Le RN vainqueur des européennes ? "Sur un plan strictement politique, le résultat est plus compliqué", répond Jean-Michel Aphatie

  • Copié
Jean-Michel Aphatie, édité par Marthe Ronteix , modifié à
Au lendemain de la victoire du Rassemblement national aux élections européennes, devant la liste LREM-MoDem, l'éditorialiste d'Europe 1 Jean-Michel Aphatie se penche sur les bénéfices que Marine Le Pen peut en tirer.

>> Le Rassemblement national est arrivé en tête des élections européennes de dimanche avec 23,31% des suffrages, devant la liste LREM-MoDem (22,41%). Les deux partis auront le même nombre de députés, 23, au Parlement européen après le Brexit. Au lendemain du scrutin, l'éditorialiste Jean-Michel Aphatie se projette vers l'avenir et décrypte comme Marine Le Pen, la présidente du RN, peut surfer sur sa victoire.

>> De 7h à 9h, c’est deux heures d’info avec Nikos Aliagas sur Europe 1. Retrouvez le replay ici

"Cette victoire est-elle un nouveau départ pour Marine Le Pen ? Elle a envie de le croire. Elle a quelques raisons d'y croire. D'abord c'est une victoire symbolique par rapport à la photographie du premier tour de l'élection présidentielle : le RN redevient le premier parti de France. Et cette campagne a permis à Marine Le Pen de gommer l'effet négatif du débat de l'entre-deux-tours de la présidentielle. Elle s'est réinstallée à la tête de son parti, sans pouvoir être contestée, et cette élection européenne l'authentifie.

Sur un plan strictement politique, le résultat est plus compliqué. Par rapport aux élections européennes de 2014, le RN (ex-Front national) progresse, mais en pourcentage de suffrages exprimés, il régresse d'environ 1,5 point. Donc il n'y a pas d'apport par exemple des 'gilets jaunes'. Le RN ne capte pas vraiment ceux qu'Emmanuel Macron a pu décevoir notamment à la droite de l'échiquier politique. Marine Le Pen a déclaré dimanche soir 'Nous sommes le parti de l'alternance'. C'est un parti qui plafonne à 24%, un quart de l'électorat, et qui n'a aucun allié pour aller au-delà. Comment arrive-t-on au pouvoir ? C'est l'éternelle question du Rassemblement national. Et on ne peut pas dire pour l'instant que Marine Le Pen ait trouvé la réponse.

Du côté d'Emmanuel Macron, c'est l'inverse. Il y a une défaite symbolique évidente : le parti du président n'est plus le premier parti. Deux ans après son installation à l'Élysée, c'est un échec. Mais il n'y a pas de défaite politique parce que l'écart avec le Rassemblement national n'est pas très important [0,9 point], donc Emmanuel Macron n'est pas obligé de modifier son dispositif politique. François Hollande en 2014 avait dû changer de Premier ministre. Ça ne va tout de même pas être facile de mener l'action. 

Il y a un échec patent, celui des sondeurs. Car ils n'ont pas vu que François-Xavier Bellamy, la tête de liste Les Républicains, serait dans le trou. Les sondeurs lui accordaient 13%, or on est à 8,48%, jamais la droite n'a fait un aussi mauvais score. François-Xavier Bellamy était à la fois le candidat choisi par Laurent Wauquiez et celui qui exprimait le mieux sa ligne conservatrice. Dans la logique, Laurent Wauquiez ne peut pas rester président des Républicains.

Pour Yannick Jadot, qui a conduit la liste EELV, les sondeurs n'ont rien vu non plus. Le parti a fait 13,42%. La particularité des écologistes est qu'ils ne sont pas dans la culture politique française. Ils ne savent pas fabriquer un candidat à l'élection présidentielle et ne savent donc pas quoi faire de leur succès aux élections intermédiaires. En 2009, Daniel Cohn-Bendit avait 17% des voix, en 2012, la candidate écologiste a fait 2% des voix à l'élection présidentielle. EELV, on se demande à quoi ils servent à part à défendre l'écologie.

Enfin, il y a l'échec de Jean-Luc Mélenchon. En quittant le Parti socialiste, son objectif permanent a été d'être toujours devant. Or dimanche, il a terminé à 6,31% avec une très courte avant sur le PS. De tous les acteurs des élections européennes, ce doit être celui qui a le plus mal à la tête ce matin."