Visite de Netanyahou à Paris : les limites du "en même temps" d'Emmanuel Macron

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Vincent Hervouët
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou poursuit mardi à Paris son offensive pour tenter de créer un front commun contre l'Iran. Une rencontre qui risque de souligner les limites de la politique d'Emmanuel Macron sur le Proche-Orient, analyse Vincent Hervouët, l'éditorialiste international d'Europe 1.
EDITO

Benyamin Netanyahou et Emmanuel Macron inaugurent mardi soir au Grand Palais "L'année culturelle croisée", une série de manifestations en France et en Israël à l'occasion des 70 ans de l'état hébreu.

Le contexte a changé. Le rendez-vous a été pris il y a plus de cinq ans. À l'époque, François Hollande essayait d'être président. Donald Trump, lui, faisait de la téléréalité. Un bon entraînement. En clair, le monde était différent. "L'année culturelle croisée" devait être l'occasion de montrer ce que les Français et les Israéliens ont en commun. Mais avec Israël, cela ne marche jamais… Il y a toujours la guerre qui vient. L'histoire impose son tragique, et les diplomates leurs manigances. Dès lors, on laisse de côté la culture et la musique techno pour la musique militaire. En tête-à-tête, Benyamin Netanyahou et Emmanuel Macron doivent parler de l'Iran, de l'Iran et de l'Iran…

La politique du dos-à-dos. En revanche, les deux dirigeants pourraient ne pas aborder la question de Gaza et des Palestiniens. Il y a un an, Paris a réuni une conférence sur la paix au Moyen Orient, à laquelle ont participé 70 pays, mais pas les protagonistes. Ni Mahmoud Abbas, ni le Hamas et aucun représentant israélien. Comme une partouze diplomatique mais totalement platonique. La SDN (Société des Nations) réinventée par Jean-Marc Ayrault, sans le génie d'Albert Cohen. 

Sur la question palestinienne, le quai d'Orsay fait du Macron depuis toujours, avant même que Macron n'existe. Le ministère défend le droit d'Israël à la sécurité, et "en même temps", le droit des Palestiniens à un État. Mais renvoyer dos à dos n'est plus une politique équilibrée, juste une posture. Car Rabin est mort, Arafat est mort, Shimon Peres est mort, le roi Hussein est mort, et Bill Clinton écrit des romans policiers. Le seul témoin qui reste sur scène, c'est Netanyahou. Celui qui a gagné le pouvoir deux ans après s'est employé à démonter le processus, pièce par pièce, colonie par colonie… Bref, Oslo est mort, le terrorisme islamiste bien vivant et la France ne veut pas le savoir.

L'Iran au cœur des préoccupations. Cependant, sur la question iranienne, la France joue les premiers rôles. D'où l'intérêt de Benyamin Netanyahou. Il existe un pacte des Américains, des Arabes, et des Israéliens pour maintenir l'Iran la tête sous l'eau. Pour augmenter la pression sur Téhéran, ils ont misé sans le dire sur un changement de régime, en réclamant le contrôle permanent du nucléaire et du balistique et l'abandon de toute influence régionale. Autant réclamer la capitulation des mollahs ou leur conversion à la vraie foi. 

Au-delà des vociférations, les Français qui tentent de sauver l'accord sur le nucléaire veulent connaitre les mesures concrètes attendues. Emmanuel n'aura jamais de "bromance" avec Bibi, mais leur tête-à-tête d'une heure et demie pourrait être moins stérile que les scènes de ménage avec Donald Trump.