Anthony Blinken a rencontré son homologue chinois Qin Gang. 1:18
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Sébastien Le Belzic (à Pékin), avec AFP / Crédits photo : Zhai Jianlan / XINHUA / Xinhua via AFP , modifié à
Les États-Unis saluent dimanche des discussions "constructives" et "honnêtes" avec la Chine, au premier jour de la visite du secrétaire d'État Antony Blinken à Pékin. Cette visite de deux jours est le premier déplacement d'un chef de la diplomatie américaine sur le sol chinois en près de cinq ans.

Au premier jour de la visite du secrétaire d'Etat Antony Blinken à Pékin pour apaiser les tensions, Washington a salué dimanche des discussions "constructives" et "honnêtes" et s'est félicité de l'accord donné par le chef de la diplomatie chinoise à une visite prochaine à Washington. Cette visite de deux jours est le premier déplacement d'un chef de la diplomatie américaine sur le sol chinois en près de cinq ans.

Amorcer un dégel diplomatique

Anthony Blinken a rencontré son homologue chinois Qin Gang, dans une villa d'Etat richement décorée située dans les anciens jardins Diaoyutai à Pékin où ses hôtes chinois devaient ensuite organiser un banquet. Si personne ne s'attendait à des avancées majeures tant les sujets de friction sont nombreux - notamment sur le commerce et Taïwan -, l'idée était d'amorcer un dégel diplomatique et maintenir un dialogue pour "gérer de façon responsable la relation sino-américaine", selon le département d'Etat.

Les deux homes ont eu des entretiens "francs, substantiels et constructifs", a déclaré le porte-parole du département d'État, Matthew Miller, au terme de l'entretien. Anthony Blinken a notamment souligné "l'importance de la diplomatie et du maintien de canaux de communication ouverts sur l'ensemble des questions afin de réduire le risque de perception erronée et d'erreur de calcul", a-t-il précisé. Antony Blinken a également invité Qin Gang et les deux hommes se sont mis d'accord pour "programmer une telle visite à une date qui leur conviendrait mutuellement", à fixer ultérieurement, a déclaré le porte-parole du département d'Etat, Matt Miller.

"Point le plus bas"

De son côté, le ministre chinois des Affaires étrangères a rappelé à son homologue américain que les relations entre Pékin et Washington étaient "au point le plus bas" depuis le début de l'établissement des relations diplomatiques entre les deux pays, en 1979, selon des propos rapportés par la télévision d'Etat CCTV. Et parmi les points de friction, il a fait savoir que Taïwan était le plus sensible.

"La question de Taïwan issue constitue la question fondamentale des intérêts primordiaux de la Chine, le sujet le plus important dans les relations entre la Chine et les Etats-Unis et le péril le plus important" pour celles-ci, a déclaré Qin Gang, toujours selon CCTV. La Chine considère Taïwan comme une de ses provinces qu'elle doit réunifier, par la force si nécessaire.

L'affaire des ballons

La visite du chef de la diplomatie américaine était initialement prévue en février, dans le sillage de la rencontre, en novembre dernier, entre le président américain Joe Biden et son homologue chinois Xi Jinping, en marge d'un sommet du G20 en Indonésie. Mais elle avait été annulée à la dernière minute. En cause : le survol du territoire américain par un ballon chinois, accusé par Washington d'être un aéronef "espion", tandis que Pékin assurait qu'il s'agissait d'un engin météorologique ayant dévié de sa trajectoire.

A l'occasion de la visite de son secrétaire d'Etat en Chine, Joe Biden a minimisé l'épisode du ballon. "Je ne pense pas que les dirigeants savaient où il se trouvait, ce qu'il contenait et ce qui se passait", a déclaré le président américain samedi à la presse. "Je pense que c'était plus gênant qu'intentionnel". Joe Biden a dit espérer une nouvelle rencontre avec Xi Jinping "au cours des prochains mois". Les deux dirigeants devraient assister au prochain sommet du G20 en septembre à New Delhi et Xi Jinping a été invité à venir en novembre à San Francisco pour le sommet de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique (APEC).

Ligne dure

La visite d'Anthony Blinken est la première d'un secrétaire d'Etat américain en Chine depuis le voyage en octobre 2018 de son prédécesseur, Mike Pompeo, qui a été ensuite le maître d'œuvre de la stratégie de confrontation avec Pékin des dernières années de la présidence de Donald Trump. L'administration Biden a depuis maintenu cette ligne dure, allant même plus loin dans certains domaines, notamment via l'imposition de contrôles à l'exportation pour limiter l'achat et la fabrication par Pékin de puces haut de gamme "utilisées dans des applications militaires".

Mais elle veut coopérer avec la Chine sur des sujets cruciaux comme le climat. La visite d'Anthony Blinken survient d'ailleurs alors qu'une partie de la Chine subit une vague de chaleur, avec un nouveau record de température pour une mi-juin franchi vendredi à Pékin, à 39,4 degrés. Pour Danny Russel, ex-haut fonctionnaire du Département d'Etat américain, chaque partie a un intérêt dans cette visite : la Chine espère éviter de nouvelles restrictions américaines en matière de technologie et tout nouveau soutien à Taïwan. Les Etats-Unis souhaitent prévenir tout incident susceptible de déboucher sur un affrontement militaire.

"La brève visite d'Anthony Blinken n'apportera de solution à aucun des grands problèmes des relations entre les Etats-Unis et la Chine", estime Danny Russel, aujourd'hui vice-président du cabinet Asia Society Policy Institute à New York. "Mais sa visite pourrait bien relancer un dialogue en face-à-face dont le besoin se fait cruellement sentir et envoyer le signal que les deux pays sont en train de passer d'une rhétorique de colère face aux médias à des discussions plus sobres à huis clos".