Qu’est-ce que l’acétamipride, ce pesticide que veut réintroduire la loi Duplomb et qui fait bondir les écologistes
Alors qu'une proposition de loi pour "lever les contraintes" des agriculteurs arrive lundi à l'Assemblée nationale, la question de la réintroduction de l'acétamipride divise. Si ce pesticide permet de lutter contre les insectes impactant les productions, il causerait d'irrémédiables dégâts sur la santé et la productivité des pollinisateurs.
Une disposition sujette à crispations. Insecticide de la famille des néonicotinoïdes, l'acétamipride, interdite en France depuis 2018, pourrait être réintroduite dans le cadre d'une proposition de loi destinée à "lever les contraintes des agriculteurs." Porté par le sénateur LR Laurent Duplomb, le texte arrive dans l'hémicycle ce lundi, comprenant cette mesure contestée, mais réclamée notamment par les producteurs de betteraves sucrières et de noisettes.
Inquiétude des apiculteurs
Interdite depuis 2018 en France, la pulvérisation de l'acétamipride reste autorisée ailleurs en Europe jusqu'en 2033. Cette dernière est couramment utilisée pour éliminer certains insectes (tels que les pucerons, ou les chenilles) en s'attaquant à leur système nerveux, et protéger les cultures des agriculteurs.
Soutenu par les betteraviers et la FNSEA, considérant son retour comme "vital" pour éviter une "concurrence déloyale" avec les autres producteurs européens, le recours à ces insecticides est décrié par les apiculteurs. Selon eux, la létalité de ces substances impacte les pollinisateurs que sont les abeilles, leur causant des difficultés pour s'orienter, résister aux maladies ou se reproduire. Cela endommagerait leur productivité, mettant ainsi en péril nombre de ruches.
Du fait de leur persistance pendant des mois, voire des années, les néonicotinoïdes - dont seule une petite partie est absorbée par les plantes, le reste se déversant par ruissellement - présentent aussi le désavantage de s'accumuler et de polluer les sols, les eaux de surface et la végétation, affectant les invertébrés et micro-organismes de ces écosystèmes.
Quid des effets sur la santé humaine ?
L'acétamipride suscite naturellement des questionnements sur ses effets neurodéveloppementaux, par exemple chez l'enfant et l'adolescent. Si des études appuient l'hypothèse de risques potentiels, elles ne permettent pas de conclure que cela joue un rôle dans des pathologies humaines, du moins au niveau auquel ces produits sont utilisés dans la vie réelle.
Il faudrait de "nouveaux éléments" pour pouvoir en "évaluer de manière adéquate les risques et les dangers", indique l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa), appelant pour l'heure à abaisser nettement les seuils auxquels ce pesticide est jugé potentiellement dangereux.
La question divise jusque dans les rangs du gouvernement, la ministre de l'Agriculture Annie Genevard rappelant que l'acétamipride est déjà utilisée "dans tous les insecticides domestiques, dans les colliers des animaux domestiques", quand celle de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, considère "dommage d’ouvrir cette porte à la réautorisation, parce qu’on perd tout notre élan d’investissement dans des alternatives". Un exemple parmi tant d'autres des remous que devrait susciter l'examen du texte.