Coronavirus : "Le confinement a réduit le taux de transmission de 84%", annonce un épidémiologiste

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Mathilde Durand , modifié à
Une nouvelle étude de l'Institut Pasteur révèle que 5,7% de la population française a été contaminée par le coronavirus, loin des 70% espéré pour atteindre l'immunité collective. En revanche, grâce aux effets du confinement, le taux de transmission a été réduit de 84%, décrypte sur Europe 1 Simon Cauchemez, épidémiologiste. 
INTERVIEW

Une étude de l'Institut Pasteur, en collaboration avec Santé Publique France et l’Inserm, révèle mardi que 5,7% de la population française a probablement été contaminée par le coronavirus. L'immunité collective, estimée à 70%, est donc encore loin. En revanche, le taux de transmission du virus a diminué de 84% grâce au confinement. Simon Cauchemez​, épidémiologiste modélisateur à l'Institut Pasteur et membre du comité scientifique qui conseille le Président de la République, revient sur cette étude au micro d'Europe 1. 

Un R0 en baisse : les effets du confinement 

"On est à 6% au niveau national, plutôt 12% en Ile-de-France ou Grand Est, les zones très touchées", précise-t-il. "L'enseignement c'est qu'on est loin de l'immunité collective dont on aurait besoin pour lever toutes les mesures." Le seuil de cette dernière nécessaire pour éviter une seconde vague en levant toutes les mesures est estimé à 70%. "Même si c'était 10, 15 ou 20%, cela ne changerait pas le problème. On serait très loin de cette cible des 70%", souligne Simon Cauchemez. Le nombre de patients sans symptômes soulève encore des incertitudes, 20 à 40% des personnes contaminées selon les différentes études. 

Autre indicateur important révélé par cette étude : le R0, le nombre de reproduction de base, c’est-à-dire le nombre de personnes qu'un malade contamine. Selon cette étude, ce R0 est actuellement de 0,5, alors qu’il était de 3,3 avant le confinement. Actuellement 10 malades contaminent ainsi en moyenne cinq personnes, grâce aux effets du confinement. "C'est vraiment une bonne nouvelle qu'on ait réussi à réduire le taux de transmission de 84%", se réjouit Simon Cauchemez. "C'est ça qui explique qu'on soit passé de 700 admissions en réanimation par jour fin mars à, deux semaines plus tard, plutôt admissions par jour. Le confinement a eu un impact énorme sur ces admissions en réanimation." 

Une baisse des admissions en réanimation espérée 

Avec les modélisation réalisées, les chercheurs considèrent qu'il devrait y avoir entre 10 et 45 admissions par jour en réanimation au 11 mai. "Ce sont les cas graves, en revanche on considère qu'il y aura plus de personnes infectées sur le territoire à ce moment-là, plutôt entre 1.000 et 3.000 cas", précise Simon Cauchemez. "Si on continue à suivre la tendance observée actuellement, on espère bien que le nombre d'admission va continuer à décroître." 

"La difficulté qu'on a pour bien comprendre cette épidémie c'est que l'on voit la partie immergée de l'iceberg. Beaucoup de personnes infectées ont des symptômes peu sévères et qui ne vont pas être détectées par nos systèmes de surveillance", rappelle l'épidémiologiste. Le principe de la modélisation réalisée par l'Institut Pasteur sert à interpréter différents indicateurs pour se projeter dans le futur du virus.

 

Un effort à maintenir après le 11 mai

"Si on voit 100 morts en France, d'une part, et que d'autres part on a des données qui décrivent la probabilité de décéder lorsqu'on est infecté, en combinant ces deux données on va être capable de reconstruire l'histoire de l'épidémie en France", explique-t-il. Pour déterminer la probabilité de décéder du virus, les scientifiques s'appuient sur des enquêtes réalisées, par exemple, sur les bateaux de croisière.

 

 

Un nouveau rapport va être remis au gouvernement sur le déconfinement, prévu à partir du 11 mai de manière progressive. "Lorsqu'on va en sortir, il faut bien comprendre qu'on ne va pas retrouver nos vies normales. Il va falloir qu'on maintienne des mesures fortes : continuer gestes barrières etc mais il va falloir avoir une stratégie intensive pour identifier les cas, les isoler... C'est un effort énorme qu'il va falloir maintenir au-delà du 11 mai".