Zéro déchet : quelles solutions pour sortir la livraison à domicile du "tout jetable" ?

Les services de livraison à domicile vont devoir réduire leurs déchets plastiques. L'ONG Zero Waste a quelques suggestions pour y parvenir.
Les services de livraison à domicile vont devoir réduire leurs déchets plastiques. L'ONG Zero Waste a quelques suggestions pour y parvenir. © BRENDAN SMIALOWSKI / AFP
  • Copié
Séverine Mermilliod
Alors que les services de livraison à domicile ont été priés par le ministère de la Transition écologique de "sortir du tout jetable", Laura Châtel, responsable du plaidoyer de l'ONG Zero Waste France, qui milite pour le zéro déchet, a mis en lumière quelques solutions possibles au micro d'Europe 1.
DÉCRYPTAGE

Une réunion était organisée mercredi au ministère de la Transition écologique, avec la secrétaire d’Etat Brune Poirson, des entreprises qui livrent des repas (telles que Deliveroo, Ubereats, Frichti...) et l'ONG Zero Waste. L'objectif : demander à ces entreprises une "stratégie zéro déchet" d'ici octobre pour sortir du tout jetable. Laura Châtel, responsable du plaidoyer chez Zero Waste France, était l'invitée d'Europe 1 jeudi. Elle donne quelques pistes pour sortir du "tout jetable".

Le secteur de la livraison et de la nourriture à emporter produit en effet de nombreux déchets : en 2018, ces plates-formes ont livré 200 millions de repas en France, selon le ministère, et l'organisme Citeo, spécialisé dans le tri et le recyclage, chiffre à 13 milliards le nombre d’emballages issus de la restauration rapide et de la vente à emporter en 2013.

Quel rôle pour les entreprises ?

"La demande du ministère visait vraiment à réduire les emballages à usage unique et à promouvoir la réutilisation. De ce point de vue, elle était très claire à destination de ces entreprises : elles doivent changer de modèle", analyse Laura Châtel qui explique que jusqu'alors "l’emballage à usage unique, très peu cher et très pratique car on n’a pas à se préoccuper de sa fin de vie" était privilégié par ces services de livraison. "Le problème, c’est qu’on n’a pas intégré le coût environnemental de ce déchet."

Et si, rappelle Laura Châtel, "il faut responsabiliser tout le monde y compris les consommateurs", c'est selon elle grâce aux entreprises que l'on pourra changer d'échelle. "Quand on parle des emballages, si c’est au client de ramener sa propre boîte, il peut l'oublier, et c'est contraignant. L'intérêt de généraliser à l'échelle d’entreprises, de standardiser les contenants, de pouvoir ramener son emballage sale dans n'importe quel commerce très rapidement, cela va permettre de démocratiser le geste zéro déchet".

Les plastiques biosourcés sont-ils vraiment intéressants ? 

Alors que Julia Bijaoui, cofondatrice de Frichti expliquait sur Europe 1 vendredi matin que sa société utilise désormais des emballages et couverts biosourcés, ce n'est pas une solution au long terme, pour la responsable du plaidoyer Zero Waste France.

"Il en existe différents types, avec de l'amidon de maïs, ou de la canne à sucre, parfois en PLA (un type de résine plastique parfois issu de résidus de lait)... Ce sont des plastiques produits en partie issue de matière végétales, de la biomasse, par opposition aux plastiques issus de produits fossiles. [...] Le problème c’est qu’il faut être vigilant sur l'origine de ces matières, souvent pas locales; et on reste sur de l’usage unique, donc on ne règle pas vraiment le problème du déchet qu’on va rarement pouvoir composter en réalité car il n'existe pas suffisamment de filières. L'intérêt est vraiment d'arriver à basculer sur du réutilisable. La ministre a aussi mis en garde contre le fait de perdre du temps sur ces solutions, qui ne sont pas très intéressantes, en fait, d'un point de vue environnemental". 

Vrac, couverts : que faire à son échelle ?

Afin de limiter ses déchets, "un geste très simple, si l'on mange souvent en extérieur, c’est d’avoir son set de couverts quelque part dans son sac", souligne la responsable du plaidoyer. On peut aussi "essayer d’acheter au maximum en vrac en ayant ses emballages réutilisables avec soi. Pour une série de produits, fruits et légumes, épicerie sèche, c’est assez facile, et parfois moins cher. Et vous descendez votre poubelle moins souvent !".

L'ONG Zero Waste France a justement pour but d'additionner "les bonnes volontés citoyennes" pour "faire une sorte de lobbying pour obtenir des consignes plus contraignantes pour les entreprises. D'ailleurs, cela ressort des propositions qui ont été faites" par la Convention citoyenne pour le climat, assure Laura Châtel, comme "imposer un certain pourcentage de vente en vrac dans les commerces. [....] Pour l’instant ce n'est pas du tout généralisé, mais notre enjeu est de faire en sorte que ce soit accessible pour le plus grand nombre."

Elle regrette aussi que certains magasins, avec l'effet coronavirus, ne prennent plus les boîtes réutilisables des clients. "Le fait de refuser les boîtes des clients, ça doit s’arrêter : on a eu une loi en début d’année qui réaffirme ce droit !"

La consigne est-elle la solution la plus efficace ?

Pour Zero Waste France, enfin, la consigne peut être "un outil qui peut être formidable pour réutiliser l’emballage. Une fois qu’on l’a récupéré, on peut le laver et ça évite de le fondre ou de le recycler. On la promeut, elle peut être très utile et notamment pour la vente à emporter et la livraison à domicile", puisque cela pourrait "inciter les consommateurs à ramener cet emballage" et permettrait ainsi de "généraliser la fin de l’emballage jetable".