Des heurts ont éclaté dans le secteur de la préfecture de Nantes entre les manifestants et les forces de l'ordre. Du mobilier urbain a été incendié.
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Yasmina Katou, édité par Europe1.fr avec AFP , modifié à
Des tensions ont éclaté à Nantes, samedi, à l'occasion du rassemblement contre les violences policières, moins d'une semaine après la découverte du corps de Steve Maia Caniço. 

Après un rassemblement tout en émotion samedi matin, quelque 1.700 personnes ont défilé dans l'après-midi contre les violences policières à Nantes, selon la police. Parmi eux figuraient environ 400 "black blocs" ou activistes identifiés, a indiqué une source proche du dossier à Europe 1. Ce rassemblement a proximité immédiate du périmètre interdit par les autorités a ainsi donné lieu à des moments de tensions et la mise en place d'une barricade près de la cathédrale.

Gaz lacrymogène et canon à eau 

"Tout le monde déteste la police", ont scandé dès le début du rassemblement les manifestants. Certains d'entre eux, cagoulés et entièrement vêtus de noir, sont directement allés au contact des forces de l'ordre. Quarante personnes ont été interpellées pour "faits de violences ou transport d'armes par destination", a indiqué la préfecture de Loire-Atlantique, évoquant 39 placements en garde à vue.

Cibles des manifestants, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner et la police : "Selon l'IGPN, le meurtre était conforme", "la police assassine", "forces de l'ordre, pour notre sécurité, veuillez quitter le périmètre", pouvait-on lire sur les pancartes et les murs, ou encore au-dessus d'un portrait de Christophe Castaner, "le con, la brute et le truand".

Du centre de Nantes, le cortège a poursuivi son chemin vers la préfecture. Certains manifestants ont alors tenté d'escalader les murs du bâtiment. D’après nos informations, vers 14h45, des manifestants ont également tiré une fusée d’alarme en direction de l’hélicoptère de la gendarmerie nationale qui survolait la zone. Gaz lacrymogène et canon à eau ont été utilisés pour essayer de les disperser, la police répondant par ailleurs à des jets de projectiles et départs de feu. Plusieurs barricades ont aussi été dressées et des vitrines brisées. 

Plusieurs blessés

En fin de manifestation, des grenades de désencerclement ont également été jetées au milieu de la foule. Plusieurs blessés sont à déplorer, la préfecture évoquant un policier et un manifestant touchés. Les deux sont restés conscients et ont été pris en charge. Selon un street médical, interrogé par un journaliste de l'AFP, le manifestant est un homme de 54 ans qui avait "fait un infarctus le 14 juillet".

Europe 1 a toutefois pu constater d'autres blessures, comme celle de Rémi, touché au pectoral. "J'étais en train de discuter avec les gendarmes pour essayer de faire baisser le niveau de violence. D'un seul coup, ils ont balancé quelque chose et j'ai pris un éclat", raconte-t-il. "Ça m'a juste arraché un petit bout de peau. Je l'aurais pris dans l'œil, les dents ou le nez, ça aurait été un autre genre de blessure".

"Les parents de Steve ne voulaient pas de violence"

Dans un appel vendredi à manifester, "Nantes révoltée" dénonçait les policiers qui "tirent des grenades pour arrêter des chansons", en ajoutant que "l'attaque policière de la Fête de la musique n'est que l'aboutissement d'années de violences et d'impunité pour les forces de l'ordre". La famille s'est désolidarisée de toute violence, plaidant pour "un soutien amical, artistique et pacifique", selon son avocate, Me Cécile de Oliveira.

Présente dans la foule, Isabelle voulait rendre hommage à Steve. "Les parents de Steve ne voulaient pas de violence, ce souhait n'est donc pas respecté", regrette-t-elle au micro d'Europe 1. "Je suis contre la violence. Il y a d'autres jours, d'autres samedis…", déplorait-elle encore. Le matin, elle s'était rendue au premier rassemblement en hommage à Steve Maia Caniço, sur les bords de Loire, à proximité du lieu où le corps du jeune homme, disparu depuis la Fête de la musique, dans la nuit du 21 au 22 juin, a été retrouvé lundi dernier.

Des rassemblements dans toute la France

De nombreuses mobilisations ont eu lieu partout en France, dans le calme, notamment à Paris, Montpellier, Toulouse, souvent à l'appel de "gilets jaunes" avec toujours pour cible les forces de police.

Dans la capitale, place de la République, une centaine de personnes, parfois vêtues de gilets jaunes, ont rendu hommage à Steve en observant une minute de silence et en déposant des roses blanches sous la surveillance d'un impressionnant dispositif policier. À Montpellier, ils étaient plusieurs centaines à rendre hommage à Steve Maia Caniço et dénoncer "des méthodes policières inacceptables". "Liberté, égalité, répression", ont scandé les manifestants.

Répondant au mot d'ordre "après Steve, à qui le tour ?", quelques centaines de "gilets jaunes" ont aussi défilé dans le centre-ville de Toulouse, au cri de "police partout, justice nulle part".

Une polémique encore vive sur l'intervention des forces de l'ordre 

La polémique sur l'attitude de la police le soir de la Fête de la musique reste vive. Le rapport de l'IGPN, dévoilé mardi, a été jugé par certains trop favorable aux policiers. Selon la "police des polices", "il ne peut être établi de lien entre l'intervention des forces de police (...) entre 04h20 et 04h52 quai Wilson à Nantes et la disparition de Steve Maia Caniço après 4h dans le même secteur". Mais des zones d'ombre demeurent. Pour "aller plus loin", le Premier ministre Edouard Philippe a demandé une enquête de l'inspection générale de l'administration (IGA).

Vendredi, Christophe Castaner est revenu sur l'utilisation de gaz lacrymogènes par les forces de l'ordre, admettant qu'il y avait un "questionnement" sur leur usage. La maire de Lille, Martine Aubry (PS), a estimé qu'"on ne pouvait pas être dans un pays où on doute de la police, ce n'est pas possible". "On attend la vérité", a-t-elle ajouté sur France Bleu Nord.