Présidentielle : la menace terroriste peut-elle changer la donne ?

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Antonin André, chef du service politique d'Europe 1
La menace terroriste vient bousculer la présidentielle et offre un nouvel angle d'attaque aux candidats à quelques jours du premier tour.

La menace terroriste vise aussi les candidats. C’est le fait marquant de la dernière semaine de campagne. L'événement qui laisse la dernière impression dans le cerveau de l’électeur. Souvenez-vous de papy Voise, le 18 avril 2002, à trois jours du premier tour : ce vieux monsieur au visage tuméfié après une agression apparaît à la une du 20 heures. L’insécurité s’invite dans l’isoloir, et Jean-Marie Le Pen élimine Lionel Jospin. En 1988, à trois jours du second tour de la présidentielle, c’est la prise d’assaut de la grotte d’Ouvéa en Nouvelle-Calédonie, dix-neuf Kanaks et deux militaires sont tués. Le président François Mitterrand joue l’opinion et souligne "le bilan douloureux", Jacques Chirac, Premier ministre, salue lui "le succès de l’opération militaire", et se voit largement battu à la présidentielle.

Capitaliser sur un climat anxiogène. Sans pouvoir la quantifier, la part de ces événements peut jouer dans le résultat final. Il est impossible pour les électeurs de s’en abstraire totalement. Certes, il n’y a pas eu d’attentats, il ne s’agit pour l’heure que d’une menace, mais qui suffit à créer un climat anxiogène, dont les candidats eux-mêmes vont tenir compte pour les derniers jours.

L'outrance frontiste. Car le climat actuel, c’est la menace terroriste, mais aussi les bruits de bottes en Corée du Nord et le durcissement du régime Turc. Tout cela, les candidats en tiennent compte, voire l’instrumentalise. Marine Le Pen joue sur la peur, quand elle annonce qu’elle veut interdire l’immigration légale lundi soir, elle est déjà informée de la menace terroriste. On est dans la surenchère : "Avec moi, il n’y aurait pas eu de Mohammed Merah, il n’y aurait pas eu les terroristes migrants du Batclan". La récupération politique frise l’outrance.

Trouver une crédibilité face à la menace. François Fillon, à l’inverse, fait dans la sobriété, il s’appuie sur son expertise déclinée dans un livre, Vaincre le totalitarisme islamiste. Il mise sur le calme et le sang-froid du responsable politique qui ne "change rien à sa campagne". L’équation est plus délicate pour Emmanuel Macron : sur la sécurité et l’international, il ne bénéficie pas de l’expérience du candidat de la droite mais il a un atout à travers le soutien de Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense avec qui il doit s’afficher mercredi soir à Nantes. L’enjeu pour chacun est celui de la crédibilité dans un contexte terroriste qui avait jusqu’ici été peu présent dans la campagne.