Test coronavirus dépistage 1:45
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Jean-Gabriel Bourgeois, Lionel Gougelot, avec AFP édité par Mathilde Durand , modifié à
Deux opérations de dépistage massif et volontaire sont lancées ce lundi au Havre, en Normandie, et à Charleville-Mézières, dans les Ardennes. Des gymnases ou encore des salles de spectacles ont été reconvertis en centre de tests. Les deux villes sont mobilisées et attendent désormais la participation des riverains, pas toujours convaincus. Europe 1 s'est rendue sur place.
REPORTAGE

La France lance cette semaine sa stratégie de dépistage massif du Covid-19, inspirée des résultats outre-Manche de la ville de Liverpool. Plusieurs opérations débutent ce lundi dans les agglomérations de Charleville-Mézières, dans les Ardennes, et du Havre, en Normandie, afin de tester massivement la population. Un premier pas avant le lancement de campagnes similaires au sein de deux autres territoires en janvier, parmi ceux où le virus circule le plus vite en France : Roubaix, dans le Nord, et Saint-Etienne, en région Auvergne-Rhône-Alpes.

Un large dispositif mis en place 

Au Havre, vingt centres de tests éphémères ouvrent leurs portes ce lundi, de 10 heures à 20 heures, pour accueillir les habitants volontaires. "Le plateau de la scène va se transformer en laboratoire de tests", indique Jérôme Le Bay, dont la salle de spectacle accueillera les opérations de dépistage, faute de ne pouvoir rouvrir. "Tout est prêt. Vous passez là, vous avez les inscriptions, puis toute la partie administrative. Les box de tests ensuite. Des petites tablettes ont été mises là, d’habitude on a des tables parce que c’est une salle de concert, donc ce sont des tables pour les spectateurs", raconte le directeur de salle. "Les gens font leur test ici, ensuite ils suivent les flèches orange au sol."

"L'idée est de proposer aux 270.000 habitants des 54 communes de la communauté urbaine du Havre de venir se faire tester, sans rendez-vous et gratuitement, avec un résultat dans la demi-heure", explique le maire Edouard Philippe, ancien Premier ministre, lors d'une interview au JDD ce dimanche. "L'opération aura lieu dans plus de "50 sites différents", dont 20 centres "conçus pour accueillir plus de 500 personnes par jour, et même 1.000 pour certains", décrit-il. L’opération va mobiliser 250 élèves infirmiers, une centaine d’agents de la Ville en plus des personnels médicaux classiques. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, sera par ailleurs en déplacement au Havre lundi pour lancer l'opération. 

Dans les Ardennes, un des départements les plus touchés par la circulation du virus avec un taux d'incidence de 268 pour 100.000 habitants, l'agglomération de Charleville-Mézières est également dans les starting-blocks. Le dispositif doit permettre de réaliser 4.500 tests PCR par jour et près de 50.000 tests antigéniques au total, jusqu’à la fin du mois de décembre. Des centres de dépistages ont été aménagés dans les gymnases de certains quartiers entre Charleville et Sedan, des équipes mobiles vont se rendre dans les entreprises, et toutes les professions de santé sont sur le pont pour tester au moins 20% des habitants. 

Convaincre la population

Les résultats des tests antigéniques, réalisés dans ce cadre, seront connus en une vingtaine de minutes, gratuitement et sans ordonnance. Les organisateurs espèrent que les riverains participeront à ces opérations, basées sur le volontariat. En Normandie, ces retraités havrais n'ont pas hésité. "Nous on ira. On a un centre de dépistage près de la maison. Si on est positif, on s’isole sans problème. On n’a pas de symptôme, mais on peut ne pas avoir de symptôme et l’avoir quand même", confient-ils.

Mais tous les habitants des agglomérations concernées ne sont pas dans le même état d'esprit. "On se dit qu'on se fait dépister aujourd'hui, mais demain rien n'empêche que l'on puisse l'avoir", indique une habitante de Charleville-Mézières. "Je me ferais vacciner, c'est sûr. Mais le dépistage là, cela ne m'intéresse pas", explique une autre riveraine.  

Ces opérations d'ampleur doivent permettre de mieux contrôler la circulation, notamment en débusquant les cas asymptomatiques. "Il y a une inquiétude quand même, donc cela peut être intéressant de savoir où on en est", analyse Jean-François Piétri, pharmacien à Charleville-Mézières. "Mais le fait d'être négatif, il ne faut pas que ce soit un blanc-seing pour que les personnes ne pensent pas qu'elles peuvent faire n'importe quoi. Sinon, on prépare la troisième vague de janvier", alerte-t-il. 

Justement le maire de la ville, Boris Ravignon parie sur le fait que les personnes testées négatif adopteront un comportement plus prudent à l'approche des fêtes. "Ils savent que, quand ils sont testés, cela ne vaut pas un brevet d'immunité. On n'est pas dans Koh-Lanta", assure-t-il. "Par contre, je pense que quand ils auront un test négatif, ils vont faire attention entre le moment où ils auront ce test et le moment où ils retrouveront leurs familles à protéger cette immunité, pour justement ne pas apporter le Covid à leurs proches."

Pas d'isolement contraint

Pour les épidémiologistes, dépister à si grande échelle n'est utile que si les résultats sont exploités rapidement, en isolant les personnes testées positives et en limitant les contacts sociaux dans les zones les plus atteintes. En France, il n'y aura cependant pas de contrainte, à l'image de la manière forte qu'ont pu imposer les pays les plus sévères.

L'Agence régionale de santé Normandie parle "d'un accompagnement individuel, notamment pour s'isoler le plus rapidement et le plus efficacement possible". Dans les Ardennes, les cas détectés positifs feront l'objet d'un suivi renforcé par la plateforme téléphonique de la CPAM. Un isolement sera demandé, à l'hôtel ou à domicile, avec livraison de repas et de médicaments.