"Kim Jong Un vole la vedette à son voisin du sud"

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"Clauss toujours". L'humeur de François Clauss, tous les samedis et dimanches matins à 8h55 sur Europe 1.

Bonjour François.

Bonjour Wendy, bonjour à tous et toutes.A une semaine de la cérémonie de clôture, je vous donne déjà ce matin le nom du vainqueur des JO, Wendy. Kim Jong Un, le président nord-coréen. Celui que les Chinois surnomment "Fat Kim Boy" a gagné, à se demander si les jeux n'étaient pas organisés 80 kilomètres au nord, derrière le 38 ème parallèle, à PyongYang plutôt qu'à Pyeyongchang.

Victoires diplomatique et médiatique éclatantes, comme une symphonie en quatre temps parfaitement orchestrée. Nous eûmes la séquence émotion avec une délégation commune nord et sud coréenne pour allumer la flamme lors de la cérémonie d'ouverture et mieux incarner le rêve de paix olympique. 

Nous eûmes la séquence diplomatique, avec la sœur Monsieur Kim en "Madame bons offices", porteuse d'un message de paix. Nous eûmes la séquence sportive, avec le premier but de l'équipe féminine commune de hockey sur glace contre le Japon avec une tribune de presse bondée, chargée de couvrir "le but de l'histoire", en oubliant presque que l'équipe sera balayée 4-1 à l'arrivée.

Et nous eûmes la séquence médiatique. Cette improbable armée rouge de 230 pom-pom girls au sourire figé, dans une chorégraphie d'un autre temps que l'on croirait sortie d'un vieux poste de télévision Schneider des années 60, à l'image tremblotante. Mais la toile est envahie.

Oui, ce gros benêt, que l'on croirait issu d'une bande dessinée, si grotesque et si effrayant se révèle très fin diplomate, phagocytant l'événement volant la vedette à son voisin du sud honni. Oui, depuis 1953 la Corée du Nord ne supporte pas de voir son voisin triompher, de voir son voisin exister. 

Souvenez-vous : Séoul 88, JO d'été. A moins de six mois de la cérémonie d'ouverture, un Boeing de la Korean Airlines explose au-dessus du Golfe persique : 115 morts. Un couple d'agents nord coréens a placé une bombe dans la soute. Identifiés et arrêtés à Bahreïn, ils avalent une pastille de cyanure pour ne pas parler. L'homme décède mais la femme est sauvée et confirme : l'attentat est signé Kim Jong Il, le père de Kim Jong Un, avec pour objectif de torpiller les JO de Séoul.

Quatorze ans plus tard, récidive à l'occasion de la Coupe du monde de foot. Le monde entier est focalisé sur l'incroyable épopée de l'équipe sud coréenne qui s'apprête à disputer en ce 29 juin 2002, la petite finale pour la troisième place. A 8h54, deux torpilleurs nord coréens franchissent la frontière et bombardent sans sommation l'île de Yeon-Pyeong. Cinq jours de bataille navale intenses pour torpiller un match de foot.

30 ans après son père, qui envoyait des bombes, le fils envoie des pom-pom girls peut apparaître comme un signal finalement très positif. Qu'un dictateur fou, qui joue avec ses missiles nucléaires comme un gosse avec ses Dinky toys, soit aussi un redoutable diplomate manipulateur n'est pas forcément un signal très positif.

Alors oui, derrière ce sourire figé de 230 pom-pom girls tout de rouge vêtues plane encore et toujours l'ombre d'un dictateur fou qui règne sur le 38 ème parallèle, la frontière la plus explosive de notre planète.