedi. 8:51
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Tiffany Fillon , modifié à
Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF), médecin au Samu de Seine-Saint-Denis et responsable CGT, a lancé samedi sur Europe 1 un appel pour aider la population de la Seine-Saint-Denis, en première ligne face au Covid-19. 
INTERVIEW

Dans le journal Le Monde, le président du conseil départemental et cinq maires de Seine-Saint-Denis dénoncent samedi la surmortalité liée au Covid-19 dans ce département. Invité d'Europe 1 samedi, Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF), médecin au Samu de Seine-Saint-Denis et responsable CGT abonde et met en cause l'état des équipements du 93.  

Il rappelle notamment qu'en Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de France, des "citoyens de l'ombre" comme des femmes de ménage ou des éboueurs s'activent pour continuer à faire fonctionner la société. À cette large proportion de populations précaires et fragiles face au coronavirus s'ajoute "des services publics dégradés", selon lui.

"Nous avons été le premier département d'Île-de-France à ne plus avoir de lits de réanimation disponibles au pic de l'épidémie. En Seine-Saint-Denis, il y a moins de service public, moins de médecins et moins d'hôpitaux. Nos hôpitaux sont dans un état lamentable. Nous manquons d'un certain nombre de services spécialisés. L'entretien des bâtiments reste à désirer", égrène Christophe Prudhomme. 

"Des mesures pour les plus pauvres"

Le médecin appelle donc les autorités à venir en aide à la population de ce département. "Il va falloir que le gouvernement comprenne que pour rétablir l'égalité de traitement des citoyens, il faut des mesures pour les plus pauvres qui sont indispensables aujourd'hui", demande-t-il. 

La vulnérabilité de ces personnes pauvres face au Covid-19 s'explique selon Christophe Prudhomme par "les conditions très difficiles" dans lesquelles elles vivent. "On a essayé de les stigmatiser concernant le non-respect du confinement. En Seine-Saint-Denis, quand vous habitez au Chêne pointu, où a été tourné le film Les Misérables et vous vivez à huit dans cinquante mètres carrés, il faut bien que l'on puisse sortir un peu", estime l'urgentiste. 

Il affirme également que beaucoup d'habitants du département sont en "mauvais état de santé". Il a fallu, d'après lui, "transférer des patients parfois à l'autre bout de la région, ce qui entraîne des compilations, une perte de chance pour ces patients et pour nous au Samu une surcharge de travail que l'on aura pu éviter."

La crise globale de l'hôpital en filigrane

Pour Christophe Prudhomme, la Seine-Saint-Denis subit donc les conséquences de la gestion passé. "Ce que révèle cette crise c'est que nous sommes dans un monde où les inégalités ont progressé ces dernières années. Cela fait quarante ans que je vis en Seine-Saint-Denis et j'ai vu la situation se dégrader", explique-t-il. "Depuis quinze ans, nous, les urgentistes, nous manquons de lits de réanimation. On a fermé 100.000 lits en vingt ans en France." 

Le médecin note toutefois "moins d'appels au Samu et moins de passages aux urgences pour de nouveaux malades". "Il faut à tout prix que nous arrivions à stabiliser cette phase de plateau", conclut-il.