L'espérance de vie est plus faible à la campagne qu'en ville. 1:22
  • Copié
Europe 1 avec AFP , modifié à
Vivre à la campagne a des conséquences concrètes sur la longévité. Selon deux études demandées par l'Association des maires de France, l'espérance de vie à la campagne est de deux ans moindre à celle dans les villes. L'accès aux soins plus difficile est l'un des facteurs explicatifs de ce constat.

L'espérance de vie à la campagne est en recul par rapport à celle des citadins. De même l'accès aux soins y est plus difficile. Ce sont les résultats "faramineux", "spectaculaires" d'études sur la question, dont une rendue publique mercredi. Emmanuel Vigneron, professeur des universités à Montpellier, a réalisé deux études pour le compte de l'Association des maires de France (AMRF). Il y démontre que l'espérance de vie diminue depuis 30 ans à la campagne par rapport à la ville, après avoir révélé dans la première il y a une dizaine de jours que les ruraux accédaient moins aux soins hospitaliers que les citadins.

Deux ans d'espérance de vie en moins pour les ruraux

Deux études qui donnent une image pas vraiment bucolique de la campagne et assez éloignée de la vision idéalisée qu'ont pu avoir certains citadins souhaitant quitter les villes après le premier confinement. "Il vaut mieux que les citadins qui se disent qu'il serait chouette d'habiter à la campagne et d'y télétravailler ne mythifient pas trop le gazouillis des oiseaux", prévient Emmanuel Vigneron. "L'espérance de vie en prend un coup parce que l'on consomme moins (de soins) et on consomme plus tard. Il y a moins de médecin, les maladies peuvent devenir graves", prévient-il.

Son avertissement aux néo-ruraux potentiels se fonde sur "des inégalités qui se creusent dans le domaine de la santé" entre les habitants des villes et ceux de la campagne depuis une trentaine d'années, une tendance qui s'est même renforcée après la crise financière de 2008.  Son étude sur l'espérance de vie à la naissance, réalisée à partir de données statistiques de l'Insee, révèle que "les habitants du rural vivent deux ans de moins que ceux des villes". Selon ses résultats, les hommes sont les plus mal lotis avec 2,2 ans de moins d'espérance de vie à la naissance, contre 0,9 ans chez les femmes.

"Moins d'informations, moins de médecins"

Dans sa première étude, M. Vigneron avait conclu que les habitants du monde rural consommaient 20% de soins hospitaliers en moins que ceux des villes".  L'explication selon lui : "Parce qu'on est loin, parce qu'on a moins d'informations, parce qu'il y a moins de médecins", assure-il.

Pour Dominique Dhumeaux, 1er vice-président de l'AMRF et maire de Fercé-sur-Sarthe, localité de 600 habitants située dans le département de la Sarthe, ces études confirment "une réalité" qu'il perçoit sur le terrain et que les maires ruraux ont du mal à faire comprendre aux autorités.   

Des études pour "alerter les politiques"

Il craint d'ailleurs que la dégradation ne se poursuive au cours des prochaines années avec l'augmentation des déserts médicaux en raison de nombreux départs à la retraite des généralistes. "Il est évident que dans les trois ou quatre ans, les chiffres démontreront que l'espérance de vie se sera encore dégradée à la campagne par rapport à la ville", prévoit-il, assurant que le but de cette étude est "d'alerter les politiques" sur la situation de la santé dans les zones rurales.

M. Vigneron espère, pour sa part, que ses études "servent à poser les problèmes un peu différemment et à les traiter".  Et, souligne-t-il, "je serais ravi que les agences régionales de santé (ARS), dont la mission consiste à réduire les inégalités et à lutter contre elles, s'emparent du sujet pour développer des politiques de prévention particulières à la campagne".