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Tous les samedis et dimanches, Vanessa Zhâ et Marion Sauveur nous font découvrir quelques pépites du patrimoine français. Aujourd'hui, nous partons au sud de la région parisienne, pour une escale dans le département du Loiret, à Orléans.

Ce matin, on part en balade du côté du Loiret. Et avec vous Vanessa, on découvre la plus vaste forêt domaniale de France.

La forêt d’Orléans, qui s’étend sur 35.000 hectares. Elle regroupe trois massifs : le massif d’Orléans, d’Ingrannes et de Lorris. Ce qui forme une sorte de grand arc au nord de la Loire. On est entre Orléans et Gien.

Et donc en effet, on part découvrir cette forêt, je dirais même plutôt l’explorer, en pratiquant du Bushcraft : un stage un peu particulier qu’a concocté Philippe Boiron de l’Appel des forêts. "C'est la technique qui permet de vivre dans les bois avec le moins de matériel possible. On s'appuie sur plein de savoirs techniques : s'orienter avec une boussole ou avec les étoiles quand le ciel est clair, savoir faire du feu et une cuisine de camp, apprendre à potabiliser l'eau, connaitre les techniques des noeuds et de secours... C'est infini tout ce que l'on peut apprendre dans la nature."

Vous le sentez, l’appel de la forêt ? Deux jours pour survivre, ça devrait quand même être possible, surtout avec une brosse à dents "made in" foret. Interdiction de venir avec votre brosse à dents, vous allez la confectionner sur place, avec une branche de pin d’un centimètre de diamètre. On mâche le bout, pour écraser les fibres : ça fait un pinceau. L’avantage, c’est que ça contient des terfennes, des substances désinfectantes et aromatiques. 

Et les surprises ne s’arrête pas là : Marion, comme vous mangez des plantes sauvages qui ont des vertus alimentaires, Philippe vous apprend à reconnaître les orties, la berce, les champignons médicinaux, le polypore du bouleau, mais aussi les plantes médicinales.

Cette forêt a-t-elle une biodiversité particulièrement riche par rapport à d’autres ?

Oui, parce qu’il y a pas mal d’espaces aquatiques (des lacs, des gouffres, des sources), donc il y a des essences qui ont quelques fois des âges assez vertigineux. Il y a aussi un grand nombre d’espèces végétales, plus de 700, dont 30 plantes rares sur le plan national. Et beaucoup plus encore d’espèces d’oiseaux que dans le reste des forêts en plaine, près de 200, dont le balbuzard pêcheur qui y a niché pour la première fois en France, d’où ils avaient disparu.

Et puis, cette forêt d'Orléans a une autre richesse : elle garde des traces de l’histoire, des résistants de la Seconde guerre mondiale qui y ont trouvé refuge en exploitant justement toutes les ressources dont je vous parlais. Petit conseil : téléchargez l’application de l’Office national des forêts. Elle vous guide pour découvrir ce pan de l’histoire, le carrefour d’Orléans, le carrefour de la résistance où sont alignées des croix blanches en guise de commémoration.

Vous avez d’autres activités à nous proposer ? 

Traverser cette partie du Loiret au fil de l’eau, du Loing, réemprunter quelque part le trajet des mariniers, entre le Canal d’Orléans et le canal de Briare. Vous pouvez même louer des bateaux sur le Canal de Briare. Pratiquer l’aviron au club de Montargis, une énième petite Venise.

Et pour dormir, on reste sur l’eau : on dort sur une toue cabanée, le bateau atelier à Meung-sur-Loire. Il organise aussi des sorties accompagnées. Si vous préférez dormir sur la terre ferme, j’ai un lodge entre Orléans et Montargis. Là, vous dormez au plus près de la plus grande meute de loup d’Europe au milieu de nulle part.

Marion, quelle spécialité orléanaise voulez-vous nous faire découvrir ? 

Un condiment : le vinaigre. Orléans a été pendant longtemps la capitale du vinaigre, grâce à la Loire. À la Renaissance, Orléans était le plus important port fluvial. Les marchandises étaient acheminées en bateau du Sud de la France ou de la Bourgogne sur la Loire pour atteindre Paris. Elles étaient triées à Orléans, et notamment le vin qu'on transportait en barrique. Lorsque le vin était piqué un peu aigre, il était mis de côté. De ce vin piqué, on en a fait du vinaigre, et c'est comme ça que sont nés les vinaigriers. Un véritable savoir-faire s'est développé à Orléans.

Et en 1580 le roi définit par lettre patente les fondements de la méthode de fabrication du vinaigre de Orléans. Il y a eu 300 vinaigriers dans la ville. Orléans fournissait 80% des besoins du pays en vinaigre. Aujourd’hui, de cette période il ne reste qu'un seul vinaigrier à Orléans : la maison Martin-Pourret qui continue de réaliser du vinaigre avec la méthode traditionnelle d'Orléans.

C'est quoi cette méthode orléanaise ?

Simplement laisser faire le temps au temps, comme nous l'explique Pierre-Olivier Claudepierre, co-dirigeant de la maison Martin-Poureet. "Si vous voulez faire du bon vinaigre, il vous faut du bon vin. Il y a toute une partie du choix des vins qui est réalisée en collaboration avec nos maîtres vinaigrier. Ensuite, la fabrication du vinaigre d'Orléans se décomposent en deux phases : une première de fermentation, donc on va transformer le vin en vinaigre dans des fûts de chêne de façon lente et naturel, et le vinaigre qui sortira de nous futs sera ensuite vieilli à minima pendant un an dans ce qu'on appelle des foudres, d’énormes fûts en chêne." Comme le vin, le vinaigre va vieillir en cave.

 

C’est une fermentation naturelle de surface sans aucun brassage du liquide, ni ajout de ferments ou autres accélérateurs d’oxydation qui permet la fermentation en trois semaines. Le vinaigre est conservé à l’abri de la lumière à une température constante de 30 degrés, avant d’être vieilli en fûts en cave au moins un an. Le vinaigre industriel est généralement réalisé en 48 heures.

Quelles différences a-t-on entre un vinaigre classique et un vinaigre d’Orléans ?

 On a un parfum, une rondeur et un équilibre. Chez Martin-Pouret, ils utilisent des vins français : pour le vinaigre de vin rouge, vin du Languedoc ; pour les vinaigres de vin blanc, vins de Loire. Ils font vieillir leurs vinaigres, ce qui va leur développer, comme pour les vins, leurs parfums et leurs arômes. Bientôt un 20 ans d’âge qui donnera un vinaigre plus rond, avec des arômes de fruits confits et brioche grillée. 

Des visites sont organisées à la vinaigrerie pour découvrir l’univers par l’office de tourisme d’Orléans. Réservations obligatoires. Prochaine visite : le 7 avril. 8 euros par personnes.

Comment cuisine-t-on ce vinaigre ? 

Je vous propose de faire un poulet au vinaigre. 

 

Ingrédients

  • Un poulet en morceaux
  • 4 échalotes 
  • Vinaigre de vin rouge 
  • Pulpe de tomate 
  • 50 g de beurre 
  • 10 cl de bouillon de volaille 
  • Estragon 
  • Sel 
  • Poivre 

Faire rôtir le poulet avec le beurre dans une cocotte. Faire dorer d’abord sur le feu : démarrer côté chair. Quand le poulet est doré, terminer la cuisson au four 10 minutes à 180 degrés (15 minutes pour les cuisses et les ailes). 

Pendant ce temps-là, réaliser une sauce. Emincer les échalotes. Les faire revenir dans du beurre. Lorsqu’elles sont dorées, les déglacer en trois fois avec le vinaigre. Quand elles sont confites, ajouter la pulpe de tomates, un peu de beurre et le bouillon de poule. Ajouter le poulet et laisser cuire quelques minutes dans cette sauce onctueuse, qui va se gorger du gras de la viande.  

Parfait avec un vin jeune du Languedoc, un Grés de Montpellier : fruité.

Si on ne veut pas cuisiner et que vous êtes de passage à Orléans. 2 adresses :