Présidentielle : ce que la montée du "ni-ni" nous dit d'une élection inédite

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Antonin André, chef du service politique d'Europe 1 , modifié à
Le "ni-ni" monte. La tentation abstentionniste gagne notamment les lycéens. Le mouvement n’est pas très étendu, mais à Toulouse et à Paris certains défilent dans les rues au cri de "ni Le Pen, ni Macron". 

"Ni patrie, ni patron", "Marine, Macron, même combat". L’élection 2017 sera-t-elle celle de la génération "ni-ni" ? Celle d’une jeunesse pour laquelle Marine Le Pen et le FN ne représentent plus une menace contre laquelle il faut se dresser. Une jeunesse qui nourrit la même aversion pour le banquier que pour la nationaliste, à l’image de Jean-Luc Mélenchon pour lequel elle a majoritairement voté.

Une dédiabolisation réussie ? À cet égard, 2017 marque une rupture. En 1988, Jean-Marie Le Pen obtient 14% à la présidentielle, un record pour l’époque. Les lycéens reprennent dans les manifs le refrain du groupe rock Bérurier Noir : "La jeunesse emmerde le Front National". En 2002, le 22 avril au matin ce sont les jeunes qui prennent la rue les premiers. Mais en 2017, ils manifestent pour défendre le droit de ne pas choisir. Marine Le Pen ne leur fait pas peur ; ils ont grandi avec un Front National élevé, installé dans la vie politique. C’est le signe de la dédiabolisation réussie engagée par la fille de Jean-Marie Le Pen.

La fin du front républicain. Au-delà de la jeunesse, le "ni-ni" est défendu par une partie de la gauche et une partie de la droite. La pudeur de gazelle de Jean-Luc Mélenchon est emblématique de cette élection. Il faut se souvenir de la gauche s’indignant quand la droite ergotait sur le front républicain. Il faut se souvenir du cordon sanitaire instauré par Jacques Chirac en 1986, pour marquer la frontière infranchissable entre la droite et l’extrême droite. Qu’est-ce qui a changé ? Ce qui a changé c’est que les candidats des partis institutionnels, du PS et de la droite, ont été balayés, et que leurs électorats sont perdus.

 

La peur de l'inconnu. Emmanuel Macron a l’attrait du renouveau, ce qui a fait sa force au premier tour. Mais il en a aussi les faiblesses, ce qui constitue son handicap au second tour. Il ne rassure pas parce qu’il est inconnu. La gauche n’aimait pas Chirac mais elle le connaissait, son histoire, sa vision. Voter Macron, c’est pour une partie des Français se lancer dans une aventure. La conséquence de ce "ni-ni" galopant, c’est le risque d’une abstention plus forte au second tour qu’au premier, comme c’est arrivé une seule fois sous la 5ème République, en 1969, où l’abstention avait bondi de 9 points entre les deux tours.