Patrick Pelloux déplore le retard pris par la campagne de vaccination. 2:00
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Antoine Terrel , modifié à
Sur Europe 1, l'urgentiste Patrick Pelloux a fustigé la stratégie du gouvernement face à l'épidémie de coronavirus, déplorant notamment la lenteur de la campagne de vaccination, mais aussi la mauvaise organisation au sein de l'administration. 
INTERVIEW

Malgré l'accélération de la vaccination et le durcissement des restrictions dans certaines zones, l'hypothèse d'un fort rebond de l'épidémie de coronavirus continue d'inquiéter les autorités sanitaires. Près de 4.000 malades se trouvent ainsi actuellement en réanimation, et la menace de saturation des hôpitaux est réelle en Ile-de-France. Une situation qui alarme Patrick Pelloux, le président de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf). Invité jeudi d'Europe 1, il a poussé un coup de gueule contre la gestion de la crise par le gouvernement. "On s'y est pris comme des guignols", s'agace-t-il, regrettant notamment le retard pris dans la campagne de vaccination. 

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"On s'y est pris comme des manches", martèle Patrick Pelloux, comparant la situation française à celle de nos voisins européens, notamment outre-Manche. "En Angleterre, ils se sont mis à vacciner massivement au mois de décembre, alors que nous, on a eu du retard à l'allumage. Et là, en Angleterre, ils ont cassé la courbe de contamination." 

Alain Fischer : "Une erreur de casting" 

Pour Patrick Pelloux, "il n'y a pas d'autre combat" que la vaccination de masse, dont il est un "fervent militant". L'invité d'Europe 1 reproche notamment au gouvernement de n'avoir pas commandé suffisamment de doses "parce qu'on s'est organisé vraiment n'importe comment", et regrette le choix d'Alain Fischer pour piloter la stratégie vaccinale, "une erreur de casting". "On aurait dû mettre soit un militaire, soit un responsable d'organisation humanitaire, qui sait parfaitement faire des vaccinations de masse dans les pays où il y a des épidémies."

Des médecins médiatiques "déconnectés de la réalité". Sur Europe 1, Patrick Pelloux a pris ses distances avec certains médecins qui plaident pour toujours plus de restrictions face à l'épidémie. "Ils sont déconnectés de la réalité et ils n'ont pas la globalité de la problématique. Ils regardent des courbes mathématiques, mais le virus n'est absolument pas mathématique", assure Patrick Pelloux. "Moi, je fais partie de ceux qui disent qu'il faut relancer la société de manière urgente parce que la crise sociale va être encore pire." 

"Il y a deux tendances dans la médecine", poursuit Patrick Pelloux. D'un côté, les médecins "qui disent qu'il faut contraindre la société, l'empêcher de vivre", et de l'autre "les médecins dont je fais partie, qui disent que la médecine est là pour accompagner des libertés". 

Et l'accélération de la campagne menée le week-end dernier ne rassure pas l'urgentiste. "Tout d'un coup, on a ouvert les frigos en disant aux gens 'on vous vaccine', mais en faisant une erreur stratégique et contradictoire avec les indications qu'ils nous ont données. Le vaccin qu'on doit donner aux malades les plus sérieux, le fameux Pfizer, on l'a donné dans les communes et dans les casernes de pompiers, et à l'hôpital, où on a les maladies les plus graves, on nous a donné l'AstraZeneca", s'énerve le médecin. "Ils se sont totalement gourrés."

"Une cacophonie"

Plus globalement, Patrick Pelloux déplore la mauvaise organisation au sein de l'administration. "Quand il y a une décision qui est prise, vous avez la Haute autorité de Santé qui fait quelque chose, puis Santé publique France qui fait autre chose. Puis vous avez le comité vaccinal qui fait autre chose. Vous avez le Comité scientifique qui donne son avis, puis la Direction générale de la Santé qui n'est pas d'accord (...) C'est une cacophonie." Et d'asséner : "C'est un scandale d'État en termes d'organisation de notre système de santé". 

Anticipant l'arrivée d'une troisième vague, Patrick Pelloux insiste sur l'importance "d'un plan massif sur la vaccination", et propose deux pistes pour accélérer. "Puisqu'on a la chance d'avoir enfin un président des États-Unis qui est correct, et vu les liens politiques qu'il y a entre les États-Unis et la France, il faut appeler immédiatement Joe Biden en disant qu'il faut que les laboratoires Pfizer nous fournissent", réclame-t-il. Deuxième piste : "Il faut réquisitionner les usines qui fabriquent des vaccins en France pour qu'on fabrique nos propres vaccins".