Le télétravail a pu accentuer la vulnérabilité de certains salariés. Photo d'illustration. 6:17
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Antoine Terrel
Selon une étude menée par Malakoff-Humanis, plus d'un salarié sur deux dit connaître une situation de vulnérabilité impactant sa vie professionnelle. Au micro d'Europe 1, Anne-Sophie Godon, directrice de l'innovation au sein du groupe, explique que les salariés témoignent de plus en plus de difficultés personnelles, mais que les dirigeants d'entreprises les prennent mieux en compte qu'auparavant.
INTERVIEW

Alors que la France affronte toujours la deuxième vague de l'épidémie de coronavirus, l'impact de la crise sanitaire et économique continue de se faire sentir dans le monde du travail. Selon une étude publiée par le groupe de protection sociale Malakoff-Humanis, menée auprès de 2.000 salariés et 400 dirigeants d'entreprises, plus de la moitié des salariés interrogés affirment vivre "une situation de fragilité" impactant leur travail. Et la crise liée à l'épidémie, note Malakoff-Humanis, "bouscule les lignes en matière de vulnérabilité (...) accentue certains risques et en fait émerger de nouveaux". Au micro d'Europe 1, Anne-Sophie Godon, directrice de l’innovation au sein du groupe, détaille les principales conclusions de cette étude. 

Si les chiffres globaux concernant les situations de vulnérabilité sont assez stables, "on voit que les fragilités d'ordre personnel ont progressé depuis deux ans, là où celles d'origine plutôt professionnelle ont plutôt eu tendance à diminuer", explique Anne-Sophie Godon. "Les salariés sont beaucoup plus nombreux qu'en 2019 à nous dire que les fragilités qu'ils connaissent dans leur quotidien personnel, la maladie grave, le fait d'être aidant pour un proche, le fait de vivre une situation de famille monoparentale, ont des répercussions importantes sur leur travail."

La peur d'être infecté 

Pour l'invitée d'Europe 1, la crise du Covid-19 a engendré trois types de vulnérabilité. Tout d'abord, "les salariés disent se sentir vulnérables face au risque infectieux". Puis, "la deuxième vulnérabilité perçue de manière plus intense qu'avant est le risque de perdre ses revenus ou son emploi". Enfin, ajoute Anne-Sophie Godon, "la troisième vulnérabilité est d'ordre psychologique, à la fois liée au contexte et à l'anxiété qu'il génère, et aux nouvelles formes d'emploi que certains salariés ont pu connaître de manière un peu plus subie que d'habitude".

La mise en place du télétravail, notamment, a pu accentuer ces vulnérabilités, avec la difficulté de concilier travail et vie personnel chez soi. "Les deux se mélangent, ce qui crée un besoin de nouveaux repères", confirme Anne-Sophie Godon.

Vers une meilleure prise en compte par les employeurs ? 

Pour autant, Malakoff-Humanis note dans son étude que la crise pourrait avoir un aspect positif, puisqu'elle "accélère la prise de conscience de ces situations par les entreprises". De son côté, Anne-Sophie Godon confirme que "les entreprises se sont formidablement mobilisées pendant cette période, et les salariés le disent". Et de poursuivre : "Les dirigeants et salariés considèrent que cette situation va conduire à une meilleure prise en compte des vulnérabilités dans les entreprises".

L'une des principales limites à la lutte contre ces situation de vulnérabilité demeurerait, selon Anne-Sophie Godon, le manque d'information en interne. "Il y a toujours un décalage entre ce que les entreprises et les dirigeants déclarent faire, et ce que les salariés perçoivent", explique-t-elle. Par ailleurs, pour un salarié, signaler à son employeur une période de fragilité "est toujours une sorte de tabou", reconnaît-elle. "On en parle peut-être moins facilement que d'autres sujets. Les salariés ont toujours un peu la peur de s'épancher", notamment par crainte des conséquences potentielles.