"Gilets jaunes" : ce qu’il faut retenir de la mobilisation de samedi

Quelques 8.000 personnes, selon la préfecture, dont des "gilets jaunes", ont défilé dans les rues de la capitale.
Quelques 8.000 personnes, selon la préfecture, dont des "gilets jaunes", ont défilé dans les rues de la capitale. © AFP
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Une mobilisation en baisse à l’échelle nationale, des heurts sur les Champs-Élysées, et Macron qui exprime sa "honte", voici ce qu’il faut retenir de la mobilisation des "gilets jaunes" samedi.

C’était la deuxième grande journée de mobilisation des "gilets jaunes" contre la hausse des prix du carburant, des taxes et du pouvoir d’achat. Une semaine après le début du mouvement, "l’acte 2" a réuni moins de participants samedi, mais reste toutefois marqué par des heurts sur les Champs-Élysées, à Paris.

Entre échauffourées et interpellations, les violences qui se sont déroulées dans la capitale ont été condamnées par Emmanuel Macron qui a exprimé sa "honte". Récit.

Une mobilisation en baisse dans toute la France

Cette deuxième journée de mobilisation a moins mobilisé de "gilets jaunes" que samedi dernier. Selon le ministère de l’Intérieur, 106.301 manifestants sont descendus dans la rue ce samedi, contre 282.710 la semaine dernière. Au total, 1.619 actions ont été recensées sur tout le territoire et Christophe Castaner s’est réjoui que le nombre de blessés soit en baisse par rapport à la journée du 17 novembre.

Il a néanmoins relevé un "durcissement" de la mobilisation qui, outre les dégradations sur les Champs-Elysées, s'est illustrée notamment par un feu déclenché par 40 "gilets jaunes", introduits sur la propriété d'une députée LREM de l'Aude dans la nuit de vendredi à samedi. Au cours de la journée de samedi, 130 personnes ont été interpellées dans toute la France dont 103 rien qu’à Paris, où 24 personnes ont été blessées. Parmi elles, cinq membres des forces de l’ordre.

De nombreux dégâts sur les Champs-Élysées

Le mot d’ordre était "toute la France à Paris". Et samedi, quelque 8.000 personnes, selon la préfecture, ont défilé dans les rues de la capitale, tentant de s’approcher des lieux de pouvoirs, l’Élysée en tête. Au moins 3.000 membres des forces de l’ordre étaient mobilisés au sein de la capitale.

Mais entre les pluies de pavés, les barricades, les gaz lacrymogènes et les véhicules incendiés, l’avenue des Champs-Élysées est rapidement devenue le théâtre de violents affrontements en manifestants et forces de l’ordre. Une devanture de café a d’ailleurs pris feu et des flammes de plusieurs mètres de haut ont aussi été observées sur l'avenue de la Grande Armée, derrière l'Arc de Triomphe.

À Paris, "les dégâts sont faibles, ils sont matériels, c'est l'essentiel", a estimé Christophe Castaner. Au niveau national, le ministre a noté "deux types de manifestants": ceux, en province, qui se sont mobilisés dans une ambiance "bon enfant" et ceux ayant commis des "actes graves" à Paris, mais aussi à Villefranche-sur-Saône, dans le Rhône, où des violences ont eu lieu.

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Photo AFP. 

Christophe Castaner cible l'extrême-droite

Au départ, les manifestants souhaitaient se réunir sur la place de la Concorde. Une demande refusée par la préfecture étant donné la proximité de l’endroit avec l’Élysée, l’Assemblée nationale et l’ambassade des États-Unis, note franceinfo. Les "gilets jaunes" se sont alors vu proposer de se réunir sur le Champ-de-Mars, au pied de la Tour Eiffel. Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a accusé Marine Le Pen d'avoir encouragé la présence de "séditieux" de l'ultra-droite parmi les manifestants des Champs-Élysées. "On voit une évolution du mouvement, à l'appel de Marine Le Pen, qui avait invité les manifestants à venir sur les Champs-Élysées", a-t-il notamment déclaré, affirmant que l'ultra-droite était en train de "monter des barricades". 

La présidente du Rassemblement national, qui s'était interrogée vendredi sur l'interdiction faite "au peuple français" de ne pas pouvoir manifester sur les Champs, n'a pas tardé à riposter. Sur BFMTV, Marine Le Pen a évoqué des accusations "indignes" et une "manipulation politique". D'après les informations d'Europe 1, les services spécialisés avaient bien repéré la présence de militants d'ultra-droite sur les Champs-Élysées, mais notaient également la présence de nombreux "gilets jaunes" au profil inconnu, très déterminés, équipés et vindicatifs.  

L'opposition accuse le gouvernement de décrédibiliser le mouvement

Outre Marine Le Pen, d'autres figures politiques ont accusé le gouvernement de tenter de décrédibiliser le mouvement des "gilets jaunes". Le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan a ainsi estimé que "les petites polémiques sur 15 imbéciles aux Champs-Élysées ne concernaient pas les Français". Le premier vice-président des Républicains Guillaume Peltier a lui jugé "tellement facile" de "réduire ce mouvement à certains agissements inadmissibles" au lieu de "nous écouter". 

À gauche, le leader de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon, a contesté la volonté, selon lui, de Christophe Castaner de faire croire que "la manifestation des 'gilets jaunes' soit d'extrême droite et peu nombreuse". "La vérité est que c'est la manifestation massive du peuple. Et ça, c'est la fin pour Castaner", a tweeté le député, qui participait à une autre manifestation contre les violences faites aux femmes.

Emmanuel Macron exprime sa "honte"

Samedi, en fin de journée, Emmanuel Macron s'est fendu d'un tweet pour exprimer sa "honte" face aux violences. "Merci à nos forces de l'ordre pour leur courage et leur professionnalisme. Honte à ceux qui les ont agressées. Honte à ceux qui ont violenté d'autres citoyens et des journalistes. Honte à ceux qui ont tenté d'intimider des élus. Pas de place pour ces violences dans la République", a twitté le chef de l'État.

Au cours de cette deuxième journée de mobilisation, certains médias ont à nouveau été pris pour cible. À Toulouse, des journalistes de Cnews et BFMTV ont été encerclés sur la place du Capitole alors que s'achevait une manifestation des "gilets jaunes", aux cris de "journalistes collabo". Ils ont porté plainte pour "violences en réunion" et "tentative d'agression en réunion". À Béziers, deux journalistes du Midi Libre ont déposé plainte pour dégradation de l'agence locale et des coups portés sur l'un deux. 

Des axes routiers perturbés à l’échelle nationale

Comme le week-end dernier, des points de blocage ont été observés sur tout le territoire, visant notamment des centres commerciaux et des axes routiers. Des barrages filtrants ont ainsi été mis en place sur plusieurs barrages de l'A7, de l'A8, au niveau de la frontière espagnole sur l'A9, de l'A10, A11, A20, A50, A52, A64n A66, A63, A81, A83, A87, A89, A837. A Marseille et à Dunkerque, des actions ont été signalées à proximité de centres commerciaux. 

>> CARTE : Les lieux de blocage du samedi 24 novembre

À Villefranche-sur-Saône, dans le Rhône, une opération "péage gratuit" avait été annoncée par les "gilets jaunes" sur l'A6 mais les manifestants ont été devancés par les gendarmes qui ont bloqué l'autoroute dès 6 heures du matin. À Bordeaux, malgré l'interdiction de la préfecture, plusieurs centaines de personnes ont tenté de s'approcher de l'Hôtel de ville mais ont été refoulées par les forces de l'ordre qui ont fait brièvement usage de gaz lacrymogène. Situation tendue à Limoges en revanche où des manifestants ont fait tomber des barrières installées autour de la préfecture, selon France Bleu Limousin. 

À Redon, en Ille-et-Vilaine, un automobiliste a forcé un barrage et foncé sur trois "gilets jaunes". Une personne a été blessée à la tête et aux côtes, selon la gendarmerie, tandis que les deux autres ont été blessées plus légèrement.