INFO E1 - Votre paquet de pâtes coûtera 15 à 20 centimes de plus

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INFO E1 - Les amateurs de pasta sont prévenus : les fabricants estiment ne pas pouvoir faire autrement que d’augmenter leurs tarifs.

La météo capricieuse de cet été n’a pas embêté que les vacanciers. Elle a aussi perturbé les cultures de blé, dont la qualité a été détériorée par la pluie, et particulièrement le blé dur, qui est utilisé pour fabriquer les pâtes - alors que le blé tendre est utilisé pour faire de la farine et du pain. Résultat, des récoltes en baisse et des prix en hausse. Les prochains mois s’annoncent donc compliqués dans le petit monde des spaghettis et autres pennes, à en croire le syndicat des industries des pâtes alimentaires et de la semoule (SIFPAF). Avec, à la clef, une hausse imminente des prix de "15 à 20 centimes", dixit le directeur générale de Panzani interrogé par Europe 1. Seules les marques distributeurs premier prix devraient conserver leurs tarifs, mais elles ont un truc : elles vont se fournir auprès de nouveaux producteurs, avec le risque d’une qualité revue à la baisse.

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Le prix du blé dur joue aux montagnes russes. En affirmant lundi que les tarifs du blé dur ont augmenté de "50% en douze semaines", le syndicat du secteur a noirci le tableau en choisissant les chiffres les plus éloquents mais le constat est là : les prix sont bien en train de bondir. Ce que confirme France Agrimer : alors que la tonne de blé dur de haute qualité se vendait à 245 euros fin septembre 2013, ce prix est passé à 353 euros fin septembre 2014. Soit une hausse de 44% en un an. Sur trois ans, la hausse est bien moindre (moins de 4%), mais le graphique suivant montre bien que le marché du blé dur est d’une volatilité extrême et constitue un véritable casse-tête pour les fabricants de pâtes.

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Une influence directe sur le prix final. Quand le prix du blé dur augmente, celui des pâtes aussi, et pour cause : des pâtes, ce ne sont que de l’eau et du blé dur. Cette matière première influe donc énormément sur le prix final. Pour le syndicat du secteur, elle représente 75% du prix de revient. Pour l’Observatoire des prix et des marges, ce ratio tourne plutôt autour de 40% mais ce chiffre date d’une période où le blé dur coûtait bien moins cher. Et ce calcul a été contesté par la profession, qui souligne que les prix relevés étaient erronés et mélangeaient pâtes classique et pâtes aux œufs. Xavier Riescher, le directeur général de Panzani France, coupe la poire en deux : "les années où le prix du blé est très bas, ce qui était le cas en 2008, il représente 40% du coût de fabrication. Mais avec la hausse des cours, on va s’approcher des 70%".

Billet de banque

"La hausse des prix est incontournable". Habituellement, les marques tentent de garder des prix stables et absorbent les variations de leurs coûts d’approvisionnement. Sauf que le secteur des fabricants de pâtes ne se porte pas bien. "Le numéro un en Espagne est dans le rouge depuis deux ans, le numéro un en Allemagne perd de l’argent depuis trois an. C’est partout comme cela en Europe", souligne le DG de Panzani France. Sans oublier Alpina Savoie, troisième producteur français, qui a été placé en redressement judiciaire en 2008, un destin que viennent aussi de connaitre deux marques italiennes.

Dans ce contexte, "la hausse des prix est incontournable. Vous ne pouvez pas avoir votre matière première dont le prix augmente de 50% et ne pas le répercuter", prévient Xavier Riescher. Et quand on lui demande s’il faut s’attendre à cinq centimes de plus par parquet, ce dernier répond "plutôt 15 ou 20 centimes ", et ce dès les prochains. La grande distribution risque de ne pas être d’accord, mais a-t-elle le choix ? Leurs fournisseurs ayant déjà réduit leur marge au minimum, ils refusent d’aller plus loin.

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Des pâtes, des pâtes, oui mais de Turquie. Pour les marques distributeurs d’entrée de gamme, estampillées d’un plus chez Leclerc ou d’un pouce chez Auchan, la situation est en revanche différente : sur ces produits, le prix prime sur la qualité. Les supermarchés ont donc deux possibilités : soit ne plus proposer ces produits tant que les prix restent si élevés, comme ce fut le cas dans certains commerces en 2008, soit chercher ailleurs des prix encore plus bas.

Et c’est là qu’intervient la Turquie, puissance montante dans le monde des pâtes. "Les Turcs étaient complètement absent du marché  mais, depuis deux ans, ils se sont mis à exporter partout des pâtes en premier prix, un produit de mauvaise qualité. Ils sont devenus exportateur net d'un million de tonne l’an dernier", précise le patron de Panzani. A titre de comparaison, ce dernier écoule 300.000 tonnes par an en France. Et les mauvaises langues d’accuser la Turquie de mélanger blé dur et blé tendre pour casser les prix, avec au final des pâtes moins bonnes et collantes.

Les fabricants de pâtes appellent l’Europe à l’aide. Pour sortir de ce contexte difficile, les fabricants de pâtes ne peuvent pas maitriser la météo. Le secteur réclame donc un "plan d'urgence" et a commencé à faire du lobbying pour que les agriculteurs se remettent à cultiver du blé dur, qu’ils ont délaissé il y a deux ans lorsque la Commission européenne a cessé de le subventionner. Panzani, comme ses concurrents, tente donc de convaincre le gouvernement de monter au créneau. Et Xavier Riescher promet d’être modéré : "on ne demande pas plus d’aides aux agriculteurs qu’il y a deux ans".

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