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Gwladys Laffitte, édité par Jonathan Grelier , modifié à
Le protoxyde d'azote, plus connu sous le nom de "proto" ou de "gaz hilarant" et utilisé initialement pour les siphons à chantilly, est devenu l'une des drogues les plus appréciées des jeunes en France. Ce mardi, Europe 1 revient sur l'ampleur de la consommation de cette substance, alors qu'un texte de loi est en discussion au Parlement.
DÉCRYPTAGE

Il est communément appelé "gaz hilarant" et pourtant, ses effets secondaires peuvent être terribles et conduire à des drames. Le protoxyde d'azote, apprécié par ses consommateurs parce qu'il provoque des fous rires de plusieurs secondes, est ciblé par les parlementaires en France. Le 25 mars dernier, les députés ont ainsi voté son interdiction à la vente aux mineurs. Car "le proto", comme il est surnommé, est devenu une des drogues les plus consommées en France chez les jeunes, après le cannabis. Le produit est donc désormais bien plus que le simple carburant des siphons à chantilly, ce qui est son utilisation d'origine. Le texte voté à l'Assemblée nationale doit encore passer au Sénat. Mais si le protoxyde d'azote ne fait plus rire personne, c'est parce qu'il compte déjà plusieurs victimes à son actif, dont un adolescent qui en est décédé.

Une substance peu chère mais mortelle

La substance est donc très prisée par les jeunes, comme en témoigne parfois les restes de cartouches argentées qu'il n'est pas rare de trouver abandonnées dans les rues. Son succès auprès de ce public peut s'expliquer par son coût : le protoxyde d'azote est très peu cher, quelques euros seulement la boite de 10 ou 20, et s’achète dans n’importe quel commerce alimentaire.

Après l'achat, ses consommateurs mettent le gaz dans un ballon, et, par aspiration, partent dans des fous rires. Ces derniers cachent pourtant de réels dangers : chutes, vertiges, malaises cardiaques et donc un risque de mort. Il y a trois ans, Nadine Grosdidier a perdu de cette manière Yohan, son fils de 19 ans. Il a fait un arrêt cardiaque après avoir inhalé ce "gaz hilarant" un soir avec ses copains. "On est tombés des nues quand les gendarmes nous ont montré les ballons et les cartouches", se souvient-elle mardi au micro d'Europe 1.

"Pour eux, c'était juste pour rire..."

Nadine raconte pourtant avoir fait de la prévention auprès de son fils sur les substances addictives. "On lui avait dit 'fais attention à l'alcool, à la drogue'", dit-elle. Mais le protoxyde d'azote, elle "ne savait pas du tout que ça existait". "Ce produit-là, qu'ils ont découvert par Internet, pour eux c'était du gaz hilarant, donc c'était juste pour rire. Ils ne savaient pas que c'était mortel", alerte-elle.

En deux ans, les cas graves recensés par Nicolas Prisse, le président de la Mildeca, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, ont presque doublé. "Ce qu'on a pu observer, ce sont des comportements de plus en plus addictifs avec des gens qui prennent régulièrement et de manière chronique ces capsules", souligne-t-il sur Europe 1. "On a des consommateurs qui en prennent plusieurs centaines par jour."

Et quand le produit n'est pas mortel, il peut avoir de lourdes conséquences sur le cerveau. "Le gaz interagit avec la myéline qui entoure les nerfs et peut donc entraîner des paralysies, des problèmes de sensibilité", poursuit Nicolas Prisse. "Ce sont des complications qu'on voit de plus en plus souvent." Et 15% des cas graves concernent des mineurs.

Certaines villes ont pris les devants

D'où la volonté du législateur d'interdire la vente du protoxyde d’azote aux mineurs, dans les magasins et sur internet. L'infraction à cette loi sera ainsi punie de 3.750 euros d’amende. Plusieurs villes ont d'ailleurs déjà pris un arrêté municipal dans ce sens. C'est le cas de Montpellier. Son maire, Michaël Delafosse, en a eu l’idée en juillet dernier. "Cela a permis de responsabiliser les commerçants", estime-t-il. Autre mesure de prévention mise en place : "quand un jeune consomme du protoxyde d'azote sur la voie publique, il existe un dispositif de rappel à l'ordre en mairie", informe le maire.

Selon lui, ces mesures ont été efficaces. "On a vu se réduire la consommation de protoxyde d'azote sur la commune de Montpellier", juge-t-il. "On voit beaucoup moins de déchets de cette nature." D’autres villes sont encore loin de ces considération. Certains commerces y proposent même des réductions pour l'achat d'un grand nombre de cartouches. Un certain nombre vont même jusqu'à faire la publicité de leurs offres avec des flyers affichés en vitrine. La loi veut aussi punir cette incitation, avec l'instauration d'une amende de 15.000 euros. La seconde lecture au Sénat doit avoir lieu d’ici le mois de juin.