La spécialité tourangelle : la poire tapée

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Chaque week-end, Marion Sauveur fait découvrir une spécialité régionale : ce dimanche, la poire tapée. 

Je vous emmène dans un site troglodyte… à Rivarennes, près de Tours. Il n’y a que dans ce village que l’on entend le bruit d’un instrument en bois sur les poires, pour réaliser la spécialité du village : la poire tapée. 

La poire tapée, c’est une gourmandise : un concentré du fruit ! En fait c’est une poire séchée et déshydratée : un peu comme un pruneau ou un abricot sec.

 

La Touraine est une région fruitière… et au Moyen-âge, le village de Rivarennes s’est spécialisé dans la poire. Mais pour pouvoir la conserver et la vendre surtout… les Rivarennais ont dû mettre au point un procédé de conservation… c’est comme ça qu’est née la poire tapée ! Et c’est ce que m’a racontée l’une des tapeuses de poires d’aujourd’hui, Christine Hérin. “Ils en connaissaient beaucoup de procédés… il y avait fumé, salé, mettre dans la cendre : ce n’était vraiment pas possible pour le fruit. L’huile, c’était beaucoup trop cher. L’alcool était très cher et le sucre, lui il est venu des siècles plus tard, mais toujours trop cher… donc il fallait trouver un autre moyen. Et comme à l’époque les gens avaient des fours à pains et ben les gens ont eu l’idée de faire déshydrater les fruits dans les fours… Et c’est comme ça que petit à petit les fours sont devenus des fours à poires, ici sur la commune de Rivarennes. Donc on fait chauffer les fours à 500-600 degrés la veille et le jour de l’épluchage des poires. On épluche donc toutes les poires et on les installe sur de grandes claies en bois. Une fois que les fours sont bien nettoyés et qu’ils sont à la bonne température surtout, et bien on installe à plat les claies dans les fours. Une fois que toutes les claies sont installées on ferme la porte des fours, on laisse une aération pour que toute la vapeur puisse s’en aller et la déshydratation va durer à peu près 120-130 heures… donc en gros c’est 5 jours. Et là pour taper les poires, on prend un outil qu’on appelle platissoire et on reprend les poires une par une et on les tape”. 

 

Une fois tapée, la poire fait un centimètre d’épaisseur. Pas plus… Elle a une jolie couleur dorée… et est marquée par les heures passées sur les grilles des claies… 

Et ça y est ! Elle prête à être conservée… pendant des mois ! 

 

 

La recette

Vous pouvez la manger comme ça… C’est une vraie gourmandise : il faut imaginer un fruit confit, bien moelleux et au vrai bon goût de poire. 

Et puis vous pouvez effectivement retravailler la poire tapée… Christine Hérin m’a donné ses astuces : “Vous les faites réhydrater toute la nuit à froid dans le liquide que vous avez choisi : du vin, du thé, du cidre, de la bière, n’importe quel liquide sauf de l’eau… on a mis 120-130 heures à l’enlever faut pas la remettre et puis ce serait très fade. Le lendemain matin, vous rajoutez le sucre, l’épice que vous voulez ou rien… selon ce que vous voulez faire.  Et là vous les faites cuire pendant 1h-1h15. Et c’est pendant la cuisson qu’elles reprennent leur volume. Par exemple vous faites une viande et bien vous les faites chauffer, ça va vous servir d’accompagnement et vous vous servez du vin des poires pour faire votre sauce”.   

 

Elle s’achète d’ailleurs soit déshydratée… soit réhydratée, dans du vin de la région notamment. 

 

 

La revisite

L’un des chefs qui revisite la poire tapée, c’est Christophe Hay, qui dirige La Maison d’à côté, une table étoilée (2 étoiles) située à Montlivaut, près de Chambord, Le bistrot d’à côté toujours à Montlivaut ; et La table d’à côté (1 étoile) à Ardon, près d’Orléans. 

 

La poire tapée, il la transforme en Millefeuille. Il réalise un feuilleté croustillant, avec un crémeux vanille et des morceaux poire tapée. Il l’accompagne d’un sorbet au vin d’Hypocras.