Deux mois après la tempête Alex, "il va falloir non pas reconstruire, mais réinventer" Breil-sur-Roya

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Mathilde Durand , modifié à
Deux mois après la catastrophe, les communes des vallées de la Vésubie et de la Roya, dévastées par les crues, se relèvent progressivement. Sébastien Olharan, le maire de Breil-sur-Roya, se confie mercredi sur Europe 1 sur les chantiers, encore nombreux, à réaliser. "Il va falloir non pas reconstruire, mais réinventer la commune", assure-t-il. 
INTERVIEW

C'était il y a deux mois. Le 2 octobre dernier la tempête Alex dévastait une partie du Sud-Est de la France, notamment les vallées de la Vésubie et de la Roya, dans l'arrière-pays niçois. Le dernier bilan, toujours provisoire, s'élève à neuf victimes et neufs portés disparus. Les villages touchés portent encore les stigmates de la catastrophe, mais tentent de se reconstruire progressivement. "La situation revient progressivement à la normale", confie sur Europe 1 Sébastien Olharan, le maire de Breil-sur-Roya, commune ravagée par les crues.

"On est en mesure de sortir progressivement de la situation d'urgence dans laquelle on est restés pendant de très longues semaines", poursuit l'édile. "Les voies d'accès ont été rétablies vers l'extérieur, nous avons différents réseaux - eau, électricité, téléphonique - qui sont revenus très vite sur la commune de Breil-sur-Roya. Et on a toute la logistique qui avait été mise en place pour notamment approvisionner les communes du haut de la vallée de la Roya qui étaient toujours privées d'accès routier." La situation reste complexe, notamment pour accéder aux communes de Tende ou de la Brigue. "Une voie d'accès provisoire a pu être rétablie et permet de monter en convoi à trois horaires différents", précise Sébastien Olharan. 

Une commune à réinventer

Pour les familles qui ont tout perdu, difficile de parler d'un retour à la normale, en revanche. Elles ont pu bénéficier d'aides de certaines collectivités, comme le département des Alpes-Maritimes, souligne le maire, et de relogement provisoire, mais en dehors de la ville. "Nous travaillons pour essayer de leur trouver des solutions de relogement de moyen et de long terme sur la commune de Breil-sur-Roya", explique-t-il. "Fort heureusement, le souhait de la plupart d'entre elles est de revenir ici. Donc, c'est vrai que ça va être un défi aussi de pouvoir créer du logement."

"Il va falloir non pas reconstruire, mais réinventer la commune. Il va falloir identifier quelles sont les zones qui sont véritablement à risque et dans lesquelles on ne pourra pas, et on ne devra pas, reconstruire. Et ça va concerner sans doute un certain nombre d'habitations", souligne l'édile, qui n'est pas encore en mesure de donner des chiffres précis. Il compte sur la possibilité de construire sur de nouvelles zones, sans risque, sinon il manquera de possibilités pour reloger les habitants.

L'enjeu pour la municipalité est aussi de réfléchir aux infrastructures, la plupart ayant été emportées par la rivière. "La crue nous a emporté le stade, le camping municipal, la piscine, nos locaux des services techniques de la mairie et le city stade également, notre chapiteau qui nous servaient de salle des fêtes l'été. Tous ces équipements là, il va falloir les reconstruire", confie Sébastien Olharan. "Alors, il faudra se poser la question de savoir quelles sont les infrastructures qu'on peut reconstruire sans grand risque en bordure de rivière - parce que c'est quand même là qu'on a le plus grand foncier, même si on en a perdu beaucoup -, et quelles sont celles qu'on devra reconstruire ailleurs. Mais on est dans des vallées avec des reliefs importants et un stade, il n'y a pas cent endroits où on peut le construire..."

Dans l'attente d'aides financières

Pour financer cette reconstruction, les maires peuvent compter sur le soutien de Xavier Pelletier, préfet nommé spécialement pour travailler à la reconstruction des vallées. "Il est extrêmement présent sur le terrain et a pris à bras le corps l'ensemble des dossiers. Et il travaille à obtenir tous les financements exceptionnels dont nous aurons besoin parce qu'il a très vite mesuré le caractère exceptionnel de la catastrophe que l'on a vécu", explique le maire de Breil-sur-Roya.

"Jusqu'à présent, les seuls dispositifs dont on a parlé sont les dispositifs classiques. Ils subventionnent nos projets de reconstruction ou de démolition, mais il faut que les mairies avancent l'argent. Aucune commune n'a suffisamment de trésorerie pour faire face à l'ampleur des investissements qu'on va devoir réaliser. Pour vous donner un ordre de grandeur, la commune de Breil a un budget annuel d'investissement d'1,6 millions d'euros, on a 20 millions d'euros de dégâts." Le ministre délégué aux Comptes publics, Olivier Dussopt, a annoncé il y a deux semaines qu'une enveloppe de 20 millions d'euros allait être débloquée afin de venir en aide au département des Alpes-Maritimes.

Cette semaine, le ministre des Transports Jean-Baptiste Djebbari a annoncé le déblocage de la liaison ferroviaire entre la commune de Breil-sur-Roya et la ville de Tende. Une "vraie bonne nouvelle" pour le maire, qui se battait depuis quelques années avec les autres acteurs locaux pour faire reconnaitre l'importance de "cette ligne de vie". "Il ne s'agit pas d'une petite ligne, mais d'une ligne internationale qui relie la France, l'Italie, Provence-Alpes-Côte d'Azur et qui, si elle fonctionnait bien, mettrait Nice à seulement deux heures et demie de Turin", souligne Sébastien Olharan. "Cette ligne, il fallait la préserver d'un point de vue stratégique et elle était importante pour les populations de nos vallées. Je suis heureux que l'on prenne conscience de l'importance de cette infrastructure", ajoute-t-il rappelant l'importance du trafic ferroviaire au lendemain de la catastrophe, qui a permis d'apporter eau et vivre dans certaines localités.