Pascal Canfin 1:24
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Mathilde Durand, avec AFP , modifié à
Alors que l'Union européenne vient de renforcer le contrôle des exportations des doses de vaccin produites sur son sol, l'eurodéputé Pascal Canfin, "Monsieur vaccin" du Parlement européen, déplore sur Europe 1 le "nationalisme vaccinal" des autres pays. Un comportement qui a entraîné le durcissement de ton de l'institution européenne. 
INTERVIEW

L'Union européenne tape du poing sur la table. Face à la montée d'une troisième vague de l'épidémie de Covid-19 et à la grogne de l'opinion publique quant à la lenteur de la campagne vaccinale, Bruxelles a décidé de renforcer le contrôle des exportations des doses de vaccin. Une nouvelle règle qui vise en particulier le Royaume-Uni. "C'est malheureux, cela veut dire que nous n'avons pas de bonnes relations, mais on en a marre de se faire avoir", a commenté Pascal Canfin, eurodéputé et président de la commission en charge de la santé publique, sur Europe 1.

Un jeu collectif qui n'a pas été suivi 

"L'Union européenne, depuis le début de cette crise, a joué collectif. Elle n'a pas joué le nationalisme vaccinal des autres, que ce soient des Britanniques ou des Américains", déplore l'eurodéputé. Mais cette démarche collective n'a pas été réciproque. De fait, alors que l'UE a exporté 21 millions de doses de vaccins vers Londres, dans le même temps, aucune dose d'AstraZeneca n'a fait le chemin inverse, alors que le laboratoire a deux usines en Grande-Bretagne.

Un manque de réciprocité qui a conduit l'Union européenne à durcir le ton, lors d'un sommet en visioconférence renforçant un mécanisme de contrôle des exportations. Il permet notamment d'empêcher des exportations à destination de pays eux-mêmes producteurs de vaccins, composants ou équipements, et qui ne livrent pas l'Union européenne. Les exportations pourraient aussi être bloquées vers les pays dont la population est déjà largement vaccinée ou qui bénéficient d'une meilleure situation épidémiologique.

"Nous avons deux principes : la réciprocité et la proportionnalité", rappelle Pascal Canfin. "Vis-à-vis d'un pays, comme le Royaume-Uni, qui n'exporte aucune dose fabriquée sur son sol, alors nous allons appliquer la même règle : nous n'exporterons plus rien vers le Royaume-Uni, c'est juste équitable."

Un portefeuille de vaccin "le plus complet au monde"

L'eurodéputé défend la stratégie initiale de l'Union européenne : agir ensemble afin de peser sur le marché des vaccins. "Si nous n'avions pas fait les contrats à 27 pour avoir les mêmes prix, les mêmes conditions, nous serions en concurrence permanente entre nous. Ce serait encore plus chaotique", assure-t-il, concédant que la situation n'est pas "parfaite". 

"On a acheté de quoi vacciner un milliard d'européens", assure Pascal Canfin. "Donc on a acheté un portefeuille de vaccins qui est le plus complet au monde, nous n'avons aucun problème de commande, on a mis l'argent sur la table. Le problème, c'est la production." Une lenteur de production européenne, en comparaison avec les usines américaines, qui s'ajoute aux exportations massives et a encore creusé l'écart entre l'Union Européenne et d'autres pays. 

"C'est une situation qui n'est pas tenable", explique l'eurodéputé. "On va produire davantage pour nous." Et le temps presse pour l'Union européenne, qui s'est fixée comme objectif de vacciner 70% de sa population adulte contre le Covid-19 d'ici à la fin de l'été.