Frappes en Syrie : à gauche comme à droite, l'intervention française divise

Plusieurs personnalités politiques ont dénoncé samedi un alignement sur la politique américaine.
Plusieurs personnalités politiques ont dénoncé samedi un alignement sur la politique américaine. © JOEL SAGET / AFP - Montage Europe1
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Antoine Terrel avec AFP , modifié à
Dénonçant l'absence de consultation des élus, de mandat de l'ONU, ou l'alignement sur les Etats-Unis, plusieurs personnalités politiques ont condamné les frappes françaises en Syrie. 

La décision d'Emmanuel Macron d'impliquer la France dans des frappes en Syrie, menées conjointement avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni, est loin de faire l'unanimité dans la sphère politique. Christophe Castaner, délégué général de La République en marche, a rappelé la "ligne rouge" que constituait le recours aux armes chimiques, et estimé que "la France ne pouvait se tenir aveugle et muette face à cette barbarie".

Une position suivie par Manuels Valls, invité du Grand Rendez-vous d’Europe 1/Cnews/Les Échos, qui à affirmer que "ne rien faire en Syrie, c'était signer notre impuissance". En revanche plusieurs personnalités politiques ont dénoncé samedi un alignement sur la politique américaine, l'absence de mandat onusien, ou encore l'absence de consultation du parlement français. 

Le PS apporte son soutien, pas la France insoumise. À gauche, seul le PS semble se montrer conciliant avec la décision du chef de l'Etat. Le nouveau premier secrétaire du parti, Olivier Faure a estimé pour sa part que "les attaques chimiques répétées du régime de Damas contre son peuple imposaient une réaction". "Il est urgent que s'ouvrent de nouvelles discussions dans le cadre des Nations-Unies", a-t-il néanmoins averti. "Il n'est pas de solution à terme sans que soient posées les conditions d'une transition négociée". 

Ancien candidat du PS à la présidentielle, et désormais à la tête de son mouvement Génération.s, Benoît Hamon juge lui aussi que "même unilatérale, une frappe ciblée, proportionnée, claire dans son sens, pose une limite salutaire". L'ancien ministre s'inquiète néanmoins de "l'absence de vision du président de la République", rappelant la nécessité d'un mandat de l'ONU.

Mais Hamon et le PS sont bien seuls à gauche. Du côté de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une intervention "sans preuve, sans mandat de l'ONU et contre elle, sans accord européen, et sans vote du Parlement français". Le député des Bouches-du-Rhône a également accusé la France de participer à une "aventure de revanche nord américaine, une escalade irresponsable". 

Dans les colonnes de La Montagne, l'ancien président de la République François Hollande a lui estimé que les frappes étaient "justifiées", mais devaient être suivies d'une "pression diplomatique et politique" sur Moscou et Téhéran.

Le FN condamne une "erreur majeure". Marine Le Pen a également évoqué "une erreur majeure", et pointé l'alignement de la France sur les Etats-Unis de Donald Trump. Pour la présidente du Front national, la France "est le jouet d'une reprise en main des Etats-Unis au travers de l'OTAN". "Chaque président veut sa petite guerre", a-t-elle ajouté sur Europe 1, avant de prévenir : "Sauf que [ces conflits] ont des conséquences très lourdes. [Ils] renforcent l'État islamique et déstabilisent totalement des pays en entraînant des vagues migratoires majeures dont l'Europe, et la France en particulier, sont immédiatement les victimes".

Wauquiez tâcle, LR condamne. À droite, les réactions sont partagées entre les partis et personnalités proches du centre et soutiens de la politique d'Emmanuel Macron. "Je ne crois pas à l’utilité de frappes punitives", estime Laurent Wauquiez dans les colonnes du JDD. "Frapper pour frapper, pour donner le sentiment de faire quelque chose, sans qu’il y ait une quelconque stratégie derrière, je n’en comprends ni l’utilité, ni le sens". Pour le chef de file des Républicains, "la priorité du président à l’international doit être de lutter contre les islamistes".

"Ce n'est pas à la lutte terroriste de s'adapter au droit, mais au droit de s'adapter à la lutte contre le terrorisme. Aujourd'hui, nous faisons comme si nous n'étions pas en guerre alors que nos ennemis nous font la guerre. Emmanuel Macron persiste dans l'aveuglement", a-t-il ajouté sur Twitter.

"C'est l'honneur de la France d'être à la hauteur du rôle singulier et historique qui est le sien et d'avoir pris l'initiative, au côté des démocraties américaine et britannique, d'exercer des frappes aériennes ciblées sur l'arsenal chimique syrien", a déclaré dans un communiqué le président de l'UDI Jean-Christophe Lagarde.  

Franck Riester, l'un des fondateurs d'Agir, a lui annoncé que le mouvement des "constructifs" soutenait également les frappes. Un soutien également affirmé par l'ancien ministre du Travail Xavier Bertrand, qui a quitté LR en décembre, saluant une "réponse juste" .

Au sein de LR en revanche, rares sont les membres à saluer la décision présidentielle. Julien Aubert, député du Vaucluse et secrétaire général adjoint du parti, juge que "la France d'Emmanuel Macron n'est pas du côté du droit". Et beaucoup pointent le risque d'un renforcement du risque terroriste, comme Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, qui craint que les frappes "renforcent (...) les islamistes de Daech".

Pour Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat : "cette démonstration de force ponctuelle risque d'alimenter le terrorisme". "Emmanuel Macron aligne la diplomatie de la France sur celle de Donald Trump", ajoute également le sénateur de la Vendée.