Philippe Aghion est professeur au Collège de France. 3:49
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Antoine Terrel , modifié à
Invité mardi d'Europe 1, Philippe Aghion est revenu sur les annonces d'Emmanuel Macron, qui a appelé à "produire davantage en France", et à retrouver "une indépendance pleine et entière" sur la fabrication de matériel sanitaire. Selon l'économiste, la France paye "une désindustrialisation excessive" depuis plusieurs années. 
INTERVIEW

Emmanuel Macron s'est rendu mardi dans une usine de fabrication de masques près d'Angers. Une visite au terme de laquelle le président de la République a appelé à "produire davantage en France", et souhaité "l'indépendance pleine et entière" de la France "d'ici la fin de l'année" dans cette production de masques de protection face au coronavirus. Invité d'Europe 1, l'économiste Philippe Aghion, professeur au Collège de France et proche du chef de l'Etat, estime que la France paye "une désindustrialisation excessive" depuis plusieurs années. 

"Cela remonte à bien avant le quinquennat", précise d'entrée Philippe Aghion. "Il y a des choses qui doivent être délocalisées, mais nous sommes allés trop loin. Tout ce qui était productif dans nos chaines de valeur a été délocalisé", regrette-t-il. 

"Il ne s'agit pas de se relancer dans une politique protectionniste"

Pour Philippe Aghion, cet hymne présidentiel à la souveraineté n'est "pas une rupture". "Cela fait longtemps qu'Emmanuel Macron pousse pour une politique de l'offre, pour que notre industrie et notre production deviennent plus compétitives, et pour qu'on crée les conditions afin d'aller dans ce sens", note-t-il. Et de préciser : "Il ne s'agit pas se relancer dans une politique protectionniste, mais d'affirmer davantage un contrôle sur les chaînes de valeur", à l'instar de ce que fait l'Allemagne, qui s'est, selon lui, "donnée les moyens d'être importatrice et exportatrice". 

Mais n'est-il pas trop tard, au vu de cette désindustrialisation passée ? Non, répond Philippe Aghion. "Je crois beaucoup en l'innovation", indique-t-il. Il faut essayer d'avoir une politique plus active de recherche, d'innovation, et de faire en sorte qu'on soit plus compétitif". 

"Il faut une politique industrielle européenne"

"On a commencé à le faire avec le CICE, les lois El Khomri, les lois Pénicaud, etc. Nous avons pris un certain nombre de décisions qui nous ont rendu plus compétitif", développe-t-il encore. "On s'est engagé depuis plusieurs années dans une politique de l'offre, mais il faut aller plus loin."

 

Mais cette réaffirmation de la souveraineté ne doit pas être que nationale, rappelle l'économiste, pour qui "il faut une politique industrielle qui ne soit pas que française, mais également européenne".