Un "grand débat" qui a mis en lumière les petits candidats à la présidentielle

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Antonin André, chef du service politique d'Europe 1
Le "grand débat" de la présidentielle a permis de découvrir les petits candidats, pour le reste ce n’était pas très éclairant.

Un capharnaüm souvent incompréhensible, des interventions saccadées, et pas de vrai débat. La seule vertu de cette rencontre entre les onze candidats, là où le contrat est rempli, c’est sur la mise en lumière des petits prétendants à l’Elysée. Parfois par des interventions baroques de Jacques Cheminade ou de François Asselineau, mais aussi avec un moment de vérité : lorsque Philippe Poutou et Nathalie Arthaud s’en prennent à François Fillon et Marine Le Pen.

La fracture entre deux France. Ce débat a vu apparaître la fracture entre  deux mondes, la France des petits, au sens sociologique et juridique du terme, celle des caissières virées pour récupérer quelques bons d’achat et la France des puissants qui profitent du système et apparaissent beaucoup plus épargnés. La France aussi des syndicalistes qui, à l’inverse de Marine Le Pen, n’ont pas d’immunité et répondent aux convocations des juges. On a vu éclater l’expression d’une colère d’un pays réel, d’en bas que François Fillon ou Marine Le Pen ne voient, n’entendent pas, ne fréquentent pas. C’était violent et sincère et ni Marine Le Pen au regard incrédule, ni François Fillon n’ont d’ailleurs su comment y répondre.

Le favori mal à l'aise.Emmanuel Macron a dû une fois encore se défendre. Le favori - présenté comme tel dans les sondages - a été le plus attaqué. Il s’y attendait mais il n’était pas toujours à l’aise. Quand Nicolas Dupont-Aignan l’interrompt – "Je ne comprends pas ce que vous dites" -, quand Marine Le Pen sous-entend que les journalistes viennent à son secours, Emmanuel Macron est apparu en difficulté. Même François Asselineau le tacle : "De toute façon, vous êtes toujours d’accord avec tout le monde". Ça abîme et ça énerve. Emmanuel Macron a eu du mal à garder ses nerfs parfois, et lorsqu’il développe ses sujets, il y a toujours une fragilité, une interrogation sur sa capacité à endosser le costume. Il n’était par exemple pas très clair ou convainquant sur les questions internationales et la lutte contre le terrorisme.

Un exercice dangereux pour les poids lourds du scrutin. Un second débat du même type, en théorie prévu le 20 avril sur France 2, parait désormais peu probable. D’abord ça ne sert à rien, certainement pas à évaluer et choisir entre les projets. Et puis, les grands candidats ont beaucoup trop à perdre. François Fillon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron n’ont aucune raison, à trois jours du premier tour à servir de faire-valoir ou de punchingball aux petits. Le seul parmi les grands qui pourrait encore engranger, c’est Jean-Luc Mélenchon qui, une fois de plus, a excellé dans l’exercice.